Benoît XVI fête les 5 ans de son accession au pontificat - France Catholique
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Van Eyxk, l'art de la dévotion
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Benoît XVI fête les 5 ans de son accession au pontificat

Depuis le 16 avril, les anniversaires du pape Benoît XVI se sont succédé : le 16 avril, ses 83 ans, le 19 avril 2005, son élection, son intronisation, le 24 avril 2005, et puis le 27 avril 2005, Benoît XVI présidait, place Saint-Pierre, sa première audience générale… Le pontificat fête DONC son premier « lustre » : Benoît XVI a révélé en cinq ans le visage aimable d’un pape qui écoute beaucoup et qui remercie, qui enseigne et tranche, un décideur dont la communication innove un style inhabituel. Celui de « l’amitié », où perce quelque chose de saint Augustin.
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Les anniversaires ont entouré un voyage revigorant : Malte ! Il l’a confié lors de l’audience « bilan » à son retour (le mercredi 21 avril 2010) : « Cela a été pour moi un motif de joie, et également de réconfort de sentir la chaleur particulière de ce peuple qui donne le sentiment d’une grande famille, rassemblée par la foi et par la vision chrétienne de la vie ». On estime que la moitié de la population de l’archipel – quelque 400.000 habitants – est venue à sa rencontre en 26 heures.

Comme un prolongement de l’Année Saint-Paul le pape s’est d’abord recueilli à la grotte de l’apôtre. Il a rappelé l’enracinement de l’archipel dans l’Evangile depuis de naufrage providentiel d’il y a 1950 ans. Puis il a plaidé pour les immigrés naufragés de Méditerranée. Il a rencontré des victimes d’agressions sexuelles de la part de membres du clergé : il a été bouleversé, eux aussi. L’un d’eux, toute colère déposée, a dit avoir trouvé la paix et retrouvé la foi.

Amour et réconciliation

Le pape l’a expliqué aux jeunes : « le dessein d’amour de Dieu est plus grand encore que les tempêtes et les naufrages ». En bateau, il est allé  à leur rencontre et il les a incités à recueillir l’héritage de Paul « pour affronter les défis qui se présentent ». Il a confirmé Malte dans sa vocation « chrétienne », comme le dit « la célèbre croix de Malte », qui est « un signe d’amour et de réconciliation », et « cette vocation devrait être celle de tous les peuples qui adhèrent au message du Christ ».

Revenons à nos anniversaires. Le laxisme dont on a injustement accusé récemment l’ancien préfet de la congrégation pour la Doctrine de la foi n’a pas un moment effleuré les media de l’époque : oui, il y avait finalement quelque chose de vrai dans ces allusions irrévérencieuses à la ville de Rottweil ou aux Panzer. Le cardinal Ratzinger s’est montré sévère contre le péché. Il a rouvert les dossiers de pédophilie clos par faiblesse ou incompétence : la compétence est passée à lui, par volonté de Jean-Paul II. Il a fait œuvre de vérité.

De là cette réputation de sé-vérité qu’avait le « simple et humble travailleur dans la vigne du Seigneur ». Celui qui se qualifiait « d’insuffisant » alors qu’il est un des esprits les plus extraordinaires de ce siècle (ses trois encycliques sont des succès de librairie, son dialogue de « raison » interpelle), demandait l’aide des catholiques et de la Vierge Marie à sa première bénédiction Urbi et Orbi le 19 avril 2005.

Confidences à des amis

Un nouveau visage est apparu, fait de réserve souriante, mais pas sans spontanéité. C’est normal : pour les Allemands, un Bavarois, c’est un « méridional » et son intonation le trahit ! Et il a tout de suite fui le culte de la personnalité : jamais il ne « prolonge » à plaisir les ovations.

Lors de l’audience à ses compatriotes, le 25 avril 2005, que fait le pape ? Il s’excuse très aimablement du retard – explique la raison comme à des amis – et dévoile son état d’esprit pendant le conclave au fur et à mesure des votes. Le style est novateur : un ton très personnel et direct, concret, non sans points communs avec les « Confessions » d’Augustin, crée la communion. Le directeur de L’Osservatore Romano, Giovanni Maria Vian estime que le pape Benoît XVI est « un grand communicateur ». On le retrouve dans ses lettres, notamment aux Irlandais.

