Saint Bonaventure
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Merci au poète britannique Percy Bysshe Shelley pour le titre : il s’applique parfaitement à la reddition devant le déclin intellectuel au sein de l’Église catholique des États-Unis. L’anniversaire, le 15 août, de la constitution « Ex corde ecclesiae » (Née du cœur de l’Église) a mis en lumière le cas particulier des Universités catholiques américaines. Par exemple, allons-nous retomber dans la banale opinion émise en 1967 par « Land O’Lakes Statement on the Nature of the Contemporary Catholic University »? [NDT: « Déclaration en Pays des Lacs sur la nature de l’Université catholique actuelle », déclaration d’indépendance des Universités catholiques vis-à-vis de l’Église]. Ou chercherons-nous une meilleure piste ?
Signée par un grand nombre de présidents d’Universités « catholiques », la déclaration « Land O’Lakes » proclame que « L’Université catholique ajoute à la notion de base d’une Université moderne des caractéristiques spécifiques entourant et complétant cette notion ». Comme l’indique clairement ce bref extrait, la notion fondamentale est celle d’une « Université moderne ». Le catholicisme est accessoire, ajouté à ce qui pré-existe. Au contraire, la définition officielle d’une Université se trouve dans les premiers mots de « Ex corde »: « NÉE DU CŒUR de l’Église, l’Université catholique s’insère… » En d’autres termes, vue d’un œil épris de vérité, l’idée primitive d’une Université réside avec le Christ en Son Église.
Voici donc un travail de christologie et d’ecclésiologie. Pour Jean-Paul II, et pour l’Église catholique, le Christ est l’incarnation de la Parole divine, il est donc toute vérité. Tout a été fait par Lui (Jean, 1:3). Ainsi, quelles que soient les disciplines professées dans une Université catholique tous les efforts intellectuels doivent se placer dans « deux ordres de réalités qu’on a trop souvent tendance à opposer comme si elles étaient antithétiques, la recherche de la vérité et la certitude de connaître déjà la source de la vérité ». (Jean-Paul II). Évidemment, la source de vérité, c’est le Christ.
Alors, les nombreuses matières enseignées dans une Université catholique peuvent être considérées au point de vue du pouvoir — point de vue dominant dans une société moderne — ce qui explique la proposition de « Land O’Lakes »:
« Aucun impérialisme théologique ou philosophique n’est acceptable ; il faut honorer et respecter toutes les méthodes scientifiques et d’autres disciplines, ainsi que les méthodologies. Cependant, des discussions interdisciplinaires résultera nécessairement la notion d’une dimension philosophique et théologique par un approfondissement suffisant de la plupart des sujets intellectuels traités. Et donc on portera dans les Universités catholique un intérêt particulier aux problèmes interdisciplinaires et à leurs interactions.»
Par contraste, saint Bonaventure, dans sa Reductione Artium ad theologiam (littéralement : ramener les arts à la théologie), avait déjà remarqué que la relation entre les disciplines est bien plus forte, et que toutes sont puissamment liées à la foi en Jésus Christ et à la vérité qui émane de Lui.
Bonaventure insistait sur l’intégrité de la vérité. Ainsi que l’explique Jean-Paul II : « Soutenus par les contributions spécifiques de la philosophie et de la théologie, les universitaires seront pris par un effort constant afin de définir la place relative et la signification de chacune des diverses disciplines dans le contexte de la personne humaine et du monde éclairé par l’Évangile, et donc par une foi en Jésus-Christ, le « logos », le Verbe, centre de la création et de l’histoire de l’homme. »
Le fait qu’il n’y ait guère eu de retombées après la déclaration « Land O’Lakes » et que la constitution « Ex corde ecclesiae » n’ait eu qu’un effet minime sur les Universités catholiques du pays montre un manque de foi, et aussi une carence de foi en l’Église — que tous devons montrer tous les dimanches. La culture séculière, ainsi que le manque de foi plus ou moins pris en compte par l’Église, semblent pénétrer la conscience de l’Église en Amérique. De plus, lié au manque de foi, on remarque un rejet des effets de la parole de Dieu à travers le Christ, et du fait que la Création est issue du Verbe.
« Ex corde », puis le discours de Benoît XVI à l’Université romaine de la Sapienza, s’expliquent par les paroles de Benoît XVI : « C’est le rôle du Pape de préserver la réceptivité à la vérité ; d’inviter la raison à chercher encore et toujours ce qui est vrai et bon, à la recherche de Dieu; de pousser la raison, dans cette quête, à discerner les éclairages qui ont illuminé l’histoire de la foi chrétienne, et ainsi de reconnaître en Jésus-Christ la Lumière éclairant l’Histoire et qui nous aide à découvrir le chemin à suivre vers l’avenir. »
Naturellement, ce rôle n’est pas dévolu au Pape seul, mais aussi aux évêques, et aux responsables d’Universités potentiellement catholiques. Inciter les Universités à s’atteler à cette corvée pour mériter l’appellation de « catholiques » est un devoir fondamental afin d’affirmer la présence de l’Église dans une culture de plus en plus païenne et agnostique. Les diocèses n’ont ni le pouvoir, ni l’obligation, de traiter toutes les questions intellectuelles à propos de la culture; et cependant ils ont pour tâche d’évangéliser la culture.
L’enseignement de l’Église joue un rôle particulièrement important à la recherche d’une synthèse dans la connaissance ainsi que dans le dialogue entre foi et raison. Il aide toutes les disciplines dans leur recherche de signification, non seulement en les aidant à chercher comment leurs découvertes toucheront les individus et la société, mais aussi en ouvrant perspectives et orientations dans leurs propres méthodologies.
Épongeons la tache du paganisme et de l’agnosticisme qui s’étale insidieusement.