La tradition jubilaire - France Catholique
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Van Eyxk, l'art de la dévotion
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La tradition jubilaire

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Dans le long texte qu’il a rédigé en vue de la Journée mondiale pour la paix du 1er janvier prochain, le pape François demande à tous les gouvernements, qui maintiendraient encore en vigueur la peine de mort, de l’abolir, notamment dans le cadre du Jubilé de la miséricorde, où l’Église est maintenant engagée. Il associe cette demande à diverses suggestions comme celle d’une possible amnistie dont il ne précise pas nettement le contenu. Mais on devine bien son intention fondamentale, qui se rapporte à la tradition des jubilés, marquée par des mesures exceptionnelles qui rompent avec les habitudes et même les lois courantes, afin de renouveler le corps social, l’amener à un retour sur soi, une conversion. N’est-ce pas aussi l’Église qui se convertit dans une démarche où elle change éventuellement certaines de ses conceptions ?

En ce qui concerne la peine de mort, l’évolution et même la mutation est certaine. Il me semble qu’elle s’est amorcée sous le pontificat de Jean-Paul II. Au moment de l’élaboration du Catéchisme de l’Église catholique, un document de référence essentiel, il y eut comme une hésitation de la part des rédacteurs. En un premier temps, la possibilité de la peine capitale fut admise avec une justification qui renvoyait à des motifs traditionnels, tellement il était difficile de rompre avec une histoire immémoriale. Mais le pas fut franchi par saint Jean-Paul II, qui milita résolument en faveur de l’abolition, dépassant toutes les réticences de certains moralistes.

François se situe dans la même ligne. Son appel sera-t-il entendu ? Un pays aussi important que les États-Unis demeure encore acquis au châtiment suprême. Le Pakistan l’applique avec une rigueur et une fréquence qui affolent les observateurs attachés aux droits de l’homme. Peut-être une nouvelle réflexion théologique devrait-elle se développer à partir du grand tournant de l’Église catholique. Elle pourrait s’inspirer de la thématique de l’Agneau de Dieu, l’agneau pascal, l’agneau sans tâche, dont parle Isaïe, celui qu’on amène à l’abattoir sans qu’il ouvre la bouche. La Nouvelle Alliance scellée dans le sang de l’Agneau n’annonce-t-elle pas une nouvelle économie, une autre civilisation, à l’encontre de l’horreur des sacrifices anciens ?

Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 16 décembre 2015.