Oh, le diable, vraiment ? - France Catholique
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Oh, le diable, vraiment ?

Traduit par Bernadette Cosyn

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A trois reprises dans son discours au Déjeuner National Catholique de Prière, le cardinal Sarah a décrit l’idéologie du genre comme « démoniaque ». Plus récemment, l’archevêque Coakley, d’Oklahoma City, a usé du même mot en évoquant le même problème. L’évêque Paprocki de Springfield a dit de même de l’union homosexuelle. Un mot fort, c’est vrai. Mais beaucoup de gens ne comprennent pas pourquoi. Certains y voient une simple hyperbole. Pour d’autres, démoniaque signifie que ce n’est pas seulement mal mais vraiment très mal. D’autres y voient un jugement à l’emporte-pièce contre les opposants – on les diabolise. D’autres encore le prennent comme une exagération de religieux fanatiques, rien d’autre que des propos de déséquilibré.

Mais démoniaque n’est que l’évaluation posée de la pensée qui soustend l’idéologie du genre. Ce n’est pas un jugement des intentions des gens. Cela ne signifie pas que ceux qui promeuvent l’idéologie du genre sont possédés. Cela veut dire plutôt que le raisonnement et les résultats de cette philosophie – peu importe qu’elle soit prônée de façon innocente – s’aligne avec les désirs, les tactiques et les rancunes du « Grappin » lui-même.

L’idéologie du genre reprend le mensonge basique du Mauvais : « Vous serez comme des dieux. » (Genèse 3:5) Bien sûr, le mensonge se tapit derrière chaque tentation. Chaque péché procède de ce désir vaniteux de supplanter Dieu. Mais dans le domaine de la sexualité humaine, il a une extrême gravité.

Dieu crée ; l’homme est créé. Dieu donne l’existence ; l’homme reçoit son existence. L’idéologie du genre propose quelque chose d’autre : que nous soyons nos propres créateurs. Dans l’une de ses dernières allocutions (peut-être la plus importante), le pape Benoît notait :

Les mots du récit de la création : « mâle et femelle il les créa » (Genèse 1:27) ne s’appliquent plus. Non, ce qui s’applique maintenant c’est ceci : ce n’est pas Dieu qui les a créés mâle et femelle – jusqu’ici c’est la société qui le faisait, maintenant nous décidons pour nous-mêmes. L’homme et la femme comme réalités créées, avec leur nature d’être humain, n’existent plus. L’homme remet en question sa propre nature. A partir de maintenant, il est uniquement esprit et volonté. La manipulation de la nature, que nous déplorons de nos jours lorsqu’elle touche notre environnement devient un choix fondamental quand il s’agit de l’homme lui-même… Mais s’il n’y a plus de dualité homme/ femme préexistante dans la création, alors la famille n’est plus non plus une réalité établie par la création… Le Créateur Lui-même est nié et finalement l’homme lui-même se voit arracher sa dignité de créature de Dieu, créée à l’image de Dieu au plus profond de son être.

Et si nous ne trouvons pas nos corps conformes avec ce que nous avons décidé d’être, nous les altérons pour les mettre au diapason. Contre cette tendance, le pape François conseille : « ne tombons pas dans le péché d’essayer de remplacer le créateur. Nous sommes des créatures, nous ne sommes pas omnipotents. La Création nous est antérieure et doit être reçue comme un don. En même temps, nous sommes appelés à protéger notre humanité, et cela signifie tout premièrement de l’accepter et de la respecter telle qu’elle a été créée. (Amoris Laetitia, 56)

Il y a également la haine démoniaque du corps. « Tactique du Diable » de C.S. Lewis (Screwtape Letters) rapporte en détail le ressentiment du diable contre Dieu qui nous favorise nous, « ces bipèdes sans poils… [ces animaux] engendrés dans un lit. » Pourquoi cette haine ? Peut-être parce que chez l’humain corps et âme ne font qu’un. L’âme, qui a tant en commun avec la nature angélique, ne fait qu’un avec le corps, qui a tant en commun avec la nature animale. Le diable considère cette union comme une offense personnelle. Il cherche – nous l’avons tous expérimenté – à détruire cela, à nous éloigner de notre propre chair, de monter l’âme et le corps l’une contre l’autre. Il nous conduit de main de maître à adorer le corps un moment, et à l’abhorrer le moment d’après. La mort – séparation du corps et de l’âme – étant bien entendu sa plus grande victoire.

