2788-Le dialogue de la vérité - France Catholique
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2788-Le dialogue de la vérité

FC N°2788

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Le dialogue de la vérité

On pouvait appréhender l’étape d’Athènes pour le Saint-Père, parti sur les pas de saint Paul. L’Eglise orthodoxe de Grèce est une des plus rétives au dialogue œcuménique et ajoute, à toutes les raisons contemporaines de crispation de cette région tourmentée, les souvenirs d’un passé hautement convulsif. Quelques manifestations, même très minoritaires, auxquelles avaient participé des moines et des religieuses, pouvaient faire penser que l’opinion orthodoxe n’acceptait même pas le principe de cette visite, qui en fin de compte n’aurait suscité que colère ou indifférence. Pourtant, Mgr Christodoulos, primat de l’Eglise de Grèce, avait engagé son autorité morale, et le Vatican avait préparé avec soin une rencontre qui, dans l’esprit de Jean-Paul II, était tout autre chose qu’une affaire de forme ! On s’en est aperçu, avec cette demande de pardon, explicite, motivée, circonstanciée, qui ne pouvait pas ne pas toucher les cœurs.

Après avoir rappelé le « sac dramatique de la ville impériale de Constantinople » par les croisés latins, le Pape s’est interrogé : « Comment ne pas voir ici le mysterium iniquitatis à l’œuvre dans le cœur de l’homme ? Le jugement appartient seulement à Dieu et, par conséquent, nous confions le lourd fardeau du passé à son infinie miséricorde, l’implorant de guérir les blessures qui font souffrir le cœur du peuple grec. Ensemble nous devons travailler à cette guérison, si l’Europe qui émerge maintenant désire être vraie, avec son identité qui est inséparable de l’humanisme chrétien partagé par l’Orient et l’Occident… » L’effet d’une telle déclaration a été immédiat, et la visite à Athènes, sans évidemment résoudre toutes les difficultés entre catholiques et orthodoxes, aura permis une décrispation de l’opinion grecque, sensible jusque dans les sondages de la presse locale. Un très long chemin reste à parcourir, mais l’horizon s’est ouvert. C’est une première raison de rendre grâce au ciel.

L’étape suivante, à Damas, recelait plus d’un piège diplomatique. On le vit tout de suite avec le discours d’accueil du jeune président syrien Bachar el-Assad, évidemment très mal reçu en Israël. Mais il fallait que de nouveaux gestes symboliques forts soient posés par le Pape, pour témoigner, non seulement à l’égard du Proche-Orient, mais de tous les continents où le face à face chrétiens-musulmans est souvent gros de menaces, de l’engagement résolu de l’Eglise en faveur de la paix et d’une meilleure compréhension mutuelle. D’évidence, c’est le pèlerinage à la mosquée des Omeyyades, marqué par le souvenir de saint Jean Baptiste, qui aura frappé le plus les imaginations. La portée d’une telle démarche n’est peut-être pas immédiatement décelable, mais on aura compris qu’il n’y aura pas d’entente durable entre les peuples si les religions ne règlent pas elles-mêmes leurs propres règles de cohabitation et d’explication mutuelle. Les politiques risquent de demeurer durablement impuissants dans le règlement des conflits actuels, s’ils ne sont pas aidés par des religieux agissant en profondeur pour chasser les ressentiments et les causes d’incompatibilité spirituelle. C’est pourquoi la démarche syrienne du Pape, même si elle n’échappe pas à l’imbroglio diplomatique du Proche-Orient, le dépasse en esquissant une autre logique de résolution des conflits : « Une meilleure compréhension mutuelle, a dit Jean-Paul II à Damas, conduira sûrement, sur le plan pratique, à une nouvelle manière de présenter nos deux religions, non pas en opposition, comme cela est advenu trop souvent par le passé, mais en partenariat pour le bien de la famille humaine ». Sur les pas de saint Paul, notre Pape aura une fois de plus dénoué les clefs de l’avenir.