2880- Le discernement spirituel - France Catholique
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Van Eyck, l'art de la dévotion. Renouveau de la foi au XVe siècle
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2880- Le discernement spirituel

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Décidément le religieux est partout. Dans l’actualité internationale et nationale. Les rassemblements spectaculaires des foules chiites en Irak donnent corps à l’hypothèse d’une « république islamiste » à laquelle les Américains vont devoir se confronter… En France, la querelle du foulard a repris de plus belle. Chacun à sa façon, Régis Debray (Le feu sacré, Fayard) et Bernard-Henri Lévy (Qui a tué Daniel Pearl ?, Grasset) portent l’interrogation au centre des ébranlements du monde. C’est à croire qu’André Malraux avait vu trop juste dans la fameuse prévision qu’on lui prête à tout bout de champ : « Le vingt et unième siècle sera religieux » : parce que le religieux est bien là mais parce qu’il porte la violence comme une fatalité. Bernard-Henri Lévy : « Qui aura raison de l’autre : les héritiers de ce très ancien commerce des hommes et des cultures qui va d’Avicenne à Mahfouz en passant par les sages de Cordoue – ou les furieux des camps de Peshawar qui appellent au jihad et, le ventre bardé d’explosifs, aspirent à mourir en martyrs ? »

Le 23 avril dernier, dans le cadre des “Rencontres Montaigne” sur le campus de l’Ecole Supérieure de Commerce de Marseille-Provence, nous étions plusieurs à débattre du sujet, appartenant à diverses confessions, et en présence du grand mufti de Marseille, Soheib Bencheikh. Chrétiens, juifs ou musulmans, nous nous retrouvions spontanément d’accord pour refuser le choc des civilisations et des religions. Il y avait possibilité de se retrouver sur le terrain d’une laïcité bien comprise, c’est-à-dire d’un espace civique où chacun collabore au bien commun dans le strict respect des convictions spirituelles. Par ailleurs, un dialogue proprement interreligieux nous paraissait indispensable, ne serait-ce que pour assurer les relations entre les diverses appartenances.

Si l’on accepte cette perspective, nul doute qu’une réflexion commune s’impose sur ce que René Girard appelle, depuis son grand livre de 1972, la violence et le sacré. Comment l’homme religieux n’aurait-il pas été confronté à cette violence, dès lors que la question du bien et du mal ne cesse de le hanter et que l’existence sociale l’expose sans cesse aux tentations des rivalités et de la domination ? Oui, il est vrai que le sacré a parfois été lié au meurtre rituel et qu’il est encore aujourd’hui facteur de haine. Cela nous paraît paradoxal, alors que notre Evangile se reconnaît dans la charte des Béatitudes. Mais engagés dans le rythme de l’Histoire, ce n’est que grâce à l’ascèse du discernement spirituel qu’il nous est possible de surmonter l’abîme du mal et d’entrevoir un horizon de réconciliation.

Gérard LECLERC