À treize kilomètres à vol d’oiseau de la mer Morte, au sud-ouest d’Amman, le mont Nébo est sans nul doute l’un des lieux saints les plus poignants de Jordanie. Culminant à 800 mètres d’altitude, il permet au pèlerin de se placer dans le regard de Moïse et de voir, à sa suite, la Terre promise : « Galaad jusqu’à Dane, tout Nephtali, le pays d’Éphraïm et de Manassé, tout le pays de Juda jusqu’à la Méditerranée, le Néguev, la région du Jourdain, la vallée de Jéricho ville des Palmiers, jusqu’à Soar » (Dt 34, 1-3). La vue époustouflante, qui couvre aujourd’hui la Cisjordanie occupée, laisse un goût doux-amer pour qui se souvient de la sentence qui frappe Moïse, parvenu au terme de quarante ans d’errance dans le désert : « “Ce pays que tu vois, [dit le Seigneur], j’ai juré à Abraham, à Isaac et à Jacob de le donner à leur descendance. Je te le fais voir, mais tu n’y entreras pas.” Moïse, le serviteur du Seigneur, mourut là, au pays de Moab, selon la parole du Seigneur » (4-5). Admirablement conservé par les franciscains de la Custodie de Terre sainte, le mont Nébo abrite une église dite du mémorial de Moïse, datant du Ve siècle et redécouverte dans les années 1930 par des religieux de l’ordre.
Le baptême du Christ
L’autre figure biblique incontournable de Jordanie est sans nul doute Jean le Baptiste. Sur la rive est du Jourdain, à la frontière palestinienne, le site de Béthanie-au-delà-du-Jourdain est présentée par la Jordanie comme le lieu authentique du baptême du Christ. Jean-Paul II, Benoît XVI et François sont venus rappeler l’affection toute particulière de l’Église pour ce lieu placé sous la protection de la dynastie hachémite et redécouvert à la suite du traité de paix israélo-jordanien de 1994. La chaleur est vite étouffante dans cette région qui est la plus basse de la planète : 384 mètres sous le niveau de la mer. L’occasion pour le pèlerin d’expérimenter de façon sensible l’un des articles du Credo, « Il descendit du Ciel », en comprenant que c’est au plus « bas » que débute la vie publique du Christ, lors de son baptême. Se tenir à l’endroit de cet événement est une expérience bouleversante. De l’eau du Jourdain, le regard part naturellement vers le Ciel : « Voici que les cieux s’ouvrirent : il vit l’Esprit de Dieu descendre comme une colombe et venir sur lui. Et des cieux, une voix disait : “Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui je trouve ma joie” » (Mt 3, 16-17).
Pèlerin avec Jean-Baptiste
Qui voudra suivre l’itinéraire de saint Jean-Baptiste devra remonter de 1 100 mètres pour atteindre le Machéronte, situé à 30 kilomètres au sud, surplombant la mer Morte. Le dépouillement du site est total. À moins d’être prévenu, impossible de saisir l’importance du lieu dans la vie du Précurseur. Entouré de monts arides, le Machéronte exige une montée ardue jusqu’au sommet, couronné de ruines dans lesquelles il est possible de se promener librement. Derrière les pierres se cache une terre de martyre : c’est en ces lieux qu’Hérode Antipas, succombant à la danse de Salomé, lui promit « la tête de Jean, celui qui baptise » (Mc 6, 24). En ce palais, pour une danse, saint Jean-Baptiste, qui resta fidèle à la vérité en refusant qu’Hérode prenne pour épouse la femme de son frère, fut décapité avant que ses disciples ne « [viennent] prendre son corps et le [déposent] dans un tombeau » (29).
Sous réserve de préparer son voyage et de s’assurer un solide accompagnement spirituel, visiter les lieux saints de Jordanie est un préambule idéal à un pèlerinage plus à l’ouest de la Terre sainte, vers la ville où toute l’histoire du Salut converge : Jérusalem.