Sanction - France Catholique
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Van Eyxk, l'art de la dévotion
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Sanction

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Dans Valeurs actuelles je lis une note consacrée au désir du ministre de l’Instruction publique 1, M. Vincent Peillon, qui s’exprimait le 2 juin dernier devant une association de parents dont les enfants sont confiés à l’Éducation dite nationale… Mon lecteur sait tout le bien que je pense de cette institution dont nombre de professeurs, non tous par bonheur, se croient tenus de tenir Dieu pour mort et de déverser leur ironie sur les élèves qu’ils savent catholiques : ayant enseigné à Troyes, j’ai eu à entendre les plaintes de plusieurs élèves à ce sujet, qui n’ont pas fait mystère que d’autres ne se plaindraient pas par crainte de possibles indiscrétions et donc de possibles conséquences négatives. (Je ne crois pas que ces enseignants au comportement sectaire se risqueraient à ce genre de goujaterie ou de méfaits envers des élèves d’obédience musulmane.) Pour le reste leur réussite dépend de données parfois rares chez certains : l’enthousiasme, le savoir, la possession d’une pédagogie efficace, l’équanimité chère au philosophe, notamment stoïcien, et… l’amour, dont dépend le don de soi sans lequel aucun succès auprès des élèves n’est possible. (Je n’accuse personne, j’accuse un système.)

Quel désir donc ? Quelque chose de grand ? Une possession plénière des termes propres à situer l’ampleur d’une réforme dont le plus inculte des Français sait qu‘elle est nécessaire pour ne pas dire indispensable, ou d’une urgence si évidente qu’elle ne pourrait que faire trembler d’inquiétude le plus hardi des ministres ? Non, pas cela, c’est trop grand pour un simple désir : cela supposerait une démarche ambitieuse, impossible à mener seul2.

M. Vincent Peillon ne peut qu’être persuadé que l’effort de réflexion, de conception en vue d’une telle aventure intellectuelle, humaine aussi, qu’une telle ambition de réformer ce qui doit l’être nécessiterait impérativement que soit conduit au niveau national une interrogation généralisée à tous, en tenant compte de tout ce qui serait dit par l’ensemble des responsables, non pas seulement politiques, économiques, culturels et spirituels, mais également à l’ensemble des bénéficiaires, c’est-à-dire les parents d’élèves et les étudiants.

Que désire-t-il alors ? Simplement, très simplement remplacer les « notes » attribuées aux devoirs que font les élèves par autre chose, de plus doux peut-être, de plus rassurant ? de plus affectueux ? De « plus » autre ! Par exemple des AAA ou des BBB ou des ABC ou de ces visages jaunes et ronds qui parfois apparaissent dans les messages que nous nous envoyons les uns aux autres par l’intermédiaire des fils de l’Araignée virtuelle, certains souriant, d’autres pleurnichant, faisant la moue… Il pourrait aussi et parfois aller jusqu’à l’AVC ! Stupidité pourtant déjà rejetée par 69% des parents, qui jugent la notation être « le bon système d’évaluation ». Ne sont-ils pas les premiers intéressés, oui ou non ?

Pourquoi donc changer de système puisqu’il satisfait le plus grand nombre (et pour une fois je suis d’accord avec ce plus grand nombre) ? « Parce que, dit le ministre, nos élèves ne sont pas heureux comme ils devraient l’être ». Ah mais, on s’y connaît en hauteur de vue ! Où vous êtes-vous réfugiées « Paroles avouables » et non fumées sans feu ? Voilà qui stupéfie ; que est digne d’une communication nationale, en ces heures où nous n’avons en effet rien de plus sérieux à nous mettre sous la dent !

