Halam Geldi ou La tragédie des mariages forcés - France Catholique
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Halam Geldi ou La tragédie des mariages forcés

Cinéma

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C’est un petit film que je souhaite défendre cette semaine, si insignifiant d’ailleurs pour les distributeurs qu’il ne passe que dans 3 salles en France. Pourquoi ces derniers ont–ils décidé de priver les spectateurs de ce film ? Cela pourrait en lui-même être le sujet de ce papier.

Halam Geldi – « ma tante arrive », une phrase lourde de sens – commence comme une comédie : dans les premières scènes, ce sont les couleurs chaudes et souriantes d’un petit village de Chypre , Akincilar, qui l’emportent. Les images, les dialogues rappellent l’irrésistible « Cochon de Gaza » et on plonge avec bonheur dans la vie de la petite communauté. Sauf que là aussi le sujet du film est grave : le 20 juillet 1974, la Turquie envahissait Chypre sous le prétexte de protéger ses ressortissants et occupait 1/3 du territoire ; à la suite de cette opération militaire, pour résister à l’assimilation grecque, des Turcs originaires de Turquie ont émigré à Akincilar et constitué une minorité qui tente au milieu des Chypriotes de conserver ses traditions. 3 enfants vont subir le poids terrible de la grande histoire, qui s’est déroulé bien avant leur venue au monde : Reyhan et Huriye fréquentent l’école. Elles savent que le jour où elles auront leurs règles, leurs parents les enlèveront de l’école pour les marier, selon la tradition, à un membre de la famille. Toutes les deux sont à l’âge si fragile qui sépare l’enfance de la jeunesse adulte et refusent de se plier à un destin qu’elles n’ont pas choisi.

« Ma tante arrive », c’est le code par lequel Huriye prévient Reyhan que les règles tant redoutées sont arrivées. Dès lors, petit à petit la tragédie se met en place : le cinéaste raconte la réalité du mariage forcé, c’est-à-dire le viol de jeunes filles organisées par leurs propres parents. Malgré quelques excès, le propos est d’autant plus percutant que le cinéaste se place du côté des enfants : comment ne pas être révolté du sort fait à ces toutes jeunes filles, chez qui on détruit en toute conscience à la fois l’innocence de l’enfance et leur avenir de femme. Quand le cinéma parvient à incarner l’histoire qui se déroule, il est au cœur de sa mission de miroir du monde et c’est pour cela qu’il est dommage qu’un tel film puisse passer aux oubliettes.