Ce n’est pas un livre mais c’est un cri à la fois d’amour et d’indignation. Andréi Makine, l’auteur, d’origine russe, du Testament Français prête sa plume à la cause du lieutenant Schreiber, un jeune juif de 21 ans d’origine allemande, renvoyé de l’armée française à cause de ses origines en 1940, et qui décida de poursuivre le combat pour défendre la France. Il raconte la guerre de Jean-Claude Servan-Schreiber mais aussi celle de ses compagnons, tous ceux qui ont sauvé, et souvent au prix de leur vie, l’honneur de leur pays.
Mais le lieutenant Jean-Claude Servan Schreiber n’est pas n’importe-qui : issu de la famille Servan-Schreiber, le courageux résistant est devenu après la Guerre un influent homme de presse qui a fréquenté les plus grands. C’est à la suite de la la publication de sa lettre d’amour à un pays mythique, Cette France que l’on oublie d’aimer qu’André Makine a fait la connaissance du Lieutenant Schreiber : ce dernier connaît certains résistants dont Makine parle dans son livre et aimerait les évoquer en sa compagnie. Au fil des rencontres, naît une amitié ; l’écrivain d’origine russe, bouleversé par le témoignage du vieil homme, l’encourage à écrire sa guerre. Et là commence la surprise : les refus des éditeurs, le silence méprisant de la presse, et l’échec commercial.
Andreï Makine décide d’écrire lui-même l’histoire de ce livre et à travers elle cette guerre et cette France pour laquelle le lieutenant Schreiber s’est battu. La langue est magnifique et le récit cruel pour une France, devenue amnésique et où les nouveaux maitres à penser sont les footballeurs et les animateurs des plateaux de Canal Plus.
Loin du politiquement correct, il raconte une époque où l’immigration était vécue comme une aventure humaine, le sacrifice comme un honneur, la mort regardée en face et la rencontre avec Dieu pas tournée en dérision. Il nous parle surtout de ce qui définit un homme, quel est son identité profonde ? Dans le cas de Jean-Claude Servan-Schreiber, ce sont ces cinq années de guerre qui le disent le mieux ; mais il fallait un Andréi Makine pour l’écrire et le crier à la face du monde.
Grasset 17 Eur
