De l’éternité, pas du temps - France Catholique
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L'amour du travail bien fait avec saint Joseph artisan
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De l’éternité, pas du temps

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Nativité avec les saints Laurent et François par le Caravage, 1609.

Nativité avec les saints Laurent et François par le Caravage, 1609.

Par sa naissance de la Vierge, Jésus-Christ est devenu opérationnel dans l’histoire humaine sans être soumis au mal qui s’y trouve. « Et le Verbe s’est fait chair, Et Il a demeuré parmi nous ; Et nous avons vu Sa gloire, Gloire qu’Il tient du Père comme Fils unique, Plein de grâce et de vérité. » (Jn 1, 14)

Bethléem est devenue un lien entre le ciel et la terre ; Dieu et l’homme se sont rencontrés là et se sont regardés face à face. Pour ce qui est de cette chair humaine, le Père l’a préparée, l’Esprit l’a formée et le Fils l’a assumée. Celui qui avait une génération éternelle dans le sein du Père a maintenant une génération temporelle dans le temps. Celui qui a vu le jour à Bethléem est né dans le cœur des hommes.

Car, à quoi cela servirait-il qu’il fût né mille fois à Bethléem, s’il n’était pas né à nouveau dans l’homme ? « Mais à tous ceux qui L’ont accueilli, Il a donné de pouvoir devenir enfants de Dieu. » (Jn 1, 12)

Maintenant, l’homme n’a plus besoin de se cacher de Dieu comme le fit Adam ; car il peut être vu à travers la nature humaine du Christ. Le Christ n’a pas acquis une perfection de plus en devenant homme, et il n’a rien perdu de ce qu’il possédait en tant que Dieu. Il y avait la toute-puissance de Dieu dans le mouvement de Son bras, l’amour infini de Dieu dans les battements de Son cœur humain et la compassion non mesurée de Dieu envers les pécheurs à Ses yeux.

Dieu est maintenant manifesté dans la chair ; c’est ce qu’on appelle l’Incarnation. Toute la gamme des attributs divins de puissance et de bonté, de justice, d’amour, de beauté, est en Lui. Et lorsque Notre divin Seigneur a agi et a parlé, Dieu, dans Sa nature parfaite, s’est manifesté à ceux qui l’ont vu, l’ont entendu et l’ont touché. Comme Il l’a dit plus tard à Philippe : « Celui qui m’a vu a vu le Père. » (Jn 14, 9)

Aucun homme ne peut rien aimer à moins qu’il ne puisse passer ses bras autour, et le cosmos est trop grand et trop volumineux. Mais depuis que Dieu est devenu un bébé, a été enveloppé dans des langes et mis dans une mangeoire, les hommes peuvent dire : « C’est Emmanuel, c’est Dieu avec nous. » En se baissant vers la nature humaine fragile et en l’élevant à la prérogative incomparable de l’union avec Lui-même, la nature humaine est devenue digne.

Cette union est si réelle que tous Ses actes et paroles, toutes Ses angoisses et Ses larmes, toutes Ses pensées et Ses raisonnements, Ses résolutions et Ses émotions, tout en étant bien humains, sont en même temps les actes et les paroles, les angoisses et les larmes, pensées et raisonnements, résolutions et émotions du Fils éternel de Dieu.

Ce que les hommes appellent l’Incarnation n’est que l’union de deux natures, le Divin et l’humain en une seule Personne qui gouverne les deux. Ce n’est pas difficile à comprendre ; car qu’est-ce que l’homme sinon un échantillon, à un niveau incommensurablement inférieur, d’une union de deux substances totalement différentes, l’une matérielle et l’autre immatérielle, l’une le corps, l’autre l’âme, sous la régence d’une seule personnalité humaine ?

Quoi de plus éloignés les uns des autres que les pouvoirs et les capacités de la chair et de l’esprit ? Antécédent à leur unité, combien il serait difficile de concevoir un moment où le corps et l’âme seraient unis en une seule personnalité. Qu’ils soient si unis est une expérience claire pour chaque mortel. Et pourtant c’est une expérience sur laquelle l’homme ne s’émerveille pas à cause de sa familiarité.

Dieu, qui rassemble le corps et l’âme en une seule personnalité humaine, malgré leur différence de nature, peut certainement provoquer l’union d’un corps humain et d’une âme humaine avec Sa divinité sous le contrôle de Sa personne éternelle. C’est ce que l’on entend par « Et le Verbe s’est fait chair, Et Il a demeuré parmi nous. » (Jn 1,14). La Personne qui a assumé la nature humaine n’a pas été créée, comme c’est le cas pour toutes les autres personnes. Sa Personne est le Verbe ou Logos préexistant.

Sa nature humaine, d’autre part, est dérivée de la conception miraculeuse en Marie, dans laquelle l’ombrage divin de l’Esprit et le « Fiat » humain ou le consentement d’une femme, sont le plus admirablement mélangés. C’est le début d’une nouvelle humanité hors du matériau de la race déchue.

Lorsque le Verbe s’est fait chair, cela n’a signifié aucun changement dans le Verbe divin. Le Verbe de Dieu qui se projetait n’a pas quitté le côté du Père. Ce qui s’est passé n’est pas tant la conversion de la Divinité en chair, que la prise d’une humanité en Dieu. Il y a une continuité avec la race déchue de l’homme à travers l’humanité prise à Marie ; il y a discontinuité par le fait que la Personne du Christ est le Logos préexistant.