Le retard était dû à un geste significatif des priorités du pontificat: « Nous avons eu une rencontre oecuménique importante avec les représentants de l’oecuménisme du monde entier, de toutes les Eglises et communautés ecclésiales, et avec les représentants des autres religions. Ce fut une rencontre très cordiale, c’est pourquoi elle a duré plus longtemps. Mais à présent, je peux vous dire finalement: je vous souhaite une cordiale bienvenue! »

Ne me fais pas cela !

Puis il remercie : « Je vous remercie de tout coeur pour les voeux, les paroles, et les signes d’affection et d’amitié qui me sont parvenus de façon impressionnante de toutes les régions d’Allemagne ».

Il confie son dialogue avec son Dieu: « Lorsque que la tournure que prenait le vote m’a progressivement fait comprendre que, pour ainsi dire, le couperet allait tomber sur ma tête, j’ai commencé à avoir le vertige. J’étais convaincu d’avoir accompli le travail de toute une vie, et que je pouvais espérer finir mes jours dans la tranquillité. Avec une profonde conviction, j’ai dit au Seigneur: Ne me fais pas cela! Tu disposes de personnes plus jeunes et plus adaptées, qui peuvent affronter ce grand devoir avec bien plus d’élan et de force ».

Et, coup de théâtre: « Puis, j’ai été très ému par une brève lettre, écrite par l’un de mes confrères du Collège cardinalice. Il me rappelait qu’à l’occasion de la Messe pour Jean-Paul II, j’avais centré mon homélie, en partant de l’Evangile, sur les paroles que le Seigneur adressa à Pierre au bord du Lac de Tibériade: Suis-moi! J’avais expliqué que Karol Wojtyla reçut toujours à nouveau cet appel du Seigneur, et qu’il dut toujours à nouveau renoncer à beaucoup de choses et simplement dire: oui, je te suis, même si tu me conduis là où je n’aurais pas voulu aller. Mon confrère m’a écrit: Si le Seigneur devait te dire à présent: « Suis-moi », alors rappelle-toi de ce que tu as prêché. Ne te refuse pas! Sois obéissant, comme tu as décrit le grand Pape, qui est retourné à la maison du Père ».

La résistance est vaincue : « Cela m’a profondément touché. Les voies du Seigneur ne sont pas toujours faciles, mais nous n’avons pas été créés pour la facilité, mais pour les choses grandes, pour le bien. Ainsi, à la fin, je n’ai pas pu faire autrement que dire oui. Je compte sur le Seigneur, et je compte sur vous, chers amis. Un chrétien n’est jamais seul ». La confidence est aussi transmission d’une expérience, d’un enseignement, paternité spirituelle.

Inquiétude intérieure

Puis, premier rendez-vous « ordinaire » d’un pape qui ne l’est pas du tout : que dit-il aux pèlerins du monde présents deux jours plus tard place Saint-Pierre pour rencontrer le « nouveau pape » allemand ? (Saine démarche que de vouloir aller « au contact »)

Il livre, avec pudeur, son expérience de foi, d’espérance, d’amour: «  Je fais l’expérience dans mon âme de sentiments contrastants entre eux en ces jours de début de mon ministère pétrinien: émerveillement et gratitude à l’égard de Dieu, qui m’a surpris le premier en m’appelant à succéder à l’Apôtre Pierre; inquiétude intérieure face à l’immensité de la tâche et des responsabilités qui m’ont été confiées. La certitude de l’aide de Dieu, de sa Très Sainte Mère, la Vierge Marie et des saints Protecteurs, me donne cependant sérénité et joie; je suis également soutenu par la proximité spirituelle de tout le Peuple de Dieu auquel, comme j’ai eu l’occasion de le répéter dimanche dernier, je continue à demander de m’accompagner par une prière incessante ».

