La beauté, et le chant des oiseaux - France Catholique
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Van Eyck, l'art de la dévotion. Renouveau de la foi au XVe siècle
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La beauté, et le chant des oiseaux

Traduit par Pierre

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Une étude récemment publiée par le magazine « Animal Behavior » [Comportement des animaux] analyse les propriétés en termes d’harmonie du chant du plus célèbre oiseau chanteur, le rossignol, Hélas, la science n’y trouve pas trace de musique. Alors que les notes et harmonies musicales telles que nous les connaissons sont soumises à des intervalles selon diverses échelles, les chants d’oiseaux semblent davantage régis par le hasard. Présentant son article, Marcel Araya-Salas écrit: « j’ai testé un modèle selon l’hypothèse que, dans le chant des oiseaux, les intervalles d’une note à la suivante seraient plus proches des intervalles harmoniques que soumis au hasard . . . Sur 243 échantillons six seulement (soit 2%) avaient des intervalles proches, de manière significative, des intervalles harmoniques, ce qui ne révèle aucune présence systématique d’intervalles harmoniques.» En d’autres termes: le chant des oiseaux est dépourvu de la structure musicale sous-jacente que nous associons normalement à la musique. Commentant cet article pour la revue « Science », Emily Underwood écrit: « bien que les humains aient depuis la nuit des temps attribué des qualités musicales au chant des oiseaux le calcul statistique froid, brutal, montre que ce n’est qu’illusion.» On peut penser qu’une fois de plus la science a rompu un charme en ce bas monde. Le « réductionisme » est-il à nouveau à l’œuvre pour effacer la beauté, l’harmonie, la musique, l’art, de notre vision du monde au profit d’un monde de la science froid et abstrait? Et pourtant le fait que cette étude établisse une distinction fondamentale entre la musique telle que conçue par l’homme et les vocalises des oiseaux nous interpelle. Le chant des oiseaux est disqualifié car privé de la grande et harmonieuse beauté qu’on trouve dans la musique — précisément le genre de musique que l’homme a la faculté de créer et d’apprécier. Le prêtre Anglican et physicien John Polkinghorne a écrit un jour sur l’unicité de l’homme, « Bien des biologistes prétendent ne rien voir qui différencie l’Homo sapiens. Pour eux, le comportement de l’homme n’est qu’une forme particulière de comportement animal, et l’humanité n’est pas un rameau particulier du buisson bourgeonnant de l’évolution.» Pour soutenir l’humanité, il déclarait: « les notes merveilleuses du chant d’un oiseau servent apparemment à marquer son territoire, alors que les hommes explorent les reichesses inépuisables de la musique pour des motifs fondés sur le plaisir plutôt que sur la satisfaction d’un besoin.» Et voilà. Il semblerait que par cette étude scientifique du chant des oiseaux nous découvrions une nouvelle preuve de l’aptitude intellectuelle unique de l’homme. Il ne s’agit pas d’une différence entre le chant de l’homme — plus compliqué — et le chant des oiseaux. C’est toute autre chose. Si notre musique diffère du chant des oiseaux, non seulement en degré mais aussi en nature, c’est que nous avons quelque chose de différent en nous. Comme Chesterton l’a remarquablement exprimé: « l’art est le propre de l’homme.» Pourtant, se contenter de dire que l’homme fait de la musique et les oiseaux émettent des sons ne paraît pas convenable. Celui qui a admiré le spectacle de la nature ou apprécié les chants de la forêt au printemps ne se contentera pas d’une telle dépréciation de la Création. Le genre de beauté présente dans la musique de l’homme — pas dans celle des oiseaux — est un indice montrant qu’elle n’en est pas moins une création humaine. La beauté expliquée mathématiquement de la musique a été découverte, et non pas inventée. Les harmonies qui séduisent, reconnues dans leur beauté ordonnée même pour une oreille peu formée, montrent à l’examen des liens reflétant une profonde harmonie. Cette harmonie est préexistante à l’homme, elle n’en découle pas. Ainsi donc, même si la nature permet à l’homme d’accéder à un niveau de beauté inégalé par le seul chant des oiseaux, l’homme lui-même n’est pas la source de la beauté qu’il a le privilège de goûter. Donc, bien que les oiseaux ne fassent pas de musique pour leur plaisir, comme les fleurs ne poussent pas dans toute leur beauté à l’intention du sens esthétique de l’homme mais pour favoriser leur reproduction, on y trouve une forme de beauté bien plus grande que la leur. Bien que n’ayant pas de plus grandes propriétés que la musique ou l’art humains, les chants d’oiseaux, comme les fleurs, expriment la beauté, car, au travers de la pensée de l’homme, ils ont une relation privilégiée avec quelque chose au-delà des oiseaux et des hommes. Le grand théologien Allemand Romano Guardini [1886 – 1968] écrivait à propos de la vue catholique sur le monde: « L’approche à la nature dans laquelle le soleil, la lune, les arbres, etc… sont des personnes douées de voix pour chanter la gloire de Dieu n’est pas un conte de fées; c’est l’expression poétique inspirée de l’idée que le soleil, la lune, et toute la création de Dieu sont le miroir reflétant la gloire de Dieu car, étant Ses créatures, ils sont le reflet d’une partie de Sa nature. Ils Lui rendent gloire par leur propre existence. Ils ne le savent pas, mais l’homme, lui, le sait; il peut joindre ses pensées à leur silencieux chant de louange; il peut l’exprimer en leur nom, l’offrir à Dieu, agissant en porte-parole de toute la création.» Ce qui, pour l’oiseau ou la fleur, est essentiellement pratique, se révèle pour l’homme — image de Dieu — le reflet de quelque chose qui nous dépasse. Par la beauté intellectuelle de la musique tout comme par la beauté non consciente de la nature, l’homme peut accéder, sans partage avec les animaux, à la beauté. Il perçoit qu’il n’est pas question d’utilitarisme dans l’évolution, mais d’une réflexion dont la Source nous domine.
Michael Baruzzini, nouveau collaborateur à « The Catholic Thing » est un journaliste indépendant. Il a créé le site CatholicScience.com procurant des pistes de réflexion aux étudiants catholiques.
Image : Un rossignol de deux mille ans découvert à Pompei.
Source : http://www.thecatholicthing.org/columns/2012/beauty-and-birdsong.html