Le coté sombre du progressisme - France Catholique

Le coté sombre du progressisme

Le coté sombre du progressisme

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Début Mars, j’ai eu le privilège d’assister aux plaidoiries du procès Whole Woman’s Health vs. Cole à la Cour suprême des Etats-Unis. Ce fut une expérience extraordinaire et étrange à la fois.

Les huit juges interrogèrent l’Avocat Général du Texas Scott Keller et l’avocat pro-avortement Stephanie Toti sur une loi du Texas de 2013 – adoptée en réponse aux révélations horribles de Gosnell et au procès à Philadelphie – qui exige que médecins d’avortement aient des privilèges d’admission dans les hôpitaux dans un rayon de trente mile autour du lieu où l’avortement est réalisé.

J’étais assis dans l’un des sept rangées de visiteurs, où la plupart des participants étaient pro-avortement. À ma gauche: Cecile Richards, la CEO du planning familial. Cinq minutes avant l’arrivée des juges, le principal conseiller du président Obama, Valerie Jarrett, est entrée et s’est assise en face de moi.

Le cas soumis à la Cour était de savoir si la loi du Texas impose un «fardeau excessif» aux femmes qui veulent avorter. Les interrogations croisées des juges progressistes étaient très cliniques. En fait, je n’avais jamais entendu le mot «avortement» si souvent utilisé de manière aussi détachée.

Par exemple, lorsque l’Avocat Général Keller a fait remarquer que la loi permettrait de sauver la vie des victimes d’avortements ratés, le juge Stephen Breyer a rejeté l’argument comme étant sans importance, car il n’y avait que 200 cas similaires sur 70.000 avortements au Texas chaque année.

La juge Sonia Sotomayor interpella sèchement Keller, en lui demandant ironiquement, «Le moindre avantage est suffisant pour peser sur la vie de millions de femmes. C’est votre avis ? » En d’autres termes, toutes les vies n’ont pas la même importance.

À la fin de cette session morbide, je me suis cru dans un tribunal eugéniste. Puis il m’est apparu que je ne devais pas en être surpris. Après tout, le mouvement progressiste moderne a été dominé par une élite auto-proclamée, comme plusieurs de ces juges, qui a du mépris pour les gens ordinaires. Au début du 20e siècle, ils ont même fait la promotion de politiques sociales et économiques dictées par des pulsions anticatholiques et antisémites.

Vous n’êtes pas obligé de me prendre au mot. Lisez le nouveau et excellent livre de Thomas Leonard, de Princeton, Les réformateurs intolérants : eugénisme racial et économie américaine à l’ère progressiste. Sous la bannière d’un «nouveau nationalisme», les progressistes appellent à un état administratif centralisé, géré par des gestionnaires experts et des planificateurs, qui auraient recours à des «méthodes scientifiques» pour améliorer le bien-être humain.

Estimant que le progrès social « requiert que l’individu soit contrôlé, libéré et développé par des actions collectives », les intellectuels progressistes perçoivent les personnes humaines comme «des morceaux de pâte humaine» devant être formés sur un « pétrin social. »

Ce formatage, souligne Leonard, devait être réalisé « par les meilleurs et les plus brillants, ceux qui, de manière unique, ignorent profit et pouvoir pour servir le bien commun – c’est-à-dire, les progressistes eux-mêmes. »

Ces experts dénient la notion de droits inaliénables. Leur héros, Woodrow Wilson, les a appelés «inepties». Les éditeurs de la revue progressiste, « la Nouvelle République », ont parlé du mouvement quand il a ridiculisé les libertés individuelles comme «pittoresques et rétrogrades ». Le leader juridique progressiste, Roscoe Pound (1879- 1964) auteur du « Contrôle social par la loi », a fait valoir que les dix amendements à la Déclaration des droits « n’étaient pas nécessaires à l’époque des fondateurs et ne sont pas souhaitables à la nôtre. »

Estimant que l’Etat a remplacé Dieu lui-même, les progressistes ont encouragé les représentants du gouvernement à embrasser l’eugénisme – « le contrôle social de la reproduction humaine » pour débarrasser la nation de ceux qui sont perçus comme indésirables.

L’eugénisme progressiste de l’époque, écrit Leonard : « requiert un accord sur trois choses seulement – la primauté de l’hérédité, la hiérarchie humaine plutôt que l’égalité humaine, et l’idée intolérante nécessaire que l’hérédité humaine doit être socialement contrôlée plutôt que d’être laissée au choix individuel. »

En 1911, le gouverneur du New Jersey, Woodrow Wilson, a signé une loi de stérilisation forcée visant «les classes irrémédiablement défectueuses et criminelles. » De nombreux États et municipalités ont suivi l’exemple de Wilson.

Dans les villes intérieures de l’Amérique, les progressistes anglo-saxons ont pris pour cibles les immigrants catholiques et juifs. Ils considéraient les immigrants d’Europe orientale comme des inférieurs qui «s’étaient éloignés de leurs supérieurs biologiques » et étaient d’accord (avec Wilson) sur le fait que les « races de faible niveau » pénalisaient les travailleurs américains authentiques en acceptant des salaires très bas.

L’historien progressiste Frederick Jackson Turner a accusé Italiens, Slovaques, Polonais et Juifs russes de transformer New York en réseau de canalisation drainant « les bassins de la misère de l’Europe. »

Puis il y a eu Eugene V. Debs qui disait que « l’immigré » travaillait pour une simple pitance parce qu’il vit « comme un sauvage ou une bête sauvage. »

Le Président du M.I.T. ,Francis Amasa Walker, un économiste, a décrit les catholiques et les juifs d’Europe de l’Est comme des «hommes battus de races abîmées, qui représentent les pires échecs dans la lutte pour l’existence. »

De nombreux progressistes ont soutenu les recommandations de la Commission Dillingham du Congrès (1907-1910), qui a été créée pour examiner le « problème de l’immigration.» Le rapport de quarante-deux volumes, totalisant 20.000 pages, que Theodore Roosevelt a approuvé, était une diatribe anticatholique, antisémite et eugéniste qui prétendait que les nouveaux immigrants étaient «moins qualifiés, moins alphabétisés, moins progressistes et moins assimilables » que les immigrants antérieurs des pays nordiques. Les résultats (que l’historien Oscar Handlin a considérés comme « ni impartiaux ni scientifiques ») a fourni les bases de la Loi sur l’immigration Johnson-Reed de 1924, qui limitait l’immigration d’Europe orientale et australe à 20.000 personnes, contre 700 000 par an auparavant.

En plus de devoir supporter des tests d’alphabétisation, la stérilisation forcée, l’avortement, et le contrôle du gouvernement de leur hérédité, les progressistes ont également appelé à un «salaire minimum» légal.

Ils ont cru qu’un salaire minimum dissuaderait «immigrants et autres êtres inférieurs d’entrer dans la population active» et ralentirait « les travailleurs inférieurs déjà employés». En d’autres termes, s’il avait le choix de l’embauche d’un Protestant natif ou un immigrant catholique au même salaire, l’employeur embaucherait sans doute le Protestant supérieur. Les inférieurs inemployables seraient internés, stérilisés, ou bannis à travailler dans des « colonies de célibataires » rurales.

Le côté obscur du mouvement progressiste, habilement décrit dans Les réformateurs intolérants aide à expliquer pourquoi Franklin Delano Roosevelