Notre culture d’Américains nous pousse à laïciser, à réduire l’aspect religieux, en particulier si la religion est fondée sur la vérité. Il nous faut tirer la vérité de la culture, sinon les dispensateurs de culture perdraient des occasions de gratter quelques sous. Des cercles de discussions qui ne citent jamais la religion aux partis qui éliminent ou veulent réformer la religion, en passant par les conseils municipaux qui en ignorent l’existence, les compositeurs sans trace de religion dans leurs œuvres et les médias qui ne font jamais mention des rapports de la religion avec les événements, la liste est longue.
Plaçons un évêque dans ce flot hostile. Le chef d’un diocèse traite des tas de questions avec des comités, au cours de réunions à l’écart du public. La plupart des catholiques ne voient leur évêque qu’à l’occasion de cérémonies. Mais cette activité cachée, cette existence isolée de la plus grande culture, est-ce bien le rôle d’un évêque ? Bien souvent les évêques se comportent comme un vicaire général, ou un simple bureaucrate se consacrant aux affaires internes du diocèse.
L’évêque a-t-il un rôle spécifique en-dehors de l’institution de l’Église elle-même ? Selon moi, c’est la théologie d’un concile qui fait autorité. “Christus dominus“, décret de Vatican II relatif à la vie pastorale des évêques débute par ces mots : « Le Christ Seigneur, Fils du Dieu vivant est venu pour sauver son peuple du péché et pour sanctifier tous les hommes » L’expression « tous les hommes » saute aux yeux !
Poursuivons : « Car le Christ a donné aux Apôtres et à leurs successeurs l’ordre et le pouvoir d’enseigner toutes les nations, de sanctifier les hommes dans la vérité et de guider le troupeau. » C’est d’évidence bien davantage qu’un monde de comités et de paroisses. On trouve tout un univers d’institutions et de personnes, au-delà de la communauté ecclésiale, à sanctifier par la vérité sous la houlette de l’évêque.
En fait, ils devraient montrer en particulier que les biens matériels et les institutions humaines, selon le plan divin du Créateur, sont destinés à participer au salut des hommes, et donc à la constitution du corps du Christ.
Le Concile attendait précisément que les évêques établissent des dialogues approfondis avec quiconque est concerné par la culture. Le Christ est en arrière-plan, touchant tout. Et le Concile conclut : « Puisqu’il appartient à l’Église d’engager le dialogue avec la société humaine au sein de laquelle elle vit, c’est au premier chef la tâche des évêques d’aller aux hommes et de solliciter et promouvoir le dialogue avec eux. »
Il n’y a rien à ajouter sur ce point, ni sur la disponibilité dans l’emploi du temps, ni sur l’opportunité, ou quoi que ce soit d’autre. C’est tout crûment une constatation.
Il n’y a, d’ailleurs, aucune allusion à une forme éventuelle de “sous-traitance“. Il est bien clair que c’est l’évêque — celui-là même qui a reçu la grâce apostolique — qui s’en charge. Nul autre n’est investi de ce statut pour s’élever et parler contre ce que Jean-Paul II appelait la “culture de mort“.
Quant aux moyens à mettre en œuvre, le Concile précise :
« pour annoncer la doctrine chrétienne, il faut user des moyens variés qui sont aujourd’hui à notre disposition : avant tout, la prédication et l’enseignement catéchétique qui tiennent toujours la première place ; également la présentation de la doctrine dans les écoles et les académies par des conférences et des réunions de tout genre ; enfin sa diffusion par des déclarations publiques faites à l’occasion de certains événements, ainsi que par la presse et les divers moyens de communication sociale qu’il importe absolument d’utiliser pour annoncer l’Évangile du Christ ».
Il faut donc transmettre la doctrine catholique et la compréhension du monde dans tout le domaine public par le moyens de réunions de tous genres. Et l’évêque en est l’acteur. L’apostolicité de l’évêque s’inscrit dans le cadre culturel du vingtième siècle.
Ainsi pouvons-nous placer côte à côte le rôle personnel de l’évêque pour la culture et celui que le Concile confie aux laïcs baptisés. « Les laïcs sont appelés de manière particulière à montrer la présence et l’action de l’Église en des lieux et circonstances où ce n’est que grâce à eux qu’elle peut devenir le sel de la terre. »
Tout d’abord, il y a la même immense attente placée sur le chef de la hiérarchie diocésaine et sur chacun des baptisés. La différence dans leur adresse à la culture se trouve dans les milieux qu’ils peuvent atteindre. En premier lieu, il s’agit de la famille, du lieu de travail, des rencontres sportives, des échanges en faisant le plein du réservoir ou les courses au super-marché.
Mais il y a plus. La population est en pleine croissance, science et technique sont en progrès continu, ce qui élargit les occasions de relations interprofessionnelles, et donc les champs d’action de l’apostolat laïque se sont immensément étendus, et, en majorité, ouverts aux seuls laïcs.
Et donc évêques et laïcs, chacun de son côté, sont chargés de toucher leurs zones spécifiques de culture. Et, pourquoi pas, prenons notre envol, et donnons une chance à la grâce de Dieu au-dessus de cette incontournable et stupide culture qui nous entoure.
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Photo : Synode des évêques
Source : http://www.thecatholicthing.org/columns/2013/lets-fly-a-little.html