Le faux et dangereux gambit de Coccopalmerio - France Catholique

Le faux et dangereux gambit de Coccopalmerio

Le faux et dangereux gambit de Coccopalmerio

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Prêts pour un peu de casuistique ? L’Église Catholique devrait-elle permettre à un homme ou à une femme de recevoir les sacrements dans le cas suivant : une femme qui vit avec un homme marié mais divorcé, lui dit qu’elle ne peut plus vivre dans le péché ; l’homme menace de se tuer et elle, suivant le conseil de son confesseur, reste avec lui ?

Dans un entretien avec Edward Pentin, le cardinal Francesco Coccopalmerio propose cet exemple et répond : oui. Il se réfère à son récent livre sur le chapitre 8 d’Amoris Laetitia dans lequel il parle de ce cas :

Pensez à une femme qui vit avec un homme marié. Elle a trois petits enfants. Il y a déjà dix ans qu’elle vit avec cet homme. Les enfants la considèrent comme une mère. Lui, son partenaire, est très attaché à cette femme, comme amante, comme femme. Si cette femme disait : « Je quitte cette union fausse parce que je veux corriger ma vie, mais si je fais ça, je vais nuire aux enfants et au partenaire », alors elle pourrait dire ensuite : « J’aimerais bien mais je ne peux pas. » Dans ces cas précis, fondés sur l’intention de quelqu’un de changer et l’impossibilité du changement, je peux donner les sacrements à cette personne, dans l’attente que la situation soit définitivement clarifiée.

Quel préjudice causerait son départ à son partenaire ? « Mais comment peut-elle quitter cette union ? Lui [son conjoint à qui elle est mariée civilement] va se tuer. Les enfants, qui s’en occupera ? Ils seront sans mère. Par conséquent, elle doit rester. »

Il déclare même que la femme qui désire mettre un terme à cette union adultérine serait responsable de tuer son partenaire en le quittant : « Mais si quelqu’un dit : « Je veux changer mais en ce moment, je ne peux pas parce que, si je le fais, je vais tuer quelqu’un », je peux lui dire : « arrêtez-vous. Lorsque vous pourrez, je vous donnerai l’absolution et la communion. » »
Le cas présenté ici est un cas difficile par excellence, utilisé pour établir un postulat en faveur du fait de traiter l’adultère publiquement connu comme n’étant plus un obstacle à la réception légitime de la Sainte Communion. Mais ce postulat sanctionne une contrainte manipulatrice fondée sur l’émotion et rend encore plus victime la femme en traitant son désir de vivre une vie vertueuse comme la cause d’un préjudice à quelqu’un d’autre.

Comment cela peut-il se faire ? L’obéissance à la loi de Dieu est la cause du bien dans la vie de la femme en question et ce bien rayonne sur son entourage. Son départ peut choquer l’homme qui va réaliser à quel point son comportement vis à vis d’elle était abusif. Les enfants sont de sa responsabilité, ainsi que de celle de leur mère, en supposant qu’elle soit toujours en vie et impliquée dans leur existence. Sa décision de suivre la loi de Dieu attristera les enfants mais donnera un témoignage beaucoup plus important du devoir du chrétien qui est de toujours obéir à la loi de Dieu.

L’homme en question utilise la menace du suicide pour contraindre cette femme, non seulement à rester dans sa maison pour élever ses enfants, comme ce serait le cas s’il acceptait de vivre une chaste relation, comme frère et sœur, pour le bien des enfants, mais aussi, il la contraint à commettre des actes adultères. Il pèche gravement sur deux points. Elle, elle est consciente de sa conduite objectivement peccamineuse et veut conformer sa vie aux exigences de l’Évangile.

La culpabilité de la femme est atténuée par la force et la peur qui lui sont imposées par la menace de l’homme. Toutefois, lorsque la grâce conduit une personne à rejeter le péché, l’Église ne doit jamais dire à cette croyante qu’elle ne doit pas s’inquiéter de sa situation dans le péché parce que l’homme à qui elle est mariée civilement a en quelque sorte droit à des relations adultères, de crainte qu’il ne se tue.

Est-ce une approche pastorale authentiquement chrétienne que de permettre qu’une menace de mort par l’homme ne soit pas remise en question ? De même, la menace du suicide peut-elle être invoquée pour permettre que perdurent d’autres situations de péché grave ? S’il abusait sexuellement des enfants et menaçait de se tuer si on les enlevait de la maison, y aurait-il quelqu’un pour penser qu’il faudrait les y laisser ? Pourquoi son exigence de continuer ses actes d’adultère avec une femme qui n’en veut pas devrait-elle être traitée différemment ?

Ici, une hypothèse sous-jacente peut être qu’une fois que la femme a accepté de vivre en concubinage avec cet homme, elle a en quelque sorte perdu son droit à refuser les droits pseudo-conjugaux, et qu’un tel refus porterait préjudice à l’homme, ou même le tuerait. C’est une manière déformée de considérer la détresse d’une femme qui, guidée par la grâce de Dieu, veut vivre fidèlement le sixième commandement.

En autorisant « l’exception du suicide », l’Église tolèrerait l’exploitation de la femme et renforcerait l’idée erronée de l’homme selon laquelle il pourrait sans aucune conséquence manipuler une autre personne jusqu’au moment où « la situation sera définitivement clarifiée » (quelle que puisse être la signification de cette assertion).

Le rôle du prêtre confesseur dans ce cas consiste à aider cet homme et cette femme à avoir des vies vertueuses, ce qui signifie d’abandonner les menaces de suicide et de donner le bon exemple aux enfants en vivant ensemble une vie chaste. Si ce n’est pas possible, le prêtre devrait conseiller à la femme repentante de vivre en accord avec sa conscience droite et de partir.

Il est triste de dire que le cardinal Coccopalmerio croit qu’il est impossible (mise en gras ajoutée) à des chrétiens de changer de situation :

« Je dis dans le livre qu’il est nécessaire d’instruire les fidèles que, lorsqu’ils voient deux divorcés remariés aller communier, ils ne doivent pas dire que l’Église dit à présent que les conditions sont bonnes et que le mariage n’est par conséquent plus indissoluble. Ils doivent dire que ces gens ont des raisons, examinées par les autorités ecclésiales, à cause desquelles elles ne peuvent pas changer d’état de vie, et qu’en attendant qu’ils le puissent, l’Église met l’accent sur leur désir, leur intention de changer avec l’impossibilité de le faire. »

Au contraire : « …Pour Dieu, tout est possible. » (Mt 19, 26)

Source : https://www.thecatholicthing.org/2017/03/18/the-false-and-dangerous-coccopalmerio-gambit/

Photo : Cardinal Coccopalmerio.

Le révérend Gerald E. Murray, docteur en droit canon, est curé de l’église de la Sainte Famille à New York, N.Y.