Le troisième « Benoît »

Il leur explique le choix du nom : « J’ai voulu m’appeler Benoît XVI pour me rattacher en esprit au vénéré Pontife Benoît XV, qui a guidé l’Eglise au cours d’une période difficile en raison du premier conflit mondial. Il fut un courageux et authentique prophète de paix et se prodigua avec un courage inlassable, tout d’abord pour éviter le drame de la guerre, puis pour en limiter les conséquences néfastes. C’est sur ses traces que je désire placer mon ministère au service de la réconciliation et de l’harmonie entre les hommes et les peuples, profondément convaincu que le grand bien de la paix est tout d’abord un don de Dieu, un don malheureusement fragile et précieux qu’il faut invoquer, protéger et édifier jour après jour avec la contribution de tous ».

Et puis, l’autre Benoît. Le cardinal Ratzinger était à Subiaco le 1er avril 2005, la veille du départ de Jean-Paul II, pour recevoir le Prix Saint-Benoît « pour la promotion de la vie et de la famille en Europe » : « Le nom de Benoît évoque, en outre, la figure extraordinaire du grand « Patriarche du monachisme occidental », saint Benoît de Nursie, co-patron de l’Europe avec les saints Cyrille et Méthode et les saintes femmes Brigitte de Suède, Catherine de Sienne et Edith Stein. L’expansion progressive de l’Ordre bénédictin qu’il fonda a exercé une profonde influence dans la diffusion du christianisme sur tout le continent. Saint Benoît est donc particulièrement vénéré en Allemagne, également et spécialement en Bavière, ma terre d’origine; il constitue un point de référence fondamental pour l’unité de l’Europe et un rappel puissant des incontournables racines chrétiennes de sa culture et de sa civilisation ».

Il livre une clef de sa vie: « De ce Père du monachisme occidental, nous connaissons la recommandation laissée aux moines dans sa Règle: « Ne rien mettre absolument au-dessus du Christ » (Règle 72, 11; cf. 4, 21). Au début de mon service comme Successeur de Pierre, je demande à saint Benoît de nous aider à garder fermement le Christ au centre de notre vie. Qu’il soit toujours à la première place dans nos pensées et dans chacune de nos activités! »

Mon vénéré prédécesseur

Tous pensent encore à Jean-Paul II. Lui aussi. Il cite « Novo millennio ineunte » et il interprète l’héritage spirituel de Jean-Paul II pour notre temps en commençant par là: « Nos communautés chrétiennes doivent devenir d’authentiques « écoles » de prière, où la rencontre avec le Christ ne s’exprime pas seulement en demande d’aide, mais aussi en action de grâce, louange, adoration, contemplation, écoute, affection ardente, jusqu’à une vraie « folie » du coeur » (n. 33), comme ce fut le cas chez le Pape Jean-Paul II ». Il annonce qu’il mettra ses pas dans ceux de son « vénéré prédécesseur ».

Il conclut : « Chers amis – c’est définitivement en amis qu’il traite ses visiteurs – , je vous remercie à nouveau de votre visite et de l’affection dont vous m’entourez. En retour, je vous adresse cordialement ces mêmes sentiments avec une Bénédiction spéciale, que je donne à vous qui êtes ici présents, à vos familles et à toutes les personnes qui vous sont chères ».

Un événement a marqué ces anniversaires: le cardinal slovaque Tomas Spidlik sj s’est éteint le 16 avril. Cette vie offerte en ce jour précis semble porter une signification profonde, comme un don pour le pontificat. Benoît XVI lui a rendu un long et bel hommage soulignant que celui que Jean-Paul II avait invité à prêcher la retraite au Vatican en 1995 a aidé l’Eglise à respirer « avec ses deux poumons ». Il a peut-être communiqué aussi quelque chose de lui-même en disant du cardinal Spidlik: « En dépit de son âge avancé (…) son esprit restait frais et jeune. Qu’est-ce sinon l’amitié du Seigneur ressuscité ? »

NB