La Bonne Nouvelle… et la mauvaise - France Catholique
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Van Eyxk, l'art de la dévotion
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La Bonne Nouvelle… et la mauvaise

Traduit par Antonia

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Nous savons grâce à des sources grecques, latines et de vieil anglais que le mot Evangile (ou Gospel en anglais) signifie « Bonne Nouvelle ». C’est effectivement une bonne nouvelle puisque l’Evangile contient l’enseignement et la révélation du Christ. Saint Paul dit : « Pour moi la vie ne compte pas… pourvu que je [puisse]… rendre témoignage à la Bonne Nouvelle de la grâce de Dieu. » (Actes, 20, 24).

Dans de nombreuses liturgies et homélies actuelles, nous semblons nous complaire dans la « bonne nouvelle ». Les messes sont joyeuses, la musique liturgique est joyeuse, et tous les fidèles sont joyeux en quittant l’église, après avoir serré la main du joyeux prêtre qui nous a envoyés… vers la joie.
La « Bonne Nouvelle » de la miséricorde et de l’amour du Christ qui nous est révélée dans et par Sa vie sacrée et le mystère pascal est devenue une occasion de réjouissances (voire de « danses liturgiques »), mais rarement la source d’une sobre réflexion sur les mauvaises nouvelles qu’implique la Bonne Nouvelle.

Nous semblons incapables de méditer sur le mal profond et réel en nous et autour de nous, ce qui explique sans doute pourquoi notre spiritualité paraît si superficielle à de nombreux pratiquants et non-pratiquants. En revanche, nous entendons dire presque chaque jour qu’une odieuse intolérance serait implantée dans le tissu même de nos institutions culturelles, gouvernementales et éducatives.

Les pouvoirs en place nous répètent régulièrement à quel point nous avons tort de nous cramponner à nos Bibles et à nos principes ; et ils nous enjoignent de repousser toute notion de normes éthiques universelles, normes, selon eux, incompatibles avec ce qui est couramment considéré comme l’esprit démocratique.

Donc de nos jours, la « Sainte Messe » se ramène à un sentiment général de bien-être. La messe est marquée au sceau de la convivialité ; elle doit nous « rasséréner » ; elle nous permet de passer un bon moment avec notre voisin sur les bancs de l’église (n’oubliez pas de vous présenter) et d’être déchargé pendant cette pause des importants fardeaux de la vie réelle.

Nous n’avons certainement pas besoin d’un prêtre du genre Savonarole nous parlant du péché, du chagrin, de la souffrance et du salut (ou du danger de ne pas y parvenir). Pas besoin non plus d’un Rambo-sur-l’ambon pour nous dire que le mal passe à travers chaque cœur humain et chaque culture humaine. Tout le « vieux fatras » sur la vie humaine présentée comme une vallée de larmes a disparu avec la Bible de Douai1 (cf. le texte du Psaume 83,7 ; dans cette traduction : le val des pleurs y est devenu le val des Baumiers). Vatican II a supprimé les tourments de l’enfer, n’est-ce pas ? A présent, le cœur du message de l’Evangile est l’abstention de tout jugement, l’ouverture d’esprit et de joyeuses liturgies.

Nous lisons pourtant dans la Constitution Gaudium et Spes que « Un dur combat contre les puissances des ténèbres passe à travers toute l’histoire des hommes : commencé dès les origines, il durera, le Seigneur nous l’a dit, jusqu’au dernier jour. Engagé dans cette bataille, l’homme doit sans cesse combattre pour s’attacher au bien » (par.37).

Ce document explique aussi que l’Eglise doit faire écho à la parole de l’Apôtre : « Ne vous modelez pas sur le monde présent ». (Romains 12, 2). C’est-à-dire sur cet esprit de vanité et de malice qui change l’activité humaine, ordonnée au service de Dieu et de l’homme, en instrument de péché. »

L’appel à la Vierge Marie du Salve Regina doit sembler étrange aux oreilles des catholiques modernes : « Salve Regina, mater misericordiae, vita, dulcedo et spes nostra, salve. Ad te clamamus, exsules filii Evae. Ad te suspiramus, gementes et flentes in hac lacrimarum valle ». [Salut ô reine, mère de miséricorde, notre vie, notre douceur, notre espérance, salut ! Enfants d’Eve exilés, nous crions vers toi. Vers toi nous soupirons, gémissant et pleurant dans cette vallée de larmes] (hymne attribuée à l’évêque du Puy Adhémar de Monteil (XIe siècle)).

Le Catéchisme de l’Eglise catholique nous enseigne également que le péché (tout comme le chagrin qui en découle en fin de compte) n’est pas « un défaut de croissance, une faiblesse psychologique, une erreur, la conséquence nécessaire d’une structure sociale inadéquate » (par.387). Il fait partie de la condition humaine moralement imparfaite qui nous est commune à tous.

Le péché est le mal. Le péché est désobéissance délibérée à la volonté de Dieu. Le péché rejette la bonté et la miséricorde divines, et place l’individu au-dessus du Sauveur, ce pour quoi il a besoin d’un Sauveur. La voilà, la mauvaise nouvelle. La Bonne Nouvelle, au contraire, nous dit que Jésus sauve ceux qui veulent Le suivre.

Tous sont les bienvenus dans l’Eglise. Mais ici encore, nous retrouvons la « mauvaise nouvelle », car le saint sacrifice de la messe commence par cette exhortation : « Mes frères, préparons-nous à la célébration de l’eucharistie en reconnaissant que nous sommes pécheurs ». Nous nous confessons et nous repentons en nous frappant la poitrine : « Je reconnais que j’ai grandement péché en pensée, en parole, par action et par omission ; oui, j’ai vraiment péché ».

Oui, une vraie douche froide ! Est-ce que cela ne nous rappelle pas que nous nous trouvons dans une vallée de larmes de notre fait, selon la vieille rengaine «  de la culpabilité catholique » ? Effectivement, et c’est normal.
Saint Augustin l’a dit très clairement : « Dieu nous a créés sans nous. Il n’a pas voulu nous sauver sans nous ». (Catéchisme de l’Eglise catholique, par.1847). La Bonne Nouvelle ne prend tout son sens que quand nous comprenons aussi la mauvaise nouvelle : nous sommes des pécheurs en grand besoin des enseignements et de la grâce de Notre Seigneur. C’est pourquoi nous devons d’abord reconnaître notre péché et ensuite nous efforcer, avec la grâce de Dieu, de corriger nos vies. Nous devons toujours et partout essayer de nous conformer aux préceptes du corps mystique du Christ, l’Eglise. Et nous devons travailler à notre salut avec ferveur, en désirant de plaire à Dieu en pensée, en parole et en action. (cf. Philippiens 2, 13).

Source : https://www.thecatholicthing.org/2017/09/10/the-bad-news-about-the-good-news/


Photographie : Le Christ glorifié dans les cieux par Fra Angelico, vers 1424 [National Gallery, Londres]


Le doyen James H. Toner, titulaire d’un doctorat, est professeur émérite de Commandement et déontologie au Air War College des Etats-Unis et l’auteur de Morals under the Gun et d’autres ouvrages. Il a enseigné à l’Université Notre Dame (Indiana), à Norwich, Auburn, à l’Air Force Academy des Etats-Unis et au Holy Apostles College&Seminary.