Des films bien noirs et un écrivain à découvrir - France Catholique

Des films bien noirs et un écrivain à découvrir

Des films bien noirs et un écrivain à découvrir

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Si le cinéma peut faire office de miroir du monde, force est de constater que les films sortis cette semaine n’en renvoient pas une image joyeuse ; et en particulier de celle notre humanité, qui n’en sort pas grandie ; de plus, cela ne se limite pas à la France, de qui tout le monde, et notamment les étrangers qui l’aiment, s’inquiète d’une déprime dont elle peine à sortir.

Dans les films hexagonaux, il y a d’abord celui de Catherine Breillat, Abus de Faiblesse, dans lequel la cinéaste raconte sa propre mésaventure : l’idée était intéressante ; comment en effet une femme malade peut-elle en arriver à se faire manipuler et dépouiller par un homme plus jeune ? Les fragilités psychologiques et affectives en sont -elles la source ?

L’entourage peut-il aussi porter une responsabilité ? Pourquoi d’ailleurs s’en mêlerait-il si c’est le choix d’une adulte saine d’esprit ? Or le film n’y apporte aucune réponse : Maud , jouée par une pourtant excellente Isabelle Huppert, s’entiche de Viko (Kool Shen) et on se demande bien pourquoi tout au long du film : Viko est vulgaire, terne, inculte et ne dégage aucun des charmes, qu’on attribuerait à ce type d’homme. Elle est cultivée, entourée et si son hémiplégie l’a considérablement affaiblie physiquement, elle a apparemment retrouvé toutes ses facultés mentales.

Certes Catherine Breillat a voulu tenir sa propre histoire à distance mais elle y réussit tellement bien qu’aucune émotion ne s’en dégage. On est même de plus en plus exaspéré par la capricieuse Maud dont on a vite perçu la superficialité mais on finit par se demander si elle n’est pas tout simplement idiote. Comme quoi naviguer dans les milieux culturels n’est pas gage de hauteur intellectuelle !

Aucune morale ne se dégage non plus, et là c’est moins étonnant car il est probable que les notions de bien et de mal soient étrangères à Catherine Breillat. Bref un film qui interroge encore une fois sur les choix des producteurs français, qui feraient mieux d’investir sur des talents inconnus.

Deux petits films venus l’un d’Angleterre, l’autre d’Argentine sont nettement meilleurs même s’ils sont aussi à déconseiller un soir de déprime : For Those in Peril conte la descente aux enfers d’Aaron, un jeune marginal, seul survivant du naufrage d’un bateau de pêche, où a péri son frère aîné chéri. Ecrasé par un sentiment de culpabilité, il est en plus mis à l’écart par les habitants de ce petit village d’Ecosse, qui recherchent un bouc émissaire.

Même la mère d’Aaron ne l’empêchera pas de sombrer dans la folie. Pour le coup l’émotion passe mais la vision des hommes est terrible.

Le dernier, Hipotesis, est un film noir venu d’Argentine : Un professeur de droit pénal acquiert la certitude qu’un de ses étudiants est l’auteur de l’horrible assassinat d’une jeune fille ; il mène sa propre enquête, à ses risque et périls. Le risque n’est pas tant là de devenir une nouvelle victime mais d’entrer dans un jeu pervers où c’est l’étudiant qui mène le jeu et le prend à son propre piège.

Ce sont les hommes et non pas l’enquête qui prime dans un film fin, qui ravira les amateurs du genre. Si là aussi, la noirceur est bien mise en évidence, l’histoire a au moins le mérite de poser des vraies questions et d’être admirablement jouée.

Pour ceux qui opteront pour la lecture, je ne peux que recommander le grand Eugénio Corti, si injustement méconnu en France, que son décès début février a été quasiment passé sous silence. Pour ceux qui connaissent Vassili Grossman avec Vie et destin et ses carnets de guerre, Eugénio Corti est l’équivalent italien. Son énorme roman, le Cheval rouge, est une fresque qui conte l’histoire de l’Italie, de la déclaration de guerre de juin 1940 jusqu’au référendum sur le divorce en 1974.

Comme Grossman, Corti s’inspire de sa vie et en particulier de son envoi comme jeune officier sur le front russe. Ses carnets de guerre sont également passionnants. Faut-il préciser qu’Eugénio Corti est un écrivain qui se revendiquait ouvertement catholique, ce qui explique clairement qu’il est toujours boudé par ceux qui font les modes intellectuelles et décident des écrivains qu’il faut lire.