Cellules-souches: la vérité ? - France Catholique
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Cellules-souches: la vérité ?

Traduit par Pierre

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La presse a récemment cité des recherches du Centre anti-cancéreux « Sloan Kettering » de New York, montrant comment des cellules-souches issues d’embryons humains peuvent apporter une amélioration à la maladie de Parkinson chez des souris.

De telles nouvelles évoquent les images de Jean-Paul II et de nombreuses autres victimes de cette maladie dévastatrice : mouvements incontrôlés des mains, marche difficile, ou, pire, paralysie des muscles du visage — suppression du sourire ou de toute autre expression normale.

Vers la fin, les muscles ne peuvent plus soutenir le corps, le lent cheminement s’étire vers la mort. Pour beaucoup la pensée de connaissances ou d’amis touchés par la maladie est une blessure encore ouverte, nous rappelant notre impuissance quand un être cher est en train de s’éteindre.

Ainsi l’annonce d’une possibilité de traitement nous fait espérer que la maladie de Parkinson et autres maladies neurologiques n’existeront plus que dans les livres d’Histoire de la médecine. Et des espoirs analogues s’éveillent périodiquement dans la lutte contre le cancer.

En tant que médecin, j’espère chaque jour une réponse aux attentes de nos malades.

En tant que chercheur, je ressens un frémissement, bien que de nombreux détails soient encore à éclaircir.

Mais en tant qu’homme, père de famille, j’ai des questions à poser.

J’ai trois enfants, et je voudrais tant pouvoir les protéger à chaque instant. Je suis émerveillé en voyant comment ils grandissent. Ils donnent tellement plus que ce que j’avais imaginé ou prédit.

J’ai eu aussi une fille, qui n’a vécu que quarante jours. Elle était née entourée de tous les espoirs de parents, de rêves, de projets. Mais par une défaillance de son système génétique, elle a pris trop tôt le chemin du Paradis. Et pourtant elle nous a donné une importante leçon. Sa vie, tout comme la vie des enfants bien portants, ne nous appartient pas comme on pourrait souvent le penser.

Les espoirs que nous mettons en nos enfants n’auraient aucun sens si la vie et la mort n’étaient inséparables. Nos enfants signifient bien plus que nous pouvons imaginer. Nous les aimons et nous consacrons notre vie à les aider dès le départ et partout où nous en aurons la possibilité.

Alors, comment pourrais-je me servir des premiers instants d’une existence humaine — un embryon qu’en tant que scientifique je ne vois guère différent de mes adorables enfants, ou de notre petit ange parti si tôt — pour soigner quelqu’un d’autre ? Impensable.

Ceci me rappelle les légendes figurant dans les livres d’Histoire de la médecine (on n’a aucune preuve là-dessus), où des petits enfants étaient saignés pour donner à boire leur sang aux puissants de ce monde, croyant pouvoir leur transmettre santé, joie, jeunesse. Même efficace, un tel traitement n’aurait pas été humain.

Des gens s’imaginent qu’on peut se livrer à une telle pratique parce qu’un point obscur empêche de voir comment l’assemblage de quelques cellules embryonnaires pourra devenir en quelques mois le visage mal formé vu à l’échographie, et qui au premier regard fera jaillir des larmes de joie. Mais même si mon cœur, mon esprit, ne peuvent l’identifier comme étant mon enfant, ai-je le droit de me servir de ça, de cet être, pour sauver ou soigner une autre personne ?

Les tenants de l’utilisation d’embryons pour le progrès médical rejettent les considérations religieuses et fondent leurs efforts sur un désir rationnel et sincère d’aider les malades. Mais ce raisonnement ne tient qu’à cause d’un certain point obscur. Des études plus approfondies dans le domaine du génome pourraient prochainement montrer des changements dans l’ADN des gènes strictement affectés au développement cérébral, dans cet assemblage apparemment informel de cellules embryonnaires quelques jours après la conception. Une telle découverte effacerait-elle ce point obscur ?

Et en fin de compte, ce point obscur est-il si important ? Nous aimons tant nos enfants, parents, épouses malades que nous donnerions nos vies pour eux. Utiliser un embryon ne devrait pas poser de problème, si ça marche. La question n’est pas de détecter le point invisible qui serait la limite entre un embryon utilisable et un bébé très prématuré.

L’affaire semble honnête même si quelqu’un défend les droits de cet embryon. Et si on l’accepte, alors on a un nouveau traitement appelé embryon — puis fœtus. Ne soyons pas hypocrites et annonçons notre intention d’en faire usage à n’importe quel stade. Pourquoi pas ?

Je reviens à ma petite fille qui n’a passé que quarante jours ici-bas. Elle nous montre que nous ne commandons pas, et que son départ prématuré ne signifie pas la tristesse pour nous (ni, certainement, pour elle), mais une compréhension plus profonde de la valeur de toute vie.

J’apprécie ce que je possède et, plus que tout, mes enfants bien portants. Mais la seule façon de concilier mes fonctions de médecin, de chercheur, et d’homme, est de considérer la dignité de tout homme comme celle de mes propres enfants. Nous valons bien plus que les dons — physiques, intellectuels, sociaux — reçus. Et tout embryon humain, quel que soit le stade de son développement, a droit à la considération de sa dignité.

Cette dignité, je le concède, me paraît plus évidente parce que je suis chrétien. Un illustre prêtre (Luigi Giussani) a dit un jour: « le Christ est tout en chacun ». Ce qui élimine tous les points obscurs de la science et propose une dignité universelle de l’homme avant comme après tout raisonnement.
Faut-il pour autant éliminer la recherche sur les cellules-souches? Certes pas. D’autres voies que les cellules-souches embryonnaires, telles les cellules-souches adultes totipotentes, offrent des perspectives encourageantes — et moralement acceptables. Le Vatican lui-même vient de conclure des accords avec une petite société de bio-technique — NeoStem, Inc. — pour soutenir le développement de nouvelles thérapies faisant appel à des cellules-souches adultes.

Le langage employé à ce sujet dans le débat public est plutôt déroutant. Il ne s’agit pas de défendre ou non la vie, mais de définir sagement et avec réalisme tout ce qui touche à la dignité humaine.


Gravure : Dante et Béatrice contemplent le Ciel – Gustave Doré

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Source : http://www.thecatholicthing.org/