Où Jeb Bush rejoint John Kerry - France Catholique
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Où Jeb Bush rejoint John Kerry

Traduit par Yves Avril

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Pendant la campagne présidentielle de 2004, John Kerry, alors sénateur, qui s’identifiait comme catholique, donna son opinion sur les rapports entre la doctrine catholique et l’étendue de l’autorité de l’Eglise lorsque celle-ci publia un document exposant clairement ce que l’Eglise attendait des hommes politiques catholiques sur le sujet des unions entre personnes du même sexe. La partie du texte qui suscita particulièrement la critique de Kerry, en tant que candidat à la présidence, est la suivante : S’il est vrai que tous les catholiques sont obligés de s’opposer à la reconnaissance légale des unions homosexuelles, les hommes politiques catholiques sont obligés de le faire d’une manière particulière, dans le respect de leur responsabilité d’hommes politiques. Devant des propositions de lois en faveur des unions homosexuelles, les hommes politiques catholiques doivent tenir compte des indications éthiques suivantes Quand la législation en faveur de la reconnaissance des unions homosexuelles est proposée pour la première fois dans une assemblée législative, le législateur catholique a le devoir moral d’exprimer son opposition clairement et publiquement et de voter contre elle. Voter en faveur d’une loi si nuisible au bien commun est gravement immoral. Quand la législation en faveur de la reconnaissance d’unions homosexuelles est déjà en vigueur, l’homme politique catholique doit s’opposer de la manière qui lui est possible et faire connaître publiquement son opposition : c’est son devoir de témoigner de la vérité. Selon le rapport publié, en critiquant ces exigences, Kerry dit aussi :
 « il est important de ne pas avoir une Eglise qui donne des instructions aux hommes politiques ».
Il dit aussi que le document
« franchit de façon inopportune la ligne suivie dans ce pays. Le président Kennedy a tracé très clairement cette ligne en 1960 et je crois qu’il nous faut nous en tenir à cette ligne aujourd’hui… Nos pères fondateurs ont séparé l’Eglise et l’Etat en Amérique. C’est une séparation importante. c’est une partie de ce qui fait l’Amérique différente et spéciale, et nous devons la respecter au fur et à mesure que nous avançons et je suis prêt à me battre pour le faire. »
2015. Dans Laudato Si, l’encyclique du pape François sur l’environnement, le Souverain Pontife écrit :
 « Nombre d’études scientifiques indiquent que la plus grande part du réchauffement climatique est due à la grande concentration de gaz à effet de serre (dioxyde de carbone, méthane, oxydes nitrogènes et autres) libérés principalement par l’activité humaine. »
Interrogé sur l’encyclique, l’espoir républicain de l’élection présidentielle, le gouverneur Jeb Bush (qui, comme moi, a encore à lire le document dans son intégralité) a dit : 
« J’espère quand je rentrerai chez moi ne pas être puni par mon curé en disant que je ne reçois pas de leçons de politique économique de mes évêques ou de mes cardinaux ou de mon pape. »
Il dit aussi : 
« Et j’aimerais voir ce qu’il dit dans ce qui se réfère au changement climatique et quel rapport cela a avec ces questions plus larges, plus profondes avant de le juger. Mais je pense que la religion doit s’attacher à nous rendre meilleurs comme hommes et moins à des choses qui n’appartiennent qu’au domaine politique. »
En d’autres mots, pour citer Kerry, né catholique,
« il est important de ne pas avoir une Eglise qui donne des instructions aux hommes politiques ».
Car le faire c’est franchir
« de façon inopportune la ligne suivie dans ce pays ».
Il n’y a bien sûr aucun mal pour un catholique, même un homme politique, à poser respectueusement des questions sur des déclarations papales, spécialement lorsque ces déclarations s’aventurent dans des domaines où l’occupant de la chaire de saint Pierre n’est pas expert. Cependant le principe que le candidat Bush avance n’est pas seulement d’affirmer cette vérité banale. Il dit en fait quelque chose à un niveau d’abstraction beaucoup plus haut : que les affaires des politiques ne sont pas les affaires de la religion, ce qui rejoint complètement ce que disait le candidat Kerry en 2004. Mais le principe de Bush est faux de façon palpable. Les affaires politiques concernent le souci et le soin de la communauté, qui est faite d’êtres humains faits à l’image de Dieu. Pour cette raison, l’Eglise n’a pas seulement bâti des maisons où l’on adore, mais a créé écoles, hôpitaux, orphelinats, institutions charitables, et d’innombrables ordres religieux qui aident à accomplir ces missions. Le candidat Bush est-il réellement en train de promettre que, sous son admnistration, il ordonnera au gouvernement fédéral de se tenir complètement en dehors de ces projets catholiques et de les laisser s’épanouir, libres de tout contrôle d’Etat ? A-t-il discuté de cela récemment avec quelqu’un du HHS (Department of Health and Human Services : santé), de l’IRS (Internal Revenue Services : fisc),de l’EPA (Environment Protection Agency : environnement), du DOE (Department of Energy : énergie), de l’EEOC (Equal Employment Opportunity Commission : contrôle de la discrimination dans l’emploi) ? Ce qui est encore plus renversant dans l’affirmation de Bush , c’est que lui, comme le candidat Kerry, traite le Vicaire du Christ, non pas comme quelqu’un à qui il doit obéissance, mais plutôt comme une sorte de gourou dont il est libre de se débarrasser des suggestions s’il les trouve politiquement inopportunes. Mais si la religion doit nous « rendre meilleurs comme hommes », comme l’affirme le candidat Bush, et si la religion de quelqu’un exige obéissance à son Magistère, le candidat Bush n’est-il pas, par sa résistance à l’obéissance, en train de se refuser une occasion d’améliorer son propre caractère ? Peut-être est-ce la raison de la mise en garde que nous adresse l’auteur des Psaumes : 
« Ne placez pas votre confiance dans des princes, dans des mortels en qui il n’y a aucun secours » (146 :3 )
Source : http://www.thecatholicthing.org/2015/06/19/jeb-bushs-john-kerry-moment/
— – Francis J.Beckwith est professeur de philosophie et d’Etudes sur les rapports entre l’Eglise et l’Etat à la Baylor University, où il est également directeur associé du programme de licence en philosophie. Parmi ses nombreux ouvrages : Politics for Christians : Statecraft as Soulcraft (« Politique pour les chrétiens : l’art du gouvernement comme art spirituel »)