Quelle liberté de culte ? - France Catholique
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Quelle liberté de culte ?

Traduit par Bernadette

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Il n’y a guère de doute que durant ces dernières années, une hostilité contre la liberté religieuse a surgi dans notre culture populaire et dans celle de nos élites. Une fois que ces fiables alliés libéraux de la liberté religieuse, comme l’American Civil Liberties Union, se sont rendu compte que les sacramentaux de la révolution sexuelle étaient incompatibles avec les pratiques publiques des citoyens religieux et de leurs institutions, c’était un fait accompli que le soutien libéral pour les droits de ces derniers allait rapidement disparaître. Pour cette raison, la récente controverse au sujet du projet de loi de l’Arizona qui aurait mieux garanti la liberté religieuse de ses citoyens sous la férule de la version fédérale de la loi de restauration de la liberté religieuse (RFRA) a été dépeinte par les médias nationaux comme une tentative du gouvernement de l’Etat pour protéger les bigots anti-gays contre des poursuites judiciaires pour discrimination injuste. Bien que cette description, comme Hadley Arkes l’a récemment souligné dans ces pages, soit clairement fausse, cela fait mouche, précisément parce que la culture populaire et la culture des élites ne voient aucune conscience en dehors de la concupiscence. C’est pour cela que dans l’esprit séculier contemporain, la musulmane qui refuse d’enlever le voile qui lui couvre le visage pour réaliser sa photo du permis de conduire exerce seulement son « droit à se vêtir à son gré », tout comme Beyonce aux Grammy Awards. (NDT : elle portait une tenue provocante) Conséquemment, si vous ne pouvez pas réduire votre pratique religieuse à quelque droit bien visible à l’expression de votre personnalité, indépendamment de toute teneur et tradition religieuses, l’esprit séculier n’a pas de catégorie où placer vos convictions. Alors elles sont soit illusion soit quelque préjugé viscéral dont l’Etat a obligation de vous libérer. Cependant, quelques commentateurs, troublés par l’hostilité croissante contre la liberté religieuse, ont tenté de se consoler avec le fait que cette hostilité grandissante déclare quand même soutenir « la liberté de culte ». Cela veut dire que tant que les citoyens religieux restreignent leur liberté religieuse au culte – ces pratiques liturgiques qui prennent place dans une église, une mosquée ou une synagogue – on ne les dérangera pas. Ces commentateurs, bien sûr, ne sont pas ravis de ce rétrécissement de la liberté religieuse, car ils savent que cela signifie fort probablement la perte d’exemption d’impôt pour les institutions religieuses qui refuseront d’approuver certains comportements tout comme cela augmentera le nombre de cas où les croyants fervents devront choisir entre violer leur conscience ou violer la loi (ou l’éthique de leur profession : par exemple le médecin pro-vie qui devra envoyer des patients à un avorteur ou à un centre de santé procurant l’euthanasie). Je ne voudrais pas être le porteur de mauvaises nouvelles, mais les toutes dernières entorses à la liberté religieuses -celles qui concernent des boulangers, des photographes, des fleuristes, etc – sont en fait également des atteintes à la liberté de culte. Dans aucun de ces cas les services n’ont été refusés en raison de la religion, la race, le genre, la nationalité ou l’orientation sexuelle du client potentiel. Les fournisseurs ont refusé le service parce que le client potentiel exigeait qu’ils coopèrent à ce qu’ils considèrent comme une présentation illégitime, et parfois même une parodie d’un événement liturgique qui a une signification sacramentelle. Peut-être que le client, comme beaucoup d’Américains, ne voit pas la signification trancendante de l’événement, depuis qu’il identifie le mariage à l’admission à une fiction institutionnelle qui procure à celui qui y accède une poignée de privilèges sociaux et politiques qui n’est pas accordée aux autres liens affectifs. Alors, avec une telle compréhension des choses, il n’est pas surprenant que le client considère le refus du fournisseur comme un jugement négatif sur la légitimité de son union. Par conséquent, il est facile de voir pourquoi le client sera choqué par le refus du fournisseur. Mais ce que le client ne voit pas, c’est que sa demande ultérieure pour que le gouvernement oblige le fournisseur à revenir sur sa décision est en réalité une demande pour que le gouvernement oblige le fournisseur à renoncer à sa liberté de culte, la liberté de participer ou de ne pas participer à des cérémonies dont on pense qu’elles ont une signification sacramentelle. Considérez cet exemple. Une maison close de Nye County, au Nevada, où la prostitution est légale, cherche à se procurer les services d’une photographe locale. Elle aurait à prendre une photo de groupe pour illustrer la carte de Noël professionnelle de l’établissement. La photographe, profondément chrétienne, croit que Noël est un jour saint et que la prostitution est profondément immorale. Doit-elle avoir le droit de refuser de faire les photos ? Comme chacun sait, les principales religions, y compris le christianisme, prévoient des moyens par lesquels leurs adeptes solennisent certains moments de leur vie, chacun d’eux correspondant au passage à une autre étape. Pour cette raison, beaucoup d’entre nous marquent ces changements par des événements liturgiques tels qu’un baptême, une bar mitzvah, des noces, des funérailles et presque tout le monde considère ces événements comme des rites. Donc, si la liberté de culte n’inclut pas le droit de s’abstenir comme de participer à ces pratiques sans qu’intervienne une contrainte du gouvernement, comme l’ont suggéré certains commentateurs, dont Jonathan Merritt, alors nous ne devrions pas être plus confiants dans les perspectives d’avenir de la « liberté de culte » que dans celles de la « liberté religieuse ».
Source : http://www.thecatholicthing.org/columns/2014/what-freedom-of-worship.html
Francis J. Beckwith est professeur de philosophie et d’ecclésiologie à l’université deBaylor, où il est aussi co-directeur du programme d’études philosophiques de la religion. photo : le désert autour de Nye : pas de conscience en dehors de la concupiscence.