Cependant, il nous faut introduire un mais puissant, tant le désir en question s’appuie sur une justification absurde : ne serait-ce que pour rendre le propos du ministre quelque peu intéressant. En effet, il est très rare qu’un élève soit heureux d’avoir à faire des efforts, donc des devoirs, des apprentissages par cœur ! Malgré les immenses et radicaux progrès faits par les pédagogues de la Rue de Grenelle on n’est pas encore et de très loin parvenu à faire en sorte que le savoir s’apprenne uniquement en jouant, seule méthode pour rendre heureux les élèves, quoique… car toujours un « quoique » se glisse dans une réflexion, quoique donc j’ai parfois rencontré des élèves heureux : ceux qui avaient toujours et sans cesse de bonnes notes ; également des élèves alternativement heureux puis malheureux, ayant reçu dans une matière une bonne note et une mauvaise dans une autre… Continuez Monsieur de La Palice à m’inspirer : j’en ai rencontré aussi qui se moquaient de tout et même des mauvaises notes infligées à leurs pauvres travaux. Certains par contre s’en affligeaient continûment. Ainsi de suite. Mais j’ai aussi « noté » qu’assez souvent la mauvaise note persuadait l’élève qu’il lui faudrait tout de même s’appliquer davantage… ou s’impliquer avec plus de détermination !

Je crois ce désir de M. Vincent Peillon proche d’un qualificatif que je ne vais pas « noter », par peur de le rendre malheureux ! Cependant, je voudrais signaler que l’élève Peillon ne connaît pas le sens du mot « sanction ». Que dit-il à ce sujet ? Qu’il faut « faire évoluer la notation pour qu’elle ne soit pas perçue comme une sanction ». Pour l’élève Peillon, la sanction par la notation ne peut être comprise, on le pressent, que comme une punition. Mais que mon lecteur me permette d’en citer seulement la définition donnée par le bien-aimé Petit Larousse : je n’irai pas jusqu’à la chercher chez MM. Robert et Littré, pour ne pas paraître trop insolent. Donc voici : « Acte par lequel le chef de l’état rend exécutoire une loi votée par le Parlement. Par ext. Approbation, confirmation considérée comme nécessaire : mot qui a reçu la sanction de l’usage. // Conséquence naturelle d’un acte : l’échec est la sanction de la paresse. // Conséquence morale 3d’un acte, châtiment ou récomnpense : le ridicule et le blâme sont la sanction des extravagances. // Peine ou récompense prévues pour assurer l’exécution d’une loi : sanctions pénales. // Mesure répressive : prendre des sanctions. // – SYN. :i acquiescement, adhésion, assentiment ; peine, pénalité, consentement, ratification ; peine, pénalité, punition… »

D’où, en mes neurones, un certain nombre de réflexions immédiates et peut-être nécessaires : qu’est-ce qu’une note ? Je pense ici au fameux AAA dont il semble que la France ne jouit plus que par négligence ou bienveillance ou autre appréciation de son état par les Agences et les Marchés : ces agences en question sont dites « de notation » ! Leur AAA est apprécié comme une excellente note. La notation peut donc prendre plusieurs visages : le 6 sur 20 est d’une précision intéressante quoique désagréable à voir apparaît au haut d’une dissertation… Le AAA, combiné avec des B ou des C, commence à paraître également d’une précision significative. De cela il ressort qu’une notation imprécise n’est d’aucun intérêt : mieux vaudrait, ai-je entendu dire, de supprimer cet avis des professeurs afin d’empêcher les élèves de « stresser », d’angoisser donc, meilleur vocable, de craindre les effets ou les conséquences de la mauvaise note, peut-être de trembler à la seule idée de la réaction du « Père » ou de la « Mère », qui sentent tomber sur lui ou elle le lourd manteau d’une inquiétude sans nom à la seule pensée que leur fils ou leur fille risquent demain de ne pas posséder le « sésame » de l’infaillibilité sans lequel on ne saurait atteindre le paradis des hommes d’affaires, des ingénieurs brillants, des « tradères » tout puissants, ou tout simplement une place quelque part susceptible de faire gagner convenablement sa pauvre existence à ce fils ou à cette fille…