Le Christ devient ainsi littéralement le deuxième Adam, l’homme par lequel la race humaine recommence. Son enseignement fut centré sur l’incorporation de la nature humaine en Lui, après la manière dont la nature humaine qu’Il a prise à Marie fut unie au Verbe éternel.

Il est difficile pour un être humain de comprendre l’humilité qui fut impliquée dans le Verbe prenant chair. Imaginez, si c’est possible, une personne humaine se dépouillant de son corps, puis envoyant son âme dans le corps d’un serpent. Une double humiliation s’ensuivrait : d’abord, en acceptant les limites d’un organisme reptilien, en sachant en permanence que son esprit est supérieur, et que les crocs ne peuvent pas articuler correctement des pensées qu’aucun serpent n’a jamais possédées. La deuxième humiliation serait d’être forcé, à la suite de ce « vidage de soi-même », de vivre dans la compagnie des serpents.

Mais tout cela n’est rien comparé au « vidage » de Dieu, par lequel Il a pris la forme de l’homme et a accepté les limites de l’humanité, telles que la faim et la persécution ; il n’était pas banal non plus pour la Sagesse de Dieu de Se condamner à s’associer à de pauvres pêcheurs qui savaient si peu de choses.

Mais cette humiliation, qui a commencé à Bethléem quand il a été conçu dans la Vierge Marie, n’était que la première parmi tant d’autres pour contrecarrer l’orgueil de l’homme, jusqu’à l’humiliation finale de la mort sur la croix. S’il n’y avait pas de croix, il n’y aurait pas eu de crèche ; s’il n’y avait pas eu de clous, il n’y aurait pas eu de paille.

Mais il ne pouvait pas enseigner la leçon de la croix comme paiement pour le péché ; Il devait la prendre. Dieu le Père n’a pas épargné Son Fils – tant Il a aimé l’humanité. C’était le secret enveloppé dans les langes.

Le nom « Jésus » était assez courant chez les Juifs. Dans l’hébreu original, c’était « Josué ». L’ange a dit à Joseph que Marie « [portait] un fils que tu appelleras Jésus, car Il sauvera son peuple de ses péchés. » (Mt. 1, 21) Cette première indication de la nature de sa mission sur terre ne mentionne pas son enseignement ; car l’enseignement serait inefficace, s’il n’y avait pas d’abord le salut.

On lui a donné un autre nom en même temps, le nom « Emmanuel ». « Voici que la vierge sera mère, et elle enfantera un fils, et on l’appellera Emmanuel (ce qui signifie Dieu avec nous) ». (Mt. 1, 23) Ce nom est tiré de la prophétie d’Isaïe et il assure de quelque chose en plus, d’une présence divine ; ajouté au nom « Jésus », cela signifie une présence divine qui délivre et qui sauve.

L’ange dit aussi à Marie : « Voici que tu vas concevoir, et tu enfanteras un fils, que tu appelleras Jésus. Il sera grand, et on l’appellera le Fils du Très-Haut ; le Seigneur Dieu Lui donnera le trône de David, Son père, et Il régnera éternellement sur la maison de Jacob ; Son royaume n’aura jamais de fin. » (Lc 1, 31–33)

Le titre de « Fils du Très-Haut » est celui-là même qui fut donné au Rédempteur par le mauvais esprit qui possédait le jeune dans le pays des Géraséniens. L’ange déchu Lui confesse qu’Il est ce que l’ange déchu dit qu’il est : « Pourquoi me tourmentes-tu, Jésus, Fils du Dieu Très-Haut ? » (Marc 5: 7)

Le salut promis par le nom « Jésus » n’est pas un salut social, mais plutôt spirituel. Il ne sauvera pas nécessairement les gens de leur pauvreté, mais il les sauvera de leurs péchés. Détruire le péché, c’est déraciner les causes premières de la pauvreté.

Le nom « Jésus » rappelle la mémoire de leur grand chef, qui les avait fait sortir d’Égypte pour se reposer dans la terre promise. Le fait qu’Il fut préfiguré par Josué indique qu’Il a les qualités militaires nécessaires à la victoire finale sur le mal, qui proviendra de l’acceptation heureuse de la souffrance, du courage indéfectible, de la détermination de la volonté et de la dévotion inébranlable au mandat du Père.

Le peuple asservi sous le joug romain cherchait la délivrance ; par conséquent, il pensait que tout accomplissement prophétique de l’ancien Josué aurait quelque chose à voir avec la politique. Plus tard, le peuple lui demandera quand Il va les délivrer du pouvoir de César. Mais là, au tout début de sa vie, le divin soldat affirme par un ange qu’Il est venu pour vaincre un ennemi plus grand que César.

Ils doivent encore rendre à César les choses qui appartiennent à César ; Sa mission consiste à les délivrer d’une servitude bien plus grande, à savoir celle du péché. Tout au long de sa vie, les gens continueront de matérialiser le concept de salut, pensant que la délivrance ne devait être interprétée qu’en termes politiques. Le nom « Jésus » ou Sauveur ne Lui a pas été donné après qu’Il eut opéré le salut, mais au moment même où Il a été conçu dans le sein de sa mère. Le fondement de Son salut est de toute éternité et non du temps.