La mémoire de René Girard - France Catholique

La mémoire de René Girard

La mémoire de René Girard

Copier le lien

Lundi soir, l’église Saint-Germain-des-Prés était remplie par une belle assistance venue honorer la mémoire de René Girard, disparu en novembre dernier. C’était l’Académie française qui avait pris l’initiative de cette cérémonie, René Girard qui appartenait à l’illustre compagnie étant décédé à Stanford en Californie, où il avait été inhumé. Le lieu choisi était tout à fait symbolique. Cette église au cœur du quartier latin est une ancienne abbatiale prestigieuse, puisqu’elle est liée à l’ordre bénédictin depuis ses origines. De plus, au XVIIe siècle, l’abbaye saint-Germain-des-Prés était devenue la maison mère de la congrégation de Saint-Maur, issue d’une volonté réformatrice pour revenir à la pureté de la règle monastique, mais de plus en plus dévolue à un labeur intense, littéraire et historique. Le seul nom de Mabillon suffirait à la gloire de Saint-Germain-des-Prés, représentant majeur de la pensée chrétienne dans ses plus hautes expressions.

L’importance de la pensée de René Girard, au carrefour des sciences humaines et de la théologie, même si l’intéressé ne s’est jamais voulu théologien, justifiait ce recueillement dans l’ombre de Mabillon. Ainsi que l’a rappelé dans son homélie Mgr Claude Dagens, son confrère académicien qui présidait la messe, la Passion du Christ était au cœur de la pensée de l’auteur de La violence et le sacré. Le penseur a stimulé puissamment la réflexion théologique en imposant une clarification de la notion de sacrifice. Par ailleurs, il réintroduisait la pensée chrétienne dans le champ de la pensée contemporaine, alors même que l’époque proclamait la mort de l’homme après avoir annoncé celle de Dieu.

René Girard était, en harmonie avec son œuvre, un catholique fervent, très attaché à l’intégrité de la foi. Ce qu’il y avait de plus moderne dans sa démarche propre ne visait nullement à la déconstruction du dogme. Elle visait au contraire à sa meilleure compréhension et à son approfondissement. L’assistance qui entourait, lundi soir, Mme René Girard, ses enfants et ses petits-enfants venus des États-Unis, témoignait de sa reconnaissance. Elle avait suivi, avant la messe, un concert spirituel exécuté par un quatuor, Les sept paroles du Christ en croix de Joseph Haydn, Michel Serres, grand ami de René Girard, donnant un commentaire émouvant de cette œuvre si bien accordée au témoignage du philosophe chrétien. Celui qui discernait dans le mystère de la Croix le déchiffrement même de notre existence.

Chronique diffusé sur Radio Notre-Dame le 17 février 2016.