Une pétition pour le pape - France Catholique
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Van Eyxk, l'art de la dévotion
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Une pétition pour le pape

Traduit par Antonia

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Tous ceux qui débattent de religion sur la place publique ont l’habitude d’entendre sans cesse la même rengaine : Pourquoi le monde ne tourne-t-il pas rond ? Et souvent : Ne contribuez-vous pas à ce malaise ? Pourquoi êtes-vous si défaitistes, ne comprenez-vous pas la joie chrétienne  ? Ou bien encore : Pourquoi vous retranchez-vous si naïvement dans votre « stupide tradition d’œcuménisme chrétien ? », comme un commentateur l’a récemment écrit. Et que de paroles en l’air. Assez de paroles, des ACTES !

Sauf dans des cas rares (qui existent vraiment, mais que nous ne nommerons pas), dans ce débat la plupart d’entre nous n’allons pas jusqu’à nous prendre pour Dieu. Nous ne savons pas tout et ne pouvons pas sauver le monde en usant de notre mieux du poids des actes et des paroles.

Pour commencer, le monde a déjà été sauvé. Et pour une certaine raison, la Personne qui l’a fait a jugé bon de laisser beaucoup de choses se régler elles-mêmes. Ce qui ne semble guère probable jusqu’à ce qu’IL revienne. Affronter les éternels problèmes de la race humaine, surtout à une époque comme la nôtre, nous condamne donc à une humilité de tous les instants.

Mais, avec tout un groupe d’amis, je suis récemment « passé à l’ACTE », en agissant de façon contraire à mes habitudes. Nous avons signé un « Appel filial » adressé au Saint-Père par lequel nous affirmons avec force qu’ « une parole de Votre Sainteté est la seule manière de clarifier la confusion qui gagne de plus en plus les fidèles ». Au départ, quand elle m’a été envoyée par mon ami Roberto de Mattei, l’un des plus grands historiens catholiques actuels, elle comptait moins d’une centaine de signatures. Il y en a plus de 100 000 à présent.

Je ne signe jamais de pétitions pour la même raison que je n’ai jamais adhéré à un parti politique. De nombreuses activités humaines sont des sports d’équipe et ne peuvent se pratiquer qu’avec plusieurs partenaires, voire beaucoup. Mais ceux qui veulent se sentir chaque matin capables et libres de dire la vérité – quitte à provoquer des personnes qui ont pu être des alliés proches dans des combats importants – doivent être prêts à sacrifier des engagements, dont, entre autres, certaines actions collectives.

Cet appel filial a recueilli les signatures du cardinal Burke et de deux autres cardinaux (ceux de Lettonie et du Chili) ainsi que celles de divers évêques et archevêques, du philosophe Josef Seifert, du dissident cubain Armando Valladares, de parlementaires de l’Union européenne comme Anna Zaborska, de nos collègues Hadley Arkes et Austin Ruse, du grand romancier Piers Paul Read, pour ne citer que quelques-uns des éminents signataires.

Le profil des autres personnalités qui ont été spécialement retenues parmi les signataires pose quelques problèmes, surtout dans une optique américaine. La présence dans la liste de membres de familles royales (je ne m’y rattache que par mon nom) et de la vieille noblesse européenne n’est pas, à mon avis, d’un grand secours. Je n’ai rien contre la noblesse héréditaire – en fait, les quelques représentants que j’ai rencontrés m’ont paru plus polis et modestes que les personnes qui les raillent. Mais d’un point de vue politique et purement visuel, ils donnent l’impression que le texte est en partie lié à un passé presque aboli, alors qu’il se veut axé sur l’avenir.

Mais la situation du mariage et de la famille (et leur place dans l’enseignement de l’Eglise) est à l’heure actuelle si controversée que je me suis senti dans l’obligation d’infléchir la règle que je m’étais fixée (sans la briser). Voici ce que dit la pétition :

L’enseignement catholique sur le sixième commandement du décalogue brille comme un phare… Ce phare permet d’attirer de nombreuses personnes – accablées par l’hédonisme ambiant – vers le modèle familial de chasteté et de fécondité enseigné par l’Evangile et conforme à la loi naturelle.

Votre Sainteté, au vu des informations publiées sur le dernier synode, nous notons avec angoisse que, pour des millions de fidèles catholiques, ce phare semble avoir perdu de sa clarté à cause de l’assaut de modes de vie prônés par les lobbies antichrétiens. En fait, nous voyons se propager une confusion résultant de la pensée qu’il pourrait y avoir dans l’enseignement de l’Eglise une brèche menant à accepter l’adultère – en permettant aux catholiques divorcés et remariés civilement de recevoir la sainte communion – voire à accepter virtuellement les unions homosexuelles alors que ces pratiques sont catégoriquement condamnées comme contraires aux lois divines et naturelles.
Comme vous pouvez en juger par vous-mêmes si vous lisez (et peut-être signez) cette brève pétition, elle est libellée dans des termes respectueux et mesurés et vise à aider le pape à s’acquitter de la mission qu’il a lui-même peu à peu définie comme la sienne. Il a reconnu être surpris que certaines de ses paroles et actions aient été mal interprétées, et cette pétition lui offre la possibilité de corriger ces interprétations erronées.

J’ignore si le pape répondra à cette requête. Je pense plutôt que non. Et on pourrait même soutenir qu’une réponse de sa part politiserait la question – ce qui amènerait les partisans de l’autre version des questions les plus controversées à lancer leurs propres appels publics. Et alors nous serions embarqués dans des campagnes de guerre psychologique sans fin d’ici le Synode sur la famille d’octobre 2015. D’après moi, c’est ce qui se passera de toute façon, même si le pape ne répond pas.

Mais le pape François a demandé dans d’autres contextes que les gens lui disent vraiment ce qu’ils pensent et pas ce que, selon eux, il souhaiterait entendre. A présent, c’est fait. Il est le successeur de Pierre et devra décider de la suite à donner à cette demande d’éclaircissements.

Jeudi 19 février 2015

Source : http://www.thecatholicthing.org/2015/02/19/petitioning-pope/

Illustration : APPEL FILIAL ADRESSÉ À SA SAINTETÉ LE PAPE FRANÇOIS SUR L’AVENIR DE LA FAMILLE

Plus de 100 000 signatures à ce jour. Cliquez ici pour signer

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Robert Royal est le rédacteur en chef de The Catholic Thing et le président du Faith& Reason Institute de Washington (D.C.). Son dernier ouvrage, The God That Did Not Fail : How Religion Built and Sustains the West est à présent disponible en livre de poche (Encounter Books).