Le diable et le Pape François. - France Catholique
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L'amour du travail bien fait avec saint Joseph artisan
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Le diable et le Pape François.

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Je viens de séjourner à Rome pendant le conclave papal, ainsi que quelques jours avant et après, tentant de faire le tri des évènements, des déclarations — et des rumeurs. Je sais d’expérience qu’il ne faut pas prendre trop au sérieux la plupart des tentatives pour interpréter les premiers faits et gestes du pape. Il y a un manque de foi, ou une forme de paranoïa, dans cette envie maladive de prévoir l’avenir. Nous saurons bien assez tôt quel cap il va prendre. C’est d’évidence un homme doué d’une large vision, et efficace dans l’action.

N’oublions pas ce que nous savons avec certitude du pape François: un saint homme, intelligent est à la tête de l’Église, ardent défenseur de la doctrine Catholique — y-compris sur les sujets brûlants tels que la contraception, l’avortement, et le mariage gay. En même temps, il a vécu très proche des pauvres, et il soutient les efforts pour les aider — mais certes pas les « programmes sociaux » mal ficelés, et encore moins les divagations marxistes de la théologie de libération.

Bref, nous avons un pape qui n’entre dans aucune catégorie partisane, mais a trouvé la manière pour penser et agir en totale harmonie avec l’Église dans le contexte Argentin.

C’est trop facile de lire de longues pages dans ses quelques paroles prononcées au début. Par exemple, on a beaucoup glosé sur les quelques mots prononcés du balcon de Saint Pierre: « vous savez tous que le conclave avait pour tâche de donner un évêque à Rome. Il paraît que mes frères cardinaux sont allés presque au bout de la terre pour en trouver un.»
Les Romains et, plus généralement, les Italiens, ont interprété ces mots comme un signe de son désir de se rapprocher du peuple de son nouveau diocèse — et c’est bien vu. Il a fait quelques pas dans les rues de Rome à la sortie de la Messe de dimanche, juste quelques pas, mais sans avertir ses gardes du corps. Nous savons que c’est conforme aux habitudes de l’Archevêque Jorge Bergoglio à Buenos Aires, et les habitudes passées sont un meilleur révélateur du futur qu’une simple spéculation.

Spéculer est facile, interpelle, parfois même peut être utile. Mais c’est aussi s’affranchir des réalités. On a beaucoup parlé, chez ceux qui en rêvent, de la mention appuyée faite par le pape François de sa fonction d’évêque de Rome comme d’une indication de son intention d’amoindrir le rôle de la papauté. Il a passé mardi un long moment avec le Patriarche Orthodoxe Universel d’Istamboul, Bartholomée 1er. Et voilà — insistant sur le titre d’évêque de Rome, et non de pape — les élucubrations selon lesquelles François ne se considérerait que comme l’un, parmi d’autres, des responsables de la Chrétienté. Ne parions pas là-dessus. Ce pape est Catholique.

Selon moi, contrastant avec ces réactions, un des sujets les plus significatifs déjà abordés se trouve dans la mention répétée du diable. Lors de sa première messe papale à la Chapelle Sixtine, dans son homélie aux cardinaux électeurs, il a cité l’écrivain français Léon Bloy: « celui qui ne prie pas Dieu prie le diable.» et, poursuivant, il ajouta son commentaire: « quand on ne confesse pas Jésus-Christ, on confesse la domination du diable sur terre.»

Deux jours plus tard, s »adressant à un groupe de cardinaux il les exhortait « à ne pas céder à l’amertume et au pessimisme auxquels le diable nous pousse chaque jour.» Ce n’est pas chez lui un discours inhabituel. Quand il tentait d’empêcher le gouvernement Argentin de légaliser le mariage homosexuel, il posait ainsi le problème:

« Ne soyons pas naïfs: Il ne s’agit pas d’un simple débat politique; c’est une tentative de destruction du plan de Dieu. Ce n’est pas une simple proposition de loi (çà en a la consistance) mais une démarche du père des mensonges pour tromper dans la confusion les enfants de Dieu. . . . Tournons-nous vers Saint Joseph, Marie et l’Enfant pour demander avec ferveur qu’ils défendent la famille Argentine en ces moments. . . . Puissent-ils nous soutenir, nous défendre, nous accompagner dans cette guerre pour Dieu.»

Un pape s’exprimant ouvertement et constamment au sujet du langage du diable, père des mensonges, de la guerre menée contre Dieu, et de la prière à la Sainte Famille comme arme en ce combat, n’a certes pas l’ambition de relever sa cote auprès des médias progressistes. Christina Kirchner, Présidente de l’Argentine l’a taxé de « moyenâgeux » pour ces commentaires, ce qui ne l’a guère ému, ni lui ni bien d’autres. Et elle fut bien obligée de retirer ces critiques.

Ce peut n’être qu’une réaction personnelle après avoir entendu tant de commentaires politiques, liturgiques, théologiques, sur le Pape François, mais selon moi un pape qui peut redire avec force que le péché existe, qu’il est davantage qu’une simple question de faiblesse et d’erreurs humaines, que tout dans le drame historique du Christianisme, conflit entre Dieu et Satan, est au centre de la Foi — ce pourquoi vit l’Église — un tel pape a un message tout neuf à porter au monde.

J’admire sa vie pleine de simplicité, d’humilité, de défense des pauvres et des laissés pour compte, plein de précautions dans la « sale guerre » au sein de l’Argentine. Il a suivi le chemin. Mais on a tendance à traiter celà comme des « problèmes », genre de plate-forme politique dans l’Église ou hors d’elle. Et les autres sont aussi déjà impliqués dans des efforts humanitaires.
Chacun voit bien la nécessité d’une réforme de la Curie, de la Banque Vaticane, ou autres organismes Romains. Mais pour une Église confrontée à la légèreté ou à l’aveuglement du monde moderne ces réformes ne sont pas, ne peuvent pas être l’essentiel.

Le pape François montre bien que tout cela, et bien d’autre questions encore, doit être traité car le pire drame spirituel que la Chrétienté ait mis en évidence est l’image précise de nos existences perturbées, individuellement et socialement.

S’il peut à nouveau faire voir la réalité de ce drame, ce pourra être sa plus surprenante et plus révolutionnaire contribution pour un monde croyant que toutes ces guerres sont perdues depuis bien longtemps — et qui en est malade.

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Photo : Un homme simple: il règle sa note à l’hôtel du conclave. © Osservatore Romano

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Source : http://www.thecatholicthing.org/columns/2013/the-devil-and-pope-francis.html