Le pétrole joue au yoyo - France Catholique

Le pétrole joue au yoyo

Le pétrole joue au yoyo

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Les marchés sont-ils devenus fous ? On pourrait le croire quand on voit le pétrole jouer au yoyo. Mais il y a à cela des explications, du côté de l’offre comme de la demande.

Les opérateurs ne savent plus où donner de la tête. Le 3 juillet, le baril de pétrole (Brent) atteignait 146 dollars ; quelques mois plus tard, il a perdu la moitié de sa valeur, aux environs de 70 dollars et son prix change tous les jours. Avant les chocs pétroliers, en 1973, le baril ne valait que 3 dollars. L’OPEP a constitué un cartel, regroupant la majorité des pays exportateurs : cette absence de concurrence leur a permis d’augmenter les prix, provoquant les deux chocs pétroliers de 1973 et 1979. Mais les opérateurs ne restent jamais inactifs : le prix élevé a stimulé la recherche de pétrole hors OPEP, ce qui a fait progresser l’offre et jouer la concurrence. Le prix devait donc baisser. Pour éviter cette chute des cours, l’OPEP a pratiqué la politique des quotas, en limitant sa production, la rareté artificielle faisant remonter les cours. Les mêmes causes ayant les mêmes effets, cette nouvelle hausse allait encore encourager de nouvelles recherches pétrolières aussi bien que d’autres sources d’énergie. D’où la baisse du prix du pétrole (surtout en termes réels, compte tenu de l’inflation) à partir du milieu des années 80 : contre-choc pétrolier.
D’autres facteurs ont joué, depuis les années 2000. L’un des plus significatifs est la forte progression de la demande, à cause de la croissance mondiale rapide et surtout de celle des pays émergents, comme la Chine et l’Inde, avec 10 et 8% de croissance. Résultat, le prix a à nouveau fortement progressé, atteignant des sommets milieu 2008 : ce n’est pas une bonne nouvelle pour nos économies, mais qui se plaindrait que des pays du tiers-monde décollent enfin, sortant des peuples de la misère ? Il y a eu d’autres facteurs de hausse du prix, comme la baisse du dollar, car, comme le prix est fixé en dollars, ce prix a monté pour compenser la baisse de valeur de la devise américaine. Des facteurs spéculatifs ont aussi joué, puisque, dans une situation mondiale incertaine (avec le retour de l’inflation) matières premières et énergie apparaissent comme des valeurs refuges. Notons aussi que pour nous, Européens, la hausse de l’euro, qui présente par ailleurs des inconvénients, sert ici de bouclier, puisque le prix en euro a vmoins monté que le prix en dollar.
Que s’est-il passé depuis ? Le marché s’est inversé. La crise financière s’est accompagnée d’un ralentissement économique. Les pays riches sont pratiquement en récession et les pays émergents ralentissent leur croissance du PIB. Chacun consomme moins de pétrole. Moins de demande signifie un prix en baisse, d’où la chute actuelle.

Que va-t-il se passer ensuite ? Les marchés sont toujours imprévisibles. Mais le jour où les économies redémarreront, la demande augmentant, le prix progressera. Chacun le trouve excessif et il est vrai que pour les familles comme les entreprises, l’essence est bien chère. Mais il faut rappeler deux choses. La première, c’est que l’essentiel du prix (les deux tiers) est constitué de taxes. La seconde, c’est que le pétrole va un jour disparaitre. La hausse de son prix, que l’on peut regretter à titre individuel, sera utile pour assurer la transition vers l’après-pétrole, puisque le prix élevé va favoriser la recherche d’énergies alternatives. Même si cela ne nous plait pas, d’une certaine façon, c’est la hausse du prix qui prépare l’avenir et les énergies nouvelles.

Jean-Yves Naudet