Il est bon pour nous d'être ici - France Catholique
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Van Eyck, l'art de la dévotion. Renouveau de la foi au XVe siècle
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Il est bon pour nous d’être ici

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La Transfiguration du Christ, Gérard David, 1520.

La Transfiguration du Christ, Gérard David, 1520.

[Musée de l'église Notre-Dame, Bruges, Belgique]

Le deuxième dimanche du Carême, nous lisons toujours le récit de la Transfiguration sur le Mont Tabor. Cette année, Matthieu nous dit : « Jésus prit avec Lui Pierre, Jean et Jaques et gravit la montagne pour prier. » La prière est l’une des trois formes traditionnelles des pénitences de Carême, de concert avec l’aumône (la charité) et le jeûne (le sacrifice). Une chose qui pourrait améliorer notre vie de prière ce Carême est d’apprendre comment prier plus parfaitement la plus grande prière de l’Église : la messe.

La plupart des gens ne pensent pas à la messe comme à une prière. Certains pensent que c’est quelque chose à faire parce que nous devons le faire. Pour eux, c’est un simple rituel. D’autres pensent que c’est une série de prières dites par le prêtre ; ils viennent juste écouter et regarder, et non participer. D’autres encore pensent que la messe devrait les faire se sentir bien, alors quand la musique n’est pas pleine d’entrain ou que le prédicateur n’est pas captivant, ils s’en vont désappointés – voire même fâchés.

Et d’autre encore pensent que la messe est une sorte de tâche à accomplir, alors ils pensent que s’ils ne sont pas physiquement actifs d’une manière ou d’une autre, peut-être en servant la messe ou en distribuant la communion, ils ne se sentent pas avoir « fait » la messe.

Ils comprennent tout de travers. La messe est une magnifique prière qui implique chacun d’entre nous, du début à la fin. Il y a clairement des prières séparées ; elles se rassemblent pour former une grande prière. Quand nous comprenons cela, la messe devient non seulement intensément personnelle et utile, mais également profondément significative et réformatrice de vie.

Alors, pourquoi Jésus emmène-t-il ses disciples en haut de la montagne pour prier ? Ne pouvaient-ils pas prier simplement n’importe où ? Jésus n’était-il pas toujours en prière avec le Père ?

Premièrement, rappelons-nous que Jésus, bien que Dieu, est également un homme qui, comme tous les hommes, peut être distrait. Alors Il se met, Lui est ses trop humains apôtres, loin pour être seul et prier. Nous également, nous avons besoin de nous éloigner dans un endroit tranquille où personne ne nous distraira – une église par exemple. Plus important, nous allons à l’église pour prier pour la même raison que les apôtres gravissent la montagne : pour être là où se trouve Jésus. Bien sûr, Jésus est partout présent, spirituellement, mais Il choisit de se rendre vraiment présent, spécialement à la messe, dans l’Eucharistie. Donc nous venons à la messe pour être dans la véritable présence du Christ.

Ensuite nous lisons : « Pierre et ses compagnons étaient terrassés par le sommeil. » Combien d’entre nous ont commencé à rêvasser ou même à tomber endormis à la messe ? Mais que se passe-t-il quand les apôtres sont endormis ? Un grand miracle : « Le visage [de Jésus] changea d’apparence et son vêtement devint d’un blanc éblouissant. Et voilà que deux hommes discutaient avec Lui, Moïse et Élie. »

Un grand miracle se produit également quand nous tombons endormis à la messe : Jésus apparaît sur l’autel, et avec Lui, pas uniquement Moïse et Élie mais toute la compagnie du Ciel : tous les anges et les saints, et Marie ! Et nous ne remarquons rien parce que nous nous nous sommes laissés distraire.

Heureusement pour les apôtres, ils se sont réveillés avant la fin de la Transfiguration. Donc Pierre ne dit pas : « On peut y aller maintenant ? » Mais plutôt : « Maître, il est bon que nous soyons ici. » Et il ne se débine pas, comme beaucoup le font à la fin de la messe mais il dit : « Laisse-nous monter trois tentes, une pour Toi, une pour Moïse, une pour Élie. » En d’autres termes, il ne veut pas partir !

Vous pourriez dire, eh bien, si Jésus apparaissait transfiguré, nous non plus ne serions pas ennuyés ni désireux de partir ! Mais le fait est qu’Il le fait ! Non pas transfiguré en gloire mais transfiguré en humilité sous les apparences du pain et du vin. Une apparence non pas glorieuse mais tout aussi stupéfiante et extraordinaire.

Et il y a plus encore. Même si seul Pierre parle, Jacques et Jean doivent également avoir été bouleversés. Ce qui nous rappelle que ce ne sont pas uniquement ceux qui parlent qui participent aux miracles du Tabor et de la messe.

Pensez particulièrement à comment tout cela a affecté le jeune saint Jean. Imaginez ce qu’il pensait seulement quelques semaines plus tard alors qu’il se trouvait sur un autre mont – le Mont Calvaire. Là, il a vu également Jésus avec deux hommes de chaque côté de Lui. Mais alors le Christ n’était pas transfiguré en gloire mais en souffrance. Et les deux qui l’entouraient n’étaient pas Moïse et Élie mais deux criminels.

Peut-être qu’au départ, il lui a semblé que le péché avait vaincu les promesses de la Loi et des prophètes, jusqu’à ce qu’il entende un voleur se repentir et Jésus lui dire : « aujourd’hui, tu seras avec moi dans le Paradis ». Et il a compris que l’amour de Jésus crucifié avait vaincu le péché.

Et peut-être qu’il se rappelait comment, au Tabor, « Moïse et Élie… parlaient de Son exode qu’Il allait accomplir à Jérusalem » et qu’il se remémorait ce jour particulier que les juifs commémorent , le début de l’exode de Moïse hors d’Égypte – la Pâque. Et comme il regardait le sang de Jésus teintant le bois de la Croix, il se rappelait comment, lors de la première Pâque, les Hébreux avaient été libérés par le sang de l’Agneau teintant le bois de leurs montants de portes ! Et il s’est souvenu que Jean-Baptiste avait appelé Jésus l’Agneau de Dieu.

A chaque messe, nous nous tenons avec les apôtres au Tabor et au Calvaire, alors que le Corps du Christ nous apparaît sous la forme du pain et du vin. Et nous regardons au-delà de ce que nous semblons voir. Et avec les yeux de la foi nous voyons ce qui est réellement présent : la gloire et la merveille de l’amour du Christ.

Qui pourrait encore penser que c’est un rituel vide ou qu’il ne nous inclut pas ? Qui pourrait être déçu, ennuyé ou même fâché ?

Alors, ce Carême, quand vous allez à la messe, gravissez la montagne avec Pierre, Jacques et Jean, Moïse et Élie, et avec Marie et tous les saints et anges du Ciel, pour prier avec le Christ. Et restez éveillé, laissez-vous prendre dans la crainte de la transfiguration sur l’autel, en reconnaissant dans que ce qui semble être du pain ordinaire la vraie gloire du Corps du Christ crucifié pour nos péchés. Et comprenez à quel point « il est bon que nous soyons ici ».