Toussaint et Jour des Morts - France Catholique
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Van Eyxk, l'art de la dévotion
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Toussaint et Jour des Morts

Traduit par Pierre

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Le monde moderne a un problème particulier avec le catholicisme. Bien peu de gens admettent l’existence du « péché ». Et pourtant une onde délicieuse s’empare des esprits de beaucoup lorsqu’ils s’occupent des fautes fréquentes commises par des croyants.

À cette réaction, une double explication. Primo, le nombre estimé de croyants n’est — c’est tant-mieux — guère différent de celui des incrédules. Secundo, pas besoin de distinguer ce qui est juste de ce qui est mauvais, le bien du mal, si nul n’y peut rien. Pourtant nous retenons l’enseignement culpabilisant de la venue du Christ qui, homme, vint pour le pardon de nos péchés. Prétendre que le péché n’existe pas revient à nier le besoin ou l’existence d’un Dieu miséricordieux.

Les deux premiers jours de novembre sont pour l’Église la fête de tous les Saints et celle des Morts. Ces derniers temps, Benoît XVI a fréquemment donné, comme preuve de la validité du catholicisme, l’exemple des Saints à toutes les étapes de la vie. La morale n’et pas simplement un énoncé de règles et de sanctions. C’est essentiellement l’attachement à l’exemple de ceux qui aimaient Dieu et leur prochain, au service des âmes et des corps de leurs amis et de leurs semblables.

En tête de liste des saints on trouve ceux dont on sait qu’ils furent, selon les barèmes classiques, des pécheurs. Cet aspect nous montre que le péché ne doit pas être un choix définitif, même s’il peut l’être de notre fait. Le péché est l’autre face de la liberté de l’homme. Nier l’éventualité, l’existence du péché, c’est nier la possibilité, la réalité de la liberté de l’homme.
De même Benoît XVI a porté une grande attention aux âmes de ceux qui nous ont quittés. L’enseignement à propos des âmes du purgatoire a été récemment dégradé, sinon rejeté. Pourtant, c’est le critère doctrinal de la distinction entre Saint et pécheur. La Toussaint, c’est la célébration de tous les saints ayant touché le but de leur existence, la Cité de Dieu, la réussite de la destinée de chaque créature.

Le Jour des Morts nous montre le nombre sans doute bien plus grand de ceux qui, morts avec repentir, n’étaient pas encore prêts à rejoindre la vie divine. Benoît XVI, comme Platon sur le même sujet, suggère que nul n’oserait se présenter devant Dieu sans être assez purifié. Simple logique.
On nous parle de l’Église triomphante, de l’Église souffrante, de l’Église militante. Des membres de cette Église, certains sont au Paradis, d’autres au purgatoire, et devant décider de ce qu’ils souhaitent. D’évidence ceux qui resteront dehors ont simplement, et consciemment, rejeté l’idée d’entrer dans une telle Église, à aucun niveau. Le dernier chapitre du Leviathan de Hobbes est intitulé « Le royaume des ténèbres ».

Benoît XVI porte une grande attention à cette phrase du « Credo »: « Il viendra juger les vivants et les morts ». Pourquoi? Les lecteurs de Platon — le Pape en fait partie — savent que Socrate voulait prouver que le monde n’a pas été créé sur l’injustice. L’homme n’est pas « l’étalon de toute chose », comme le suggérait Protagoras. S’il en était ainsi, aucun de nos actes ne ferait la différence. Ainsi les crimes et péchés commis par des hommes au cours de leur vie ne seraient pas pris en compte, sans repentir ni sanction. De même les bonnes actions accomplies envers les autres, sans publicité, ne seraient pas reconnues.

La doctrine reconnaissant l’enfer montre tout au moins la signification de nos propres actes quel que soit le jugement que nous portons sur eux à notre profit. Platon comprenait parfaitement cette question. Selon lui, si nous mourons dans le péché, nous sommes condamnés au fleuve de la punition. Nous ne pouvons échapper à la sanction avant que la personne contre qui nous avons péché nous ait pardonné.

À cette leçon sur le pardon le christianisme ajoute que nos péchés ne sont pas simplement contre autrui. Ou plutôt, que commis contre autrui ils sont aussi commis contre Dieu qui nous a créés et mis dans le monde, un monde de liberté et de responsabilité. La révélation du christianisme débute son enseignement par ces mots: « Repentez-vous ». Cette incitation implique que nous sommes dépositaires de la grâce qui nous en rend capables. Mais nous n’avons pas la faculté de nous absoudre nous-mêmes puisque ce n’est pas contre nous que nous avons péché.

Combien de fois pardonnerons-nous à notre prochain ? Le Christ répondait à la question de l’apôtre en disant « non pas sept fois, mais soixante-dix fois sept fois ». Le nœud de la question vis-à vis de Dieu réside dans notre liberté. Nous avons le choix. Faire le choix est bien le drame de nos vies. Tous les Saints et tous les Morts — en ces deux jours, si nous pensons à eux, sont un exemple fondamental pour notre comportement.

Source : http://www.thecatholicthing.org/columns/2011/on-saints-and-souls.html

Illustration : Le Jour des Morts – Aladar Korosfoi-Kriesch, 1910