« Il faut expliquer aux catéchumènes qu'une fois baptisés, il leur faudra persévérer  » - France Catholique
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Catéchumènes : baptisés… et après ?
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« Il faut expliquer aux catéchumènes qu’une fois baptisés, il leur faudra persévérer  »

De plus en plus de jeunes reçoivent le baptême à l’âge adulte mais beaucoup ne persévèrent pas dans la vie chrétienne. Pour réfléchir à ce problème qui préoccupe les cœurs des pasteurs, deux événements sont prévus : une grande consultation par les évêques d’Île-de-France, en 2026-2027. Et un colloque, pour les prêtres de toute la France, à Nanterre, les 24 et 25 novembre. L’abbé Henri Vallançon en est l’un des organisateurs.
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Baptême d’une « demoiselle de France » à la Maison d’éducation de la Légion d’honneur. © Toussaint Roze

Quel est l’objectif de ce colloque pour les prêtres ?

Abbé Henri Vallançon : Nous sommes partis d’un double constat : l’affluence majeure de jeunes demandant le baptême et le manque de persévérance de beaucoup d’entre eux, qui ne reviennent plus à l’église après. Nous sommes convaincus qu’il faut relier la réflexion théologique à la pastorale pour résoudre les difficultés de la vie de l’Église.

Ce manque de persévérance est-il un problème de génération ?

Nous voulons aller contre cette idée-là, qui ne doit pas être vécue comme une fatalité. Il faut réfléchir à ce qui, dans nos pratiques de catéchuménat, conduit à cet abandon. Une bonne pédagogie crée le climat de la persévérance.

Quelle serait la principale erreur à éviter ?

Le catéchuménat ne doit pas être présenté, ni vécu, comme une préparation au baptême : il ne faut pas focaliser les catéchumènes sur la préparation de ce sacrement, comme un moment extraordinaire, majeur, qui va leur laisser une émotion à vie. C’est une grave erreur. Une « pédagogie du temps fort », qui serait basée sur des moments émotionnellement intenses, les prépare à une grande désillusion après le baptême et prépare donc leur désaffection… Ce n’est pas la pédagogie de l’Évangile. Ce sacrement n’est qu’un moyen vers le Salut. Il faut donc, à mon sens, orienter la pastorale sur la préparation à la vie chrétienne en vue de la Vie éternelle. En rappelant que cela implique de vivre en état de grâce, c’est-à-dire selon la loi de Dieu, en connaissant et professant la foi de l’Église et en rejetant le péché mortel, pour vivre dans l’alliance avec Dieu et se préparer ainsi, dès maintenant, à la vie du Ciel.

Faut-il pour cela insister sur la formation doctrinale ?

Oui, sinon la vie chrétienne est seulement une expérience et des sentiments : ils ne sont pas mauvais en soi, mais ils sont volatils. Rappeler l’importance de la doctrine ne dévalorise pas l’expérience mais permet d’aider les convertis à s’ancrer plus profondément dans le Christ, qui nous a dit de baptiser toutes les nations et d’enseigner ce qu’il a prescrit. Pour cela, il faut unifier doctrine et pastorale. Cela implique, d’une part, de bien les accueillir et de leur apprendre comment vivre en chrétien : charité, vie fraternelle, vie de prière… Et d’autre part de nourrir leur intelligence par un enseignement solide – donné en grand groupe – sur le contenu de la doctrine et de la morale. Sinon, la transmission est bancale. Enfin, il est essentiel, encore une fois, d’orienter tout cet accompagnement dans la perspective des fins dernières, qui sont l’enjeu principal : être baptisé ne sert qu’à être sauvé, nous ne devons pas l’oublier !

Comment mieux les préparer à la vie après le baptême ?

Justement en ne mettant pas trop l’accent sur le sacrement lui-même et sur la vie communautaire. Sinon, nous les trompons sur la réalité de la vie chrétienne. Au cours du colloque, un Carme va faire un enseignement sur l’expérience des maîtres du Carmel : ceux-ci préviennent qu’il ne faut pas tout miser sur l’expérience sensible car la vie spirituelle passe forcément par des états de sécheresse. Il faut préparer les convertis à traverser cet état comme étant normal. La vraie vie mystique est dans cette vie ordinaire du chrétien vécue dans la fidélité, ancrée dans la prière, en recevant régulièrement les sacrements et en vivant les commandements laissés par le Christ. Il faut leur parler de la nécessité de la persévérance et du danger de la défection.

Comment les orienter davantage vers la question du Salut ?

En donnant une place plus importante, dans le catéchuménat, à la pénitence pour les fautes passées : le baptême, c’est mourir au péché et ressusciter dans le Christ. Ce moment du repentir est souvent sous-estimé : il faut inviter les catéchumènes à faire une relecture de leur vie pour regretter leurs fautes passées, avant de recevoir le pardon de leurs péchés dans le baptême. Le Christ nous sauve de tout le mal que nous avons fait, si nous le regrettons. Au lieu de parler de « préparation au baptême », il faudrait appeler le catéchuménat la « préparation à la vie chrétienne », finalisée par la Vie éternelle.

Faut-il les préparer aussi à la vie dans le monde ?

Oui, il faut les avertir qu’ils vivent dans une société qui fait obstacle à la foi : le diable, bien sûr, le relativisme, l’individualisme, l’hédonisme… et leur apprendre à vivre leur vie de manière pleinement chrétienne, notamment sur le plan moral. Il y en a notamment beaucoup qui vivent en couple, sans être mariés, donc de manière objectivement contraire à la loi du Christ. Il faut faire en sorte que leur mariage soit célébré juste après le baptême – dans les jours qui suivent – pour leur permettre de vivre réellement en chrétiens, dans la vie de la grâce. Ou sinon leur proposer de différer le baptême, en attendant qu’ils décident de vivre réellement dans l’alliance avec Dieu, en disciples du Christ. Ne bradons pas les exigences du Christ… Le baptême n’est pas juste un petit plus : la vie du nouveau baptisé doit changer !

Concernant les néophytes, déjà baptisés, quel accompagnement préconisez-vous ?

Je pense qu’il faut justement avant tout les aider à construire une relation profonde avec Dieu, sans mettre trop l’accent sur la communauté chrétienne. C’est surtout leur lien au Christ qui va les pousser à s’intégrer dans la paroisse et leur permettre d’accepter aussi ce qui sera décevant dans la vie communautaire.