3116-Ascension : à la droite du Père - France Catholique

3116-Ascension : à la droite du Père

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Par le Père Ludovic Lécuru

Dans le credo, nous confessons ce que l’Évangile révèle : « Le Seigneur Jé­­sus, après avoir parlé à ses apôtres, fut enlevé au ciel et s’assit à la droite de Dieu » (Mc 16, 19). Cet événement, l’Église le nomme l’Ascension du Seigneur.

L’Ascension a lieu qua­­­rante jours après la Ré­surrection. Cet espace de temps est fré­quent dans la Bible. Il désigne généralement l’exigence d’une longue persévérance que Dieu propose à l’homme pour préparer son cœur à recevoir une grâce. Durant ces quarante jours, Jésus convertit peu à peu l’opinion de ses apôtres à son sujet en une foi en sa gloire céleste. Cette gloire s’est accomplie dès l’instant de sa Résurrection. Durant ces quarante jours, elle demeure voilée sous les traits d’une humanité ordinaire. Aussi Jésus veut conduire ses apôtres à porter sur lui un regard nouveau.
Entre la Résurrection et l’Ascension, Jésus-Ressuscité précède ses apôtres en Galilée selon la promesse faite par l’Ange aux saintes femmes le matin de Pâques : « Allez dire à ses disciples, notamment à Pierre, qu’il vous précède en Galilée : c’est là que vous le verrez » (Mc 16, 7). Si Jésus précède les siens dans le lieu de leur vie quotidienne qu’est la Galilée, on peut être certains qu’il nous précède dans notre vie de chaque jour, notre Galilée à nous.
Jésus prépare ses apôtres à leur mission d’annoncer le salut « jusqu’aux extrémités de la terre », comme il nous prépare nous-mêmes à être ses témoins aujourd’hui.

Les évangiles de Marc et de Luc s’achèvent par la montée de Jésus au ciel. Cette ultime étape de sa mission est en lien direct avec sa venue d’en haut. Jésus nous dit : « Seul celui qui est sorti du Père retourne vers le Père » (Jn 16, 28) car, précise-t-il ailleurs, « personne n’est jamais monté aux cieux sinon le Fils de l’Homme qui est descendu des cieux »
(Jn 3, 13 ; cf. Ep 4, 8-10).

L’Ascension qui se déroule dans la nuée marque l’entrée définitive de Jésus « à la droite du Père » comme nous le confessons dans le Credo. Dieu n’est ni gaucher ni droitier. Au sens biblique, la « droite » désigne à la fois la faveur et la puissance de Dieu comme nous le voyons dans le psaume 120 : « Le Seigneur est ton gardien, il est ton ombrage. Le Seigneur se tient à ta droite. » Dans le Credo, le mot « droite » renvoie au fait que Jésus se tient aux côtés du Père. Il est vraiment le Fils que le Père a envoyé pour nous sauver. « L’Ascension du Christ signifie sa participation, dans son humanité, à la puissance et à l’autorité de Dieu lui-même » (CEC 668). Voilà pourquoi, dans le Gloire à Dieu, nous chantons : « Toi qui es assis à la droite de Dieu, prends pitié de nous ».

Parce que Jésus est monté corporellement « à la droite de Dieu », son Ascension concerne l’humanité entière dont il est le « Chef », c’est-à-dire la « Tête » (Ep 1, 22 ; 5, 23). Par son incarnation, il en a assumé la condition. Laissés à nos seules facultés terrestres, il nous est impossible d’accéder à la vie et au bonheur célestes. Le Christ seul a pu nous ouvrir l’accès à la droite de Dieu, « de sorte que nous, ses membres, nous ayons l’espérance de le rejoindre là où Lui, notre Tête et notre Principe, nous a précédés » (cf. CEC 661).

La promesse faite par Jésus – « Moi, une fois élevé de terre, j’attirerai tous les hommes à moi » (Jn 12, 32) – trouve sa réalisation par l’élévation sur la Croix puis dans son Ascension. Élévation lors de la Passion d’abord, dans la gloire céleste ensuite. En montant à la droite du Père, Jésus n’est pas « entré dans un sanctuaire fait de mains d’hommes, mais dans le ciel afin de paraître maintenant à la face de Dieu en notre faveur » (He 7, 24 ; 9, 25). Jésus devient ainsi le grand prêtre qui nous réconcilie avec Dieu.

L’Ascension de Jésus à la droite de Dieu signifie un nouveau mode de présence auprès de nous. Cette présence se réalise dans l’Esprit Saint donné à l’Église. Elle est immédiate. Elle « nous assure en permanence l’effusion de l’Esprit Saint » (CEC 666). Cette présence échappe à nos sens. Espérée dans la foi, elle est vécue dans la prière qui nous permet de vivre dans la présence immédiate de Jésus à la droite du Père d’où « il intercède en notre faveur » (Hb 7, 25). Si l’absence de Jésus auprès de ses disciples est inévitable en raison de sa glorification à la droite du Père, sa présence demeure active puisque Jésus promet d’être « avec nous jusqu’à la fin du monde. » Présence effective puisque Jésus ne cesse d’appeler de nouveaux disciples à le suivre tout au long de l’histoire de l’Église. Souvent, autour de nous, nous constatons que les tout-petits ont une facilité particulière à envisager simultanément la présence de Jésus au ciel et sur la terre. Que le Jésus de la crèche soit le même qui fasse des miracles, le même qui soit présent dans l’hostie, le même qui habite le ciel, le même que l’on prie devant le tabernacle ou dans son cœur, tout cela est « simple » pour eux. Cette conscience immédiate de la présence de l’Invisible est la base fondamentale de notre édifice intérieur et de notre personnalité chrétienne.

La foi au retour du Seigneur dans la gloire fait écho aux paroles de l’Évangile : « On verra le Fils de l’homme venir sur les nuées du ciel avec puissance et grande gloire. Il enverra ses anges avec une trompette sonore et ils rassembleront ses élus des quatre coins de l’horizon, d’un bout à l’autre des cieux » (Mt 24, 30-31). Personne ne sait quand se produira ce retour puisque Jésus lui-même affirme à ses apôtres : « Quant à la date et à l’heure, personne ne les connaît, ni les anges dans les cieux, ni le Fils, si ce n’est le Père » (v. 36). Il indique de cette manière que le Père seul est maître du temps.

Parce que l’heure de l’établissement glorieux du Royaume n’est pas encore venue, le temps présent est le temps du témoignage, souvent marqué par l’épreuve qui n’épargne personne. Cette situation n’est pas sans animer la foi et l’espérance théologales dans le cœur des disciples. L’auteur du livre de l’Apocalypse nous rapporte cette antique acclamation des premiers chrétiens : « Marana tha » (Ap 22, 20). Littéralement : « Notre Seigneur, viens ! » Ce joyeux appel chargé de foi et d’espérance affirme que la venue du Fils de Dieu en notre chair et son retour dans la gloire constituent un seul et unique événement du salut. La Parousie, c’est-à-dire le retour de Jésus dans la gloire, retour suspendu à tout moment de l’histoire, répandra sur tout l’univers, visible et invisible, l’effet de la résurrection, laquelle ne manifeste à présent son effet que dans les âmes, notamment par la confession qui « redonne vie ».

* Ce texte est extrait du livre Le Credo (pages 93-97) que le Père Ludovic Lécuru a publié ces derniers jours,
aux éditions de l’Emmanuel, 149 pages, 14 e.