Il y a également le fait que le Verbe s’est fait chair. Cet immense acte de générosité de Dieu envers nous, âmes dotées d’un corps, a tout simplement aggravé la jalousie du diable. Le Fils de Dieu a assumé l’humaine nature, incluant un corps humain. Il nous a sauvé, non seulement dans ce Corps mais par ce Corps. Pourquoi cette dignité devait-elle nous être accordée à nous, qui sommes si inférieurs aux séraphins, et non à lui, le premier des anges ?

L’homme déchu est toujours en désaccord avec son corps. Le christianisme cherche à guérir cette division. L’idéologie du genre, elle, cherche à la codifier. Elle campe sur le principe qu’il n’y a pas de véritable relation entre le corps et l’âme. Leur désaccord est si absolu qu’une personne peut être physiquement d’une sorte et spirituellement de l’autre.

Profondément liée à cela, il y a la haine démoniaque de la procréation. Le diable ne peut pas procréer (=créer avec). Mais l’être humain le peut. L’homme et la femme coopèrent avec Dieu en amenant à la vie une nouvelle personne humaine. Le diable est jaloux parce que Dieu est généreux. Inévitablement, l’idéologie du genre rejette la complémentarité mâle/ femelle – et ce que leur union accomplit.

Le Seigneur prend les vérités naturelles – le corps, le mariage et la famille – et Il s’en sert comme patron et outils de Son ouvrage salvifique. Il est le Verbe fait chair, le jeune Epoux, le Fils de Joseph et Marie, Celui qui fait de nous des membres de la famille de Dieu. Nous saisissons la signification de l’offrande que Jésus fait de Son Corps sur la Croix et dans l’Eucharistie précisément parce que nous savons que le corps a de l’importance. L’union permanente, fidèle et procréatrice des époux nous rend capable de comprendre ce que cela signifie que le Christ est l’Epoux et l’Eglise Son Epouse.

La perte de ces vérités naturelles, au contraire, freine notre capacité à comprendre le caractère surnaturel et l’ampleur du salut. Si le corps humain n’a pas de signification intrinsèque – s’il ne dit rien de ce que nous sommes et peut être transformé à notre convenance – comment pouvons-nous démêler ce que signifient ces mots : « ceci est mon Corps » ?

Si nous n’avons pas d’expérience vécue de la complémentarité homme/ femme, époux/ épouse, alors nous ne pouvons comprendre le Christ Epoux donnant sa vie pour Son Epouse. Nous ne pouvons pas plus comprendre la signification de Dieu comme Père, de Dieu comme Fils, de l’Eglise comme Mère, etc. Il est de l’intérêt du diable de nous priver des signes naturels des réalités surnaturelles.

Bien évidemment, ces tendances démoniaques n’ont pas surgi brusquement tout d’un coup. C’est sa tactique habituelle. Nous l’avons vu à l’oeuvre dans la révolution sexuelle, la contraception, l’avortement, la fertilisation in vitro. L’idéologie du genre vient se greffer sur tout cela et le porter à un degré supérieur.

Reconnaître l’action du démon est peut-être utile. Mais cela devrait surtout nous porter à un examen de conscience – pour voir en quelles occasions nous sommes tombés dans ses filets : par nos petits actes d’auto-encensement béat (c’est vouloir se créer soi-même), par notre mépris ou notre mauvais traitement du corps (le nôtre ou celui d’autrui), par notre manque de chasteté (qui avilit le pouvoir de procréation), par nos atteintes à ce qui permettrait aux autres de venir à Dieu.

Certains d’entre nous peuvent percevoir l’action du démon dans l’idéologie du genre. Mais nous devons tous nous repentir pour la façon dont nous lui avons personnellement ouvert la brèche.

Le père Paul Scalia est un prêtre du diocèse d’Arlington (Virginie). Il est délégué de l’2vêque pour le clergé.

Illustration : Satan et les damnés dans « Le Jugement Dernier » de Giotto (1306) [chapelle Scrovegni à Padoue]

Source : https://www.thecatholicthing.org/2016/06/26/the-devil-you-say-2/