Le connaissez-vous ? - France Catholique
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Saint Benoît, un patron pour l'Europe
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Le connaissez-vous ?

Traduit par Isabelle

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C’est la question que pose avec une constance, et une intensité émotionnelle croissantes le pasteur afro-américain Dr S.M. Lockridge dans le fameux sermon protestant, « Voilà mon Roi ». On peut interpréter la question soit comme un appel à l’autel pour les non croyants, soit, pour les fidèles, comme un rappel – une affirmation de la doctrine « une fois sauvé, toujours sauvé », connue également comme « la persévérance des saints ».

Comment les catholiques devraient-ils répondre à la question « Le connaissez-vous ? »

De nombreux protestants prient pour que les gens, leurs enfants compris, « connaissent le Seigneur ». Ils veulent dire par là, en général, qu’ils voudraient que ceux qu’ils aiment fassent une expérience religieuse qui les amène à la conversion, et au salut éternel. Comme je l’ai expliqué ailleurs, les catholiques n’ont pas besoin de prier pour cela pour leurs enfants, du moins pas au sens des protestants, à cause de ce qui s’accomplit lors du sacrement du baptême, lequel devrait être administré aux enfants catholiques.

Le catéchisme enseigne que le baptême « provoque réellement la naissance par l’eau et l’Esprit sans lesquels personne  ne peut entrer dans le Royaume de Dieu ». (CCC 1215) De plus, « le baptisé a  revêtu le Christ ». Par le Saint Esprit, le baptême est un bain qui purifie, justifie et sanctifie ». (1227)
Par un baptême correctement administré, tout chrétien ou chrétienne est purifié de ses péchés, et reçoit le Saint Esprit, travail puissant de la Grâce à la lumière de tous les bénéficiaires de ce saint sacrement. Si cela ne nous permet pas de connaître le Seigneur, je ne sais pas ce qui le permet !

Considérons également les paroles du Christ lui-même, qui, rencontrant un jeune homme qui le proclame « Fils de David », déclare : Laissez les enfants venir à moi, ne les en empêchez pas ; car c’est à leurs semblables qu’appartient le Royaume des Cieux. » (Matthieu XIX 14)

Cependant, ni le baptême, ni une quelconque expérience de conversion postérieure n’assurent que quelqu’un demeurera toujours sauvé. Dans la partie du sermon sur la montagne, peut-être la plus inquiétante, Jésus dit à la foule :

Ce n’est pas celui qui me dit « Seigneur Seigneur », qui entrera dans le Royaume des cieux, mais celui qui fait la volonté de mon Père qui est dans les cieux. Ce jour-là, beaucoup me diront « Seigneur, Seigneur, n’avons-nous pas prophétisé par ton nom, et chassé des démons par ton nom, et fait beaucoup de miracles par ton nom ? » Alors je leur dirai ouvertement : « Je ne vous ai jamais connus, retirez-vous de moi, vous qui commettez l’iniquité. » (Matthieu VII 21-23)

Cet avertissement présente un problème à la fois pour les protestants et les catholiques. Dans la tradition calviniste d’où provient « la persévérance des saints », les interprètes de ce passage ont déclaré que si une personne perd la foi, cela doit vouloir dire que cet individu n’a jamais vraiment eu la foi. Pour les protestants non-calvinistes, qu’on appelle généralement « Arminians », ce passage signifie que même les chrétiens qui accomplissent de grands actes de foi peuvent se séparer de leur Seigneur et perdre le salut.
Le catéchisme de l’Eglise catholique nous rappelle la possibilité de perdre le salut :

Un péché mortel détruit la charité dans le cœur de l’homme par une grave violation de la loi de Dieu ; cela éloigne l’homme de Dieu qui est sa fin ultime et sa béatitude, en Lui préférant un bien inférieur à Lui….Quiconque refuse délibérément d’accepter Sa miséricorde en se repentant, rejette le pardon de ses péchés et le salut offert par le Saint Esprit. Une telle dureté de cœur peut conduire à l’absence de contrition finale et la perte éternelle (CCC 1856, 1864)

Cet enseignement tire son origine des Ecritures, et nous prévient ainsi : « il y a un péché qui est mortel…tout méfait est péché, mais il y a des péchés qui ne sont pas mortels. » (1 Jean V 16-17)

Cependant, il y a des moyens moins dramatiques par lesquels nous pouvons entraver ou mettre fin à notre connaissance de Dieu. Le SEIGNEUR, parlant par le psalmiste, réprimande souvent Son peuple d’offrir des sacrifices sans y mettre son cœur, sans remercier ni louer « Ces choses que tu as faites tandis que je faisais silence »

Ces choses que tu as faites tandis que je faisais silence;

Tu pensais que j’étais quelqu’un comme toi.

Mais maintenant, je te blâme, et je te mets en accusation. (Psaume 50, v. 21)
Voilà un moyen plus lent et plus subtil de perdre le contact avec Dieu, pour quelqu’un élevé dans la familiarité non pas avec la personne du Christ, mais avec les rituels et les routines quotidiennes de la vie chrétienne. Même le catholique qui assiste à la messe, récite le rosaire, va se confesser et lit de la littérature religieuse peut faire tout cela simplement « pour la forme ». Il peut aimer la discipline régulière, ou reconnaître intellectuellement la vérité du christianisme. Mais son cœur est absent.

Peut-être que le pape François a de tels chrétiens à l’esprit dans sa dernière exhortation apostolique quand il parle des « gnostiques » qui sur-intellectualisent leur foi à un point tel qu’elle obscurcit ou annule cette « rencontre personnelle avec le Christ » dont Benoit XVI parlait si souvent. Notre saint Père réprimande ceux qui « réduisent l’enseignement de Jésus à une logique froide et dure qui essaye de tout dominer. » (Gaudete et Exultate 40)

Si l’on compare les définitions catholiques sur la manière de « connaitre le Seigneur » à celles très dominantes du protestantisme, c’est là que le bât blesse. Tandis que de nombreux protestants présument que le chrétien est sauvé pour toujours du fait d’une profession de foi ou d’une intime conviction, nous, catholiques, plaçons notre confiance dans l’œuvre rédemptrice du Christ qui s’applique à nous à travers la grâce des sacrements. Cependant, même ainsi, nous vivons une tension entre l’espérance et la présomption. Nous cherchons à vivre en enfants d’un Père aimant et gratifiant, mais nous nous souvenons que nous pourrions, par des actions immorales ou un pourrissement spirituel plus lent, nous séparer de Dieu.

Nous devons vivre avec cette tension, nous méfiant à la fois de notre immoralité et de notre indifférence. Mais nous ne devrions pas vivre cela dans la peur, mais dans une humilité qui nous rappelle que même ceux qui chassent des démons peuvent manquer d’arriver au ciel s’ils oublient que la vraie finalité de l’homme est le bonheur en Dieu.

« Le connaissez-vous ? » Oui, par Sa grâce, nous, catholiques, le connaissons, mais une relation attentive et aimante est une danse qui nécessite deux partenaires, même s’il y en a Un qui mène.

29 juillet 2018

Source : https://www.thecatholicthing.org/2018/07/29/do-you-know-him/