  1. Le nom actuel d’Éducation nationale me paraît particulièrement abusif quand on voit les résultats de cette éducation qui a finit par persuader 80% des Français que la seule civilisation possible est celle de l’individualisme total. À rapprocher des 80% des classe d’âge que se réserve l’État pour ses écoles…
  2. Une démarche visant à rassembler au-delà de tout parti, de tout clan, de toute section, de tout courant… de toute idéologie, de tout spécialiste de telle ou telle virgule, afin que l’on parvienne à installer une structure de formation qui soit à la fois souple et forte, sans rigidités mais sans laxismes : une structure qui respecte les vœux de tous sans pour autant infliger à chacun les vœux des autres dont il ne veut pas. Car enfin il y a de certains autres qui n’ont que sarcasmes ou mépris pour les idées d’autres qui ne sont pas eux… Nous le voyons dans ce que notre propre Ētat républicain ose prendre comme mesures discriminatoires envers la liberté revendiquée par un nombre impressionnant de citoyens payant leurs impôts : c’est-à-dire payant les représentants de la nation, les fonctionnaires, les ouvriers de l’état comme des mairies, des départements, des régions, aussi les enseignants de tout ce que l’état contrôle, parfois au détriment absolu de cette liberté revendiquée qui est d’enseigner autrement que ce qu’impose l’état, puisqu’il est ici question de l’enseignement des enfants de notre patrie… Cet état en effet a de cette « liberté » capitale, probablement la plus secrètement essentielle au sein du faisceau des libertés qui composent « la » liberté inscrite au fronton de nos « maireries », mot ancien que je préfère au mot de récent emploi, une conception extraordinairement idéologique, restreinte également à ses vues politiques, ou partisanes. « Sujette », mot à prendre tel qu’il est, en ce qu’il signifie, aux théories de fonctionnaires qui souvent prennent les enfants pour des cobayes. Nul espace pour ce que nombre de Français prône : la véritable école libre, qu’elle soit d’une obédience ou d’une autre. D’une telle liberté qu’elle serait rendue possible par le paiement des enseignants et la prise en charge des autres coups de fonctionnement tout en laissant la capacité de définir les programmes et de choisir les ouvrages sans que l’état ou sa propre structure d’enseignement public ne puissent imposer leurs choix. Car qui ne peut choisir est en réalité « assujettis » aux choix de la structure étatique.
  3. Ici, Monsieur Larousse – à moins qu’il ne s’agisse que des nombreux spécialistes qui usent de son patronyme –, ignore l’évolution des mœurs chez nos politiques ; ils ne sont plus à l’évidence, ou parfois selon leur propres déclarations, « que » les gardiens de cette évolution si tragique, à mon sens, de nos concitoyens vers tous les laxismes possibles : ils entendent bien leur faire savoir qu’ils ne veulent plus des moindres liens moraux les obligeant à se comporter convenablement ; c’est ainsi que notre nouveau président de la République a eu l’incongruité d’accepter que sa concubine soit nommée « Première Dame de France » : ce titre ne se mérite qu’en respectant une loi, peut-être de convention, mais qui touche aussi à la morale, notamment en n’ayant pas l’air de jeter le digne mariage aux orties ou aux égouts. – Mais que dis-tu, pauvre diariste ? Toi aussi tu ignores que la morale n’est plus qu’une sottise antédiluvienne, tout droit sortie de la civilisation judéo-chrétienne, cette morte dont le cadavre est apparue dès que fut connue la Moert de Dieu… – Non, je n’ignore pas cette misère peu ragoûtante de notre civilisation présente, résultat d’une lente et laide évolution. Mais pour en finir avec le président, sa doctrine politique, affichée urbi et orbi, relève pour l’essentiel d’une « nouvelle bonne nouvelle » – elle accompagne enfin et dialectiquement sa proclamation d’athéisme assumée et volontairement distribué au bon peuple – qui n’est autre que celle de la fin de toute morale. La lente usure de la conception de ce qu’est le mariage républicain ; l’acharnement à vouloir faciliter jusque dans le moindre village le recours à l’avortement ; la reconnaissance décidée du comportement sexuel de ceux qui ont une attirance vers leur semblable et non vers leur dissemblable et donc pour eux l’adoption d’un type de mariage analogue au mariage déjà pratiqué par les hétérosexuels (que tout cela est pénible à écrire tellement j’entends la chute de tout ce qui a construit le peuple français) ; la possibilité pour un petit enfant d’être adopté par seulement deux pères ou par seulement deux mères ; par déjà la reconnaissance comme justifiée de recourir, sans contrainte sociétale, à la formule du « suicide assisté » qui n’est qu’un déguisement verbal de l’euthanasie… C’est si pauvre intellectuellement, si misérable spirituellement, tellement impossible à relier à ce qui a fait notre civilisation, notre culture, notre sensibilité et pour tout dire notre « dignité » : voici qu’elle se trouve bafouée ignoblement, jetée telle un cadavre puant aux égouts ! Oui, être français aujourd’hui devient soit une ignominie, soit une souffrance sans nom.