Pareil, mais pas la même chose - France Catholique
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Pareil, mais pas la même chose

Traduit par Pierre

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Un coup d’œil sur notre époque : l’équipe qui porte le titre de « Conseil Municipal de Washington » vient de publier deux projets de règlement, reflet de la mentalité locale de plus en plus dogmatique. L’un d’eux est « l’Acte de non-discrimination concernant les règles sanitaires de reproduction » [sigle en V.O. : RHNDA]. Ce texte irait bien au-delà des règles habituelles interdisant la discrimination relative à « l’orientation sexuelle » et interdirait la discrimination dans le domaine des « règles sanitaires de reproduction ». [NDT : cet euphémisme désigne les pratiques relatives à la contraception et l’avortement]. Une personne employée, par exemple, dans un organisme catholique ne pourrait être licenciée pour avoir avorté, et, pire, un enseignant serait à l’abri du licenciement s’il se livrait ouvertement à la critique et au rejet de l’enseignement moral de l’Église en ce domaine.

L’autre arrêté, intitulé « Amendement pour les droits de l’homme » annulerait et remplacerait l »Amendement Armstrong de 1989. Cet amendement avait pour but de protéger le droit des écoles confessionnelles du District de refuser la reconnaissance, les subventions, la propagande en faveur de l’homosexualité. L’Amendement Armstrong suivait la ligne tracée par le Congrès sur le District de Colombie, conformément à la Constitution. [NDT : le District of Columbia, territoire constitué autour de la Capitale Fédérale, Washington, a un statut particulier indépendant de tous les États.] Depuis plus de quarante ans il y a eu des arrangements pour les règles du District, mais le Congrès conserve son droit de veto à des arrêtés tels que ce « RHNDA », soumis à l’autorité nationale, et qui ne seraient jamais acceptés en tant que lois pour l’ensemble de la nation.

Pour les auteurs de ces propositions de lois, cet obstacle met en valeur non seulement le conflit mais aussi leur signification. Si ces propositions peuvent aboutir sans l’opposition du Congrès, qui exprime le sentiment conservateur encore vif dans le pays, on peut imaginer que les mêmes mesures pourraient être appliquées par des municipalités dans tout le pays où il est plus facile de propager les mentalités locales sous forme de règles.

Ces règles sont devenues trop familières actuellement, mais les circonstances ont évolué. Il y a trois ans, même les politiciens les plus chevronnés n’auraient guère imaginé que l’Administration Obama entrerait en conflit avec l’Église Catholique à propos des obligations sur l’avortement. Mais désormais les institutions catholiques sont explicitement désignées comme l’ennemi à abattre, un nouveau courant de pensée s’impose dans le monde politique.

Les opposants ont à juste raison tiré la sonnette d’alarme au sujet de la liberté de religion. Pour sûr, mais l’attaque contre la liberté portée par ces projets aurait naguère été repoussée par des arguments n’ayant nul besoin de faire appel à la religion. Ces arguments s’appuient sur la liberté pour une association privée de préserver légitimement sa propre intégrité.

D’autre part, les gens sont-ils légitimement fondés à soutenir le droit à l’avortement? Dans l’affirmative, ils doivent avoir le droit de s’associer avec d’autres personnes ayant la même opinion. Ils doivent avoir le droit de fonder une Association pour le Droit à l’Avortement, avec ses dirigeants et ses publications.

Imaginons qu’un(e) de ses dirigean(e)ts change d’avis et devienne « Pro-Vie ». Cette personne pourrait être exclue. Elle ne pourrait en appeler à ses droits selon le Premier Amendement — licenciement pour opinion politique. Son exclusion ne s’appuierait sur aucune loi qui interdirait son opinion. Et elle aurait parfaitement le droit de chercher ailleurs un poste compatible avec son opinion pro-vie.

Dans un cas rigoureusement analogue, les enseignants d’écoles catholiques ne seraient nullement privés de leurs droits selon le Premier Amendement s’ils étaient licenciés pour avoir critiqué l’enseignement de l’Église. Ce serait une atteinte au droit d’association des catholiques: leur droit de défendre l’intégrité d’une école privée vouée à l’enseignement catholique.
Bizarrement, ce raisonnement a été tenu — le camp adverse a été amplement averti que ce genre de législation saperait leur propre liberté de protéger des groupes voués à l’avortement et aux droits des gays. Ce qui ne les a nullement troublés.

À mon avis, le camp adverse ne prend pas au sérieux l’éventualité de la mise en œuvre de cet argument à leur encontre. Ou bien, ils ont depuis longtemps cessé de prendre au sérieux l’idée d’argumenter et d’exposer des « motifs ». En fait, pour les défenseurs du « mariage pour tous », se dire offensés par une simple invitation à en discuter est devenu leur truc pour échapper au dialogue. Ils considèrent que leur position est si bien assise qu’elle ne saurait encore faire l’objet de débats.

Là est le problème : pour le camp adverse une association qui rejette leur position sur les droits des gays et le droit à l’avortement ne saurait être considérée comme légitime. Et ils insistent sur le bon droit de leur opinion. Mais si, de notre côté nous ne contestons pas le fondement de cette déclaration — si notre camp ne s’élève pas contre les prétentions de cette politique — tout ce qu’on pourra faire sera un appel à une exemption fondée sur des motifs de « croyance religieuse », démarche possible seulement à titre individuel. Ainsi, notre camp est forcé, pour défendre ses intérêts, de renoncer à soutenir les fondements moraux de notre position.

Les sénateurs Ted Cruz (Texas) et James Lankford (Oklahoma) ont déja déposé une motion pour rejeter ces projets à Washington. Mais comment réagira la Chambre des Députés? Le simple ajournement de la discussion n’est guère une solution encourageante.

24 mars 2015.

Source : http://www.thecatholicthing.org/2015/03/24/the-same-thing-but-different/

Photo : L’entrée du Conseil du District de Colombie à Washington.