Ravager l'Arizona - France Catholique
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Ravager l’Arizona

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Dans ces chroniques, nous sommes contraints par principe de rationnement à ne traiter qu’une affaire légale / morale à la fois. Et donc, dans l’intervalle, une crise a éclaté en Arizona concernant la législation sur la liberté religieuse.

La controverse a apporté le brouillard habituel de malentendus, aggravé cette fois par les comptes-rendus sur le projet de loi qui devenaient de plus en plus sinistres et grotesques à mesure que les critiques se libéraient de toute propension au silence et lisaient le projet lui-même.

Comme la « discussion » publique devenait de plus en plus démente, une partie de la classe politique républicaine a joué son rôle caractéristique : paniquant, s’énervant et faisant marche arrière. John McCain et Mitt Romney, récriminant comme jamais, ont exhorté le gouverneur à opposer son veto. Ce qu’elle a fait.

Quiconque lit le projet de loi en ayant conscience des problèmes agitant nos politiques reconnaîtra immédiatement ce qui a motivé les rédacteurs. Une préoccupation évidente pour les affaires de liberté religieuse impliquant le mandat Obamacare sur l’avortement et la contraception.

Ces affaires ont été mises en litige sous la loi de restauration de la liberté religieuse (RFRA), une loi qui oblige le gouvernement à encadrer plus étroitement ses mesures et nécessite « un intérêt supérieur » pour pouvoir restreindre les comportements dictés par un enseignement religieux.

L’Arizona avait déjà sa propre version de la RFRA. Le corps législatif avait d’évidence rédigé la loi pour soutenir les arguments qui avaient été présentés dans les tribunaux pour défendre la religion : à savoir, rendre clair qu’une entreprise ne perd pas son caractère religieux parce qu’elle prend la forme d’une société. Et donc la loi (SB1062) stipule qu’une « personne » porteuse, selon la loi, de droits religieux s’entend « d’un individu, d’une société en nom collectif, d’une institution… ».

En même temps, il y avait apparemment une préoccupation pour les gens ayant été sanctionnés pour s’être engagés dans des discriminations basées sur « l’orientation sexuelle » parce qu’ils ont refusé de prendre des photos ou de cuire des gâteaux pour des unions homosexuelles. Le projet de loi en Arizona cherchait à entraver l’action du gouvernement s’il cherchait à contraindre les gens à violer leurs convictions religieuses, que ce soit par l’application de lois ou de règlements, ou par conséquence de poursuites judiciaires intentées par des parties privées.

Quand John McCain et Mitt Romney ont pressé le gouverneur Brewer d’opposer son veto, étaient-ils conscients que le projet de loi soutenait les arguments présentés dans les tribunaux au nom de la religion ? Nous donnent-ils maintenant leur opinion réfléchie sur ces arguments, les jugeant indéfendables ? On soupçonne que ni l’un ni l’autre n’a réfléchi sérieusement sur ce sujet et même qu’ils n’en étaient pas conscients.

Il semble plutôt que ce qui les a fait agir était les accusations, aussi pompeuses que fausses, que le projet de loi a été inspiré par un désir de refuser des services aux homosexuels dans toutes les sortes de commerces. Ma propre hypothèse ici est que ces deux hommes ont eu le réflexe considéré comme sagesse dans un certain courant de la classe politique républicaine : éviter tout ce qui peut être considéré comme critique des homosexuels et de l’union homosexuelle de peur d’être traités d’intolérants.

Le point a été souvent fait en réponse à la critique du projet de loi que les hommes d’affaires sont déjà libres de refuser de traiter avec les homosexuels car il n’y a pas de loi en Arizona interdisant la discrimination basée sur « l’orientation sexuelle ». Mais bien sûr ce n’est pas ce qui a inspiré le projet de loi, et il n’y a eu aucun signalement d’hommes d’affaires désireux d’éviter de traiter avec les homosexuels, même s’ils peuvent savoir qu’ils le sont dès qu’ils passent la porte.

Et cependant, il était clair que le projet de loi était inspiré en partie par l’expérience de gens qui ont été sanctionnés pour leur refus de traiter des unions homosexuelles comme de vrais mariages. Par voie de conséquence, le projet de loi anticipait une situation où un décret local pourrait effectivement interdire la discrimination sur la base de l’orientation sexuelle, en assurant une certaine protection à la religion.

Mais cette possibilité apporte précisément le problème que nous avons vu avec la RFRA : la protection serait taillée pour les religieux sur la base des croyances qu’ils professent tandis que la loi s’imposerait à tous les autres. Un groupe de professeurs soutenant la loi a plus révélé qu’il n’en a prit conscience quand il a noté que les religieux devraient établir la « sincérité » de leurs vues.

Pourquoi le test de « sincérité » ? Réponse : parce que les professeurs ne veulent pas que la loi juge la matière des doctrines religieuses ou suggère faiblement que certaines prétentions au statut « religieux » sont spécieuses et peu vraisemblables. Est-ce que le terme englobe aussi les satanistes et l’Eglise du Spaghetti Volant ?

C’est le principal défaut de conception de la RFRA et il montre précisément la façon dont l’argument peut être battu en brèche dans les tribunaux : le gouvernement prétendra que les obligations de la loi s’évanouissent pour une catégorie de personnes appelée « les religieux » mais que toute personne peut proclamer sa propre religion, aussi inventive puisse-t-elle être.

C’est une formule pour le détricotage de la loi. Comme le juge Scalia l’a remarqué, « chaque conscience [devient] loi pour elle-même » dirigée par sa propre version de Dieu ou d’anti-Dieu. Beaucoup de nos amis comme tout un chacun peuvent voir comment tout cela va finir. Mais déconcertés par leurs échecs, ils se plongent dans le travail et foncent avec les mêmes arguments.

Hadley Arkes est professeur de jurisprudence à Amherst College.

photo : le gouverneur Jan Brewer

Source : http://www.thecatholicthing.org/columns/2014/razing-arizona.html