Que l'homme contemple donc la nature - France Catholique
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La chasteté : apprendre à aimer
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Que l’homme contemple donc la nature

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Le 19 août 1662, il y a donc 350 ans exactement, Blaise Pascal mourrait à Paris à l’âge de 39 ans. A la différence de Jean-Jacques Rousseau, dont on célèbre également cette année le tricentenaire de la naissance, il est plus difficile de situer son rapport à la nature. On pourrait même dire que l’auteur des Pensées était plus soucieux de la nature de l’homme que de l’homme dans la nature. Ce serait, en fait, commettre une erreur car toute la réflexion du philosophe est centrée sur la place de l’homme dans l’Univers.

Mais quelle est justement cette place ? Quand on s’essaye à tenter l’exercice, une autre erreur nous guette. La lecture des Pensées pourrait facilement donner comme impression celle d’un homme supérieur à tout ce qui l’environne. Supérieur au règne animal: « Il est dangereux de trop faire voir à l’homme combien il est égal aux bêtes, sans lui montrer sa grandeur. Il est encore dangereux de lui faire voir sa grandeur sans sa bassesse. Il est encore plus dangereux de lui laisser ignorer l’un et l’autre. Mais il est très avantageux de lui représenter l’un et l’autre ». Supérieur au règne végétal: on connaît la célèbre citation « L’homme n’est qu’un roseau, le plus faible de la nature; mais c’est un roseau pensant » qui se poursuit ainsi: « Il ne faut pas que l’univers entier s’arme pour l’écraser: une vapeur, une goutte d’eau, suffit pour le tuer. Mais, quand l’univers l’écraserait, l’homme serait encore plus noble que ce qui le tue, parce qu’il sait qu’il meurt, et l’avantage que l’univers a sur lui, l’univers n’en sait rien ».

Pour autant, la force de la pensée n’affranchit pas l’homme de son état et de sa position dans l’Univers: « Car enfin, qu’est-ce que l’homme dans la nature ? Un néant à l’égard de l’infini, un tout à l’égard du néant, un milieu entre rien et tout ». Et Pascal d’inviter l’homme à se bien juger: « Que l’homme contemple donc la nature entière dans sa haute et pleine majesté, qu’il éloigne sa vue des objets bas qui l’environnent. Qu’il regarde cette éclatante lumière, mise comme une lampe éternelle pour éclairer l’univers, que la terre lui paraisse comme un point au prix du vaste tour que cet astre décrit et qu’il s’étonne de ce que ce vaste tour lui-même n’est qu’une pointe très délicate à l’égard de celui que les astres qui roulent dans le firmament embrassent. Mais si notre vue s’arrête là, que l’imagination passe outre; elle se lassera plutôt de concevoir, que la nature de fournir. Tout ce monde visible n’est qu’un trait imperceptible dans l’ample sein de la nature. Nulle idée n’en approche ».

Si donc l’homme domine par sa pensée, ou plus exactement sa faculté de pensée, il ne sautait pour autant se considérer comme supérieur à son environnement : sa seule force est seulement de percevoir l’infini qui l’entoure. Une belle leçon d’humilité et de lucidité qui pourrait utilement inspirer nos politiques environnementales.