Le syndrome Malik Oussekine - France Catholique
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Le syndrome Malik Oussekine

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Est-il nécessaire de dire que la mort d’un jeune homme de 21 ans, Rémi Fraisse, sur le site controversé du barrage de Sivens dans le Tarn, constitue un drame, non seulement pour sa famille, ses proches, ses camarades de combat, et pour le pays tout entier ? On voudrait exorciser définitivement le risque de ce type d’accident, lié à des manifestations tendues à l’extrême. Les écologistes interpellent le gouvernement avec une grande dureté et celui-ci crie à l’instrumentalisation, tandis que la droite s’en prend à la responsabilité des Verts dans le cadre de leur stratégie de la tension. François Hollande a tenté d’apaiser le climat, mais rien de décisif ne sera obtenu tant qu’on ne connaîtra pas les causes réelles du décès du jeune homme.

Pour le ministre de l’Intérieur, il ne pouvait y avoir pire épreuve que celle-là. Car, depuis 1986, les responsables de la sécurité nationale vivent sous la menace d’une nouvelle affaire Malik Oussekine. C’était lui aussi un jeune homme, à peine plus âgé que Rémi Fraisse, et dont la mort, sous un porche d’immeuble de la rue Monsieur le Prince dans la nuit du 5 au 6 décembre, provoqua un véritable séisme politique. Éric Zemmour, dans son livre Le suicide français, refait le récit complet de l’événement en en tirant les leçons. Comme aujourd’hui Noël Mamère prend prétexte du drame pour stopper le projet de barrage de Sivens, sur le moment, Alain Madelin, ministre libéral, déclarait qu’aucune réforme ne méritait la mort d’un homme. En l’espèce, il s’agissait d’une réforme universitaire menée par Alain Devaquet, lequel disparut définitivement de l’échiquier politique.

J’ai des souvenirs précis de cette période comme journaliste en charge des questions universitaires, et il se trouve qu’au lendemain de la mort de Malik Oussekine je rencontrais François Furet, le célèbre historien de la Révolution française. Il revenait d’un séjour aux États-Unis et se montrait scandalisé de l’exploitation de cette affaire. Il est vrai que la sensibilité de l’époque n’était plus celle de la Révolution avec ses milliers de morts. Furet s’indignait qu’un gouvernement puisse abandonner une réforme de cette importance suite à un chantage moral. Zemmour note, de son côté, que la capitulation de Jacques Chirac, alors Premier ministre, se traduisit par son écrasement électoral à la présidentielle de 1988. On comprend l’embarras actuel de nos dirigeants.

Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 29 octobre 2014.