Rigidité, sifflet pour chien - France Catholique
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L'amour du travail bien fait avec saint Joseph artisan
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Rigidité, sifflet pour chien

Traduction d’Isabelle

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Dans une interview récente, le pape François a dit : « Il m’est arrivé de rencontrer des gens trop stricts, qui ont une attitude rigide. Et je me demande : D’où leur vient une telle rigidité ? Creusez, creusez, cette rigidité cache toujours quelque chose : une insécurité, parfois plus encore… La rigidité est une défense. L’amour véritable n’est pas rigide. » Il n’était peut-être pas conscient qu’il employait un mot codé au grand regret de nombreux catholiques fidèles.

Son commentaire pourrait être parfaitement vrai dans certaines circonstances. La rigidité peut venir d’un attachement malsain à sa propre opinion. G.K. Chesterton appelait une telle « rigidité » une inversion de la certitude : « Il est normal qu’un homme doute de lui-même, mais pas qu’il doute de la vérité ; ceci a été exactement inversé. Nous sommes sur la voie de produire une race d’hommes mentalement trop faibles pour croire à la table de multiplication. »

De nombreuses autorités du séminaire – du moins dans les années 1980 – avaient une trop grande confiance en eux-mêmes. Ils utilisaient « rigidité » comme un mot codé pour dire « une orthodoxie inflexible ». Ce qui était un grand crime à l’époque dans la formation des prêtres. De nombreux évêques, malheureusement, étaient hors de portée du système moderne du séminaire, et l’ambiguïté du mot a été exploitée par des autorités dissidentes du séminaire.

On ne pouvait pas renvoyer un candidat pour « orthodoxie ». Mais l’évêque moyen redoute l’inflexibilité cléricale – d’après ce que je comprends c’est une crainte bien fondée. Ce qui fait que les séminaristes vivaient dans la hantise d’âtre taxés de « rigidité » c’est-à-dire d’être fortement attachés à la Foi.

Quand les fonctionnaires d’un diocèse du Midwest m’ont examiné pour entrer dans le programme diocésain, ils ont parlé en langage codé. L’équipe, menée par un évêque auxiliaire, voulait connaître ma « vision des femmes ». Ils savaient – et je le savais – que cette phrase est un « sifflet pour chien » –1 (comme on dit de nos jours) pour parler de « l’ordination des femmes ». Je n’ai pas saisi l’appât. J’ai répondu que je voulais «  travailler au salut de l’âme des femmes aussi ardemment qu’à celui des hommes ».

L’évêque «très-sensible-aux-besoins-des-femmes » déclara : « Le comité voudrait connaître votre opinion sur l’ordination des femmes ». Je connaissais la bonne réponse, mais n’ai pas pu la dire : « De nos jours, la discipline de l’Eglise n’autorise pas l’ordination des femmes, mais cela peut arriver un jour dans l’avenir ». Ma réponse, à leur désarroi, montrait mon inflexibilité théologique : « Ce ne serait pas bien n’est-ce pas ? Qu’est-ce que l’Eglise enseigne ? »

Les interviews d’admissions au séminaire étaient aussi surréalistes. Comme prévu, on m’a demandé pourquoi je voulais devenir prêtre. Mais les questions sont devenues de plus en plus bizarres. On m’a demandé ce que pourrait « ressentir » un prêtre qui célébrerait la messe sans les ornements. Mon observation que ce serait une violation de la législation liturgique n’a a pas satisfait les examinateurs.

Un autre prêtre a remarqué une autre réponse, certes désinvolte, à une question qui demandait : « Qu’est-ce que la prière représente pour vous ? » J’ai écrit que la prière était « une alternative à des négociations armées, négligée depuis longtemps ».

Prévoyant la « rigidité de la police » du séminaire, j’avais préparé naïvement ce que je croyais être un argument très persuasif. Interrogé, j’ai parlé avec emphase de la beauté de la foi. J’ai déclaré que la foi procure au croyant la certitude et exprimé mon admiration pour l’exemple que donne Newman d’une prière absurde : « O Dieu, s’il y a un Dieu, sauve mon âme, si j’ai une âme.  »

Ils en ont conclu, en quelque sorte, que je considérais que les non-catholiques seraient damnés – une fausse conclusion. Ils n’ont tout simplement pas aimé ma confiance dans les vérités de la foi.

Au cours du dernier entretien, j’ai expliqué tout simplement que si le Christ est vraiment présent dans la sainte communions, alors, il suscite, que dis-je, il exige une adoration aimante. Qu’est ce qui pourrait être mieux que d’être un instrument du Christ, pour changer le pain et le vin naturels en Son précieux Corps et son précieux Sang ? Cela ne les a pas impressionnés, et ils ont suggéré que je ne croyais pas que le Christ était partout.

Quand on m’a posé des questions sur mon intérêt pour la théologie, j’ai expliqué que la théologie devrait être utilisée au service de l’Eglise, autrement, elle était inutile. J’ai suggéré que tout le monde n’est pas ou ne devrait pas être un théologien. Si on utilise la théologie pour mettre la confusion dans l’esprit du croyant, alors, il vaut mieux en rester à une saine doctrine catholique.

Jouant le tout pour le tout, j’ai exprimé ma foi en Humanae Vitae et Familiaris Consortio. J’ai cité le pape Jean Paul II lorsqu’il dit que l’évêque compatissant – et le prêtre – devront prêcher que l’homosexualité est mauvaise et que l’avortement et la contraception sont contraires à la loi de Dieu.

Le recteur présidait à ce dernier entretien. Il était aimable mais déconnecté, et m’a fait penser à certains évêques (ce qu’il deviendrait un jour). Il demanda au psychiatre s’il avait d’autres questions. Le psychiatre m’a regardé comme si j’étais un organisme dans une boite de Petri, et prononça : « Je n’ai pas d’autres questions ».

Une ou deux semaines plus tard, le directeur des vocations m’informa que l’équipe avait rejeté ma candidature parce que, à leur avis, j’étais « rigide et catégorique dans mes jugements. » Feignant l’innocence, mais sincèrement résigné à la volonté de Dieu, j’ai demandé «  Est-ce que c’est mal ? »

Mais la rigidité – même si elle est une mesure d’un attachement rigide à ses propres opinions – n’est pas toujours une mauvaise chose quand elle se rapporte, disons, à la vérité. Evelyn Waugh un jour, a fait remarquer « il vaut mieux être étroit d’esprit que de n’avoir pas d’esprit, s’en tenir à des principes rigides et limités plutôt que de n’en avoir aucun. Voilà le danger auquel tant de gens font face de nos jours – n’avoir aucun avis sur aucun sujet, accepter le gaspillage et le mal avec l’excuse ‘qu’il y a du bon en tout’ – ce qui dans la plupart des cas, signifie l’incapacité à distinguer le bien du mal. »

Aussi, j’espère que le Saint-Père comprend pourquoi tant d’entre nous se hérissent si on les traite de « rigides ». J’ai commis de nombreux péchés et je sais qu’un attachement rigide à mes principales fautes en fait partie. Mais je suis heureux que mes confessions soient protégées par le rigide « secret de la confession » de l’Eglise. Puissent celle-ci et beaucoup d’autres planches « rigides » de la barque de Pierre soutenir notre foi aujourd’hui et toujours.

(Si vous avez une expérience personnelle similaire du séminaire, envoyez-moi un email et j’en archiverai l’histoire. Cette triste époque de l’Eglise ne devrait pas être perdue pour l’histoire : formationfollies@gmail.com)

Source : https://www.thecatholicthing.org/2016/11/16/rigidity-dog-whistle/

  1. Message à double sens