Prier pour notre liberté - France Catholique
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Van Eyxk, l'art de la dévotion
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Prier pour notre liberté

Traduit par Vincent de L.

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Le site Internet de la Conférence des évêques catholiques des Etats-Unis (USCCB en anglais) introduit la Quinzaine annuelle pour la Liberté : « Chaque année, les diocèses du pays organisent des évènements particuliers pour souligner l’importance de défendre la liberté religieuse. La Quinzaine pour la Liberté est du 21 juin – la veille de la fête de St John Fisher et de St Thomas More – au 4 juillet, Journée de l’Indépendance. » Telles que sont aujourd’hui les initiatives bureaucratiques du haut vers le bas, c’est une entreprise qui en vaut la peine. La prière en commun pour un motif important est généralement une bonne idée.

Mais il y a quelque chose de troublant dans l’idée de bergers envoyant les brebis prier pour les droits humains fondamentaux inscrits dans les lois de notre nation sans que les évêques eux-mêmes n’offrent d’action religieuse de même niveau.

Notre Déclaration d’Indépendance affirme une idée précise de la liberté : « Nous tenons ces vérités pour évidentes. Que tous les hommes sont créés égaux ; qu’ils sont dotés par leur Créateur de certains droits inaliénables ; que parmi ceux-ci figurent la vie, la liberté et la recherche du bonheur. » Le Premier Amendement de la Constitution des États-Unis garantit le libre exercice de la religion : « Le Congrès ne fera aucune loi concernant l’implantation d’une religion, ou en interdisant le libre exercice ; ou limitant la liberté de parole, ni de la presse ; ou le droit des gens à se rassembler pacifiquement, et à adresser une pétition au gouvernement pour réparation de griefs. »

De nombreux commentateurs préconisent un retour à une lecture et une compréhension originelles de la Constitution des États-Unis pour remédier à une ignorance étendue des Américains en matière d’instruction civique. C’est un noble effort mais ce n’est pas suffisant. Je me demande dans quelle mesure les fermiers, les pionniers, les commerçants – les gens ordinaires du 19e siècle -, étaient instruits en détail sur la Constitution. Pourtant, l’homme du commun, pour l’essentiel, vivait sans objection vis-à-vis des normes des lois qui découlent de la Constitution. Je soupçonne que la plupart des lois fondées sur la Constitution étaient reçues comme le « sens commun ». Et je pense qu’il y a une bonne raison à cela.

Les historiens et les juristes spécialisés dans la Constitution peuvent relier les influences des documents fondateurs aux racines judéo-chrétiennes de la nation (ce qui comprend la Magna Carta catholique anglaise). Mais tout chrétien croyant, même avec la connaissance la plus basique de l’Évangile n’est pas surpris par le lien presque sans couture des écrits des Pères fondateurs avec la Bible.

Les Pères fondateurs étaient tout à faits familiers des thèmes scripturaux de la vie, la liberté et la recherche du bonheur, de la bible du roi Charles : « Je suis venu pour qu’ils aient la vie et qu’ils l’aient en abondance » (Jn 10, 10) ; « Et vous connaîtrez la vérité et la vérité vous rendra libres » (Jn 8,32) ; « Si vous gardez mes commandements, vous demeurez dans Mon amour, tout comme Moi, J’ai gardé les commandements de Mon Père et Je demeure dans Son amour. Je vous ai dit tout cela pour que Ma joie demeure en vous et que votre joie soit parfaite. » (Jn 15, 10-11). On peut soutenir que la compatibilité des documents fondateurs de la nation avec les enseignements du Christ coulait de source pour les hommes ordinaires parce qu’ils y reconnaissaient le « sens commun » de l’Évangile.

Excommunication de l’empereur Frédéric II par Innocent IV [14e s.]
Biens sûr, la Guerre Civile a mis en relief certains des points de discorde – le pouvoir du gouvernement fédéral relatif à l’impôt, l’esclavage et les droits des États – mais si importantes que fussent ces questions, la Constitution demeurait remarquablement solide et (sans doute), une charte chrétienne pour une nation.

Aujourd’hui, avec l’essor de la laïcité militante, on ne peut tenir pour acquis une Constitution et une culture encadrées par la sensibilité chrétienne. Même nos élites (ainsi que le président Obama l’a démontré à maintes reprises) ne sont pas informés par l’Évangile au-delà de quelques lieux communs malléables.

La négation des racines judéo-chrétiennes de la Constitution fournit la raison alléguée et des « droits » anti-chrétiens sans fin (par exemple : l’avortement et le « mariage gay » sont fondés sur les mystérieuses « émanations de la pénombre de la Constitution. Par conséquent, on ne peut plus tenir pour acquis que la Constitution sera lue dans le cadre de ses racines et influences chrétiennes. Au lieu de cela, elle continue d’être lue sous l’influence d’idéologies modernes qui les combattent : utilitarisme, marxisme hégélien, pragmatisme, et ainsi de suite.

Promouvoir une lecture « originaliste » de la Constitution a certainement ses mérites mais les hommes d’église (catholiques et protestants) doivent de plus en plus encourager un retour à l’Évangile pour inculquer et rétablir un « sens de la foi » commun qui doit sous-tendre un « sens de la civilisation occidentale » correct. En bref, il temps de revenir aux fondamentaux.

La négligence de l’Union Européenne et même son rejet de ses racines chrétiennes (malgré l’avertissement de personnalités telless que Karol Wojtyla et Joseph Ratzinger) commence à rapporter des fruits amers. Pour le salut de notre pays, nous devons résister à la négation continuelle de notre héritage chrétien sous peine de souffrir le même sort qu’une Europe complètement laïcisée et – ça va venir très bientôt – islamisée. D’aucuns peuvent dire qu’il est trop tard, même pour nous, alors pourquoi s’en préoccuper ? Mais il n’est jamais trop tard tant que l’on peut encore se battre.

Donc, la « Quinzaine pour la Liberté » annuelle ne devrait pas être seulement un temps de prière des fidèles, ce devrait aussi être un temps d’action des pasteurs. La prière des fidèles devrait inclure une intention que nos pasteurs se conduisent en vrais bergers. Pourquoi pas prier pour que les évêques aient le courage d’excommunier par choix – par exemple pour avortement – les politiciens catholiques, pour commencer ? (En ce moment, les évêques n’ont rien à perdre sauf leur réputation dans la société policée, et peut être quelques subventions gouvernementales).

Une « Quinzaine de l’Excommunication » montrerait – avec une vraie charité chrétienne – à quel point les évêques prennent au sérieux la vie, la liberté et la recherche du bonheur éternel. Dans les années 1950, l’archevêque Joseph Rummel a bien servi le Commonwealth en excommuniant les catholiques ségrégationnistes de Louisiane. L’excommunication des politiciens catholiques pro-avortement serait un acte encore plus grand de bonne citoyenneté.
Dans l’intervalle, il reste disproportionné et même dégradant pour les laïcs d’être vus en train de mendier pour la liberté religieuse sans que leurs pasteurs partagent en quelque sorte leur douleur. Mais là encore, la Crucifixion est à peu près aussi dégradante qu’elle le paraît. Et Il a promis que Ses serviteurs ne seraient pas plus grands que leur Maître.

https://www.thecatholicthing.org/2016/06/08/begging-for-our-freedom/

Illustration : Excommunication de l’empereur Frédéric II par Innocent IV.

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Le père Jerry J. Pokorsky est prêtre du diocèse d’Arlington. Il est curé de l’église de Saint Michel Archange à Annadale, Virginia.