Le dialogue avec l’islam - France Catholique
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Van Eyxk, l'art de la dévotion
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Le dialogue avec l’islam

par Jean Étèvenaux © Acip
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Trois événements récents, entre autres, attirent l’attention sur l’islam. D’abord, la profanation de tombes musulmanes dans la nécropole nationale artésienne de Notre-Dame-de-Lorette. Ensuite, l’augmentation du nombre de fidèles musulmans dans le monde. Ensuite, la position sereine et équilibrée de Benoît XVI — complétée par l’attitude du roi d’Arabie saoudite.

148 sépultures ont été barbouillées méthodiquement dans la nuit du samedi 5 au dimanche 6 avril, avec des inscriptions s’en prenant directement à l’islam et au ministre de la Justice Rachida Dati, en un lieu déjà visé l’année dernière. La cérémonie interreligieuse qui s’est tenue lundi a marqué la solidarité des catholiques et des juifs face à ce qui constitue aussi une atteinte à la mémoire des combattants de la Grande Guerre. Cela montre malheureusement qu’il existe encore des individus qui ne respectent même pas la mort — comme ceux qui s’en sont pris, quelques heures plus tard, au cimetière catholique de Saint-Éloi à La Rochelle.

Une semaine plus tôt, le Vatican a annoncé, comme l’avait déjà fait l’an passé l’institut américain World Christian Database, que les catholiques venaient de passer, au niveau mondial, en deuxième position derrière les musulmans : 1,130 milliard de fidèles (17,4 % de la population mondiale) derrière 1,322 (19,2 %). Certes, avec toutes les autres confessions chrétiennes, il y a encore un tiers de l’humanité à se poser en disciple du Christ, mais le changement, dû surtout à une poussée démographique plus forte en terre d’islam, est révélateur — même si cela n’empêche pas des incertitudes, puisque le nombre de musulmans chinois oscille entre 20 et 120 millions…

L’opinion couramment établie qu’il n’y aurait pas de musulmans à devenir chrétiens a été battue en brèche par le pape lui-même, qui a baptisé le jour de Pâques le journaliste d’origine égyptienne Magdi Allam, qui a pris le prénom hautement symbolique de Christian. Le directeur de son journal, le Corriere della Sera, Giovanni Battista Vian, a expliqué : « Le geste de Benoît XVI est une affirmation modérée et claire de la liberté religieuse. Qui est aussi la liberté de changer de religion, comme l’a souligné en 1948 la Déclaration universelle des droits de l’homme […]. Ainsi, quiconque demande le baptême sans y être contraint a le droit de le recevoir. De même qu’il n’y a eu aucune amplification, il n’y a aucune intention hostile à l’égard d’une grande religion telle que l’islam ».
Preuve de l’attachement du Vatican au dialogue islamo-chrétien, L’Osservatore romano du 29 mars citait le roi Abdallah d’Arabie saoudite cinq jours plus tôt : « Nous avons perdu la foi dans la religion et le respect pour l’humanité. La désintégration de la famille et la diffusion de l’athéisme dans le monde sont des phénomènes effrayants que toutes les religions doivent prendre en considération et vaincre. […] Si Dieu le veut, nous commencerons à organiser des rencontres avec nos frères appartenant aux religions monothéistes, entre représentants du Coran, de l’Évangile et de la Bible. » À sa manière, le souverain entend donc participer au dialogue interculturel et interreligieux, lui-même ayant d’ailleurs, le 6 novembre dernier, rencontré Benoît XVI au Vatican.

Face à l’obscurantisme de ceux qui veulent des guerres de religion ou à l’incompréhension de ceux qui auront toujours peur de froisser leur interlocuteur en s’affirmant tels qu’ils sont, il y a donc la place pour une rencontre entre des croyants sincères dans leur foi et respectueux de celle de l’autre. Les nécessaires actions communes ne doivent pas empêcher le dialogue de fond et les interrogations qui, seules, permettent d’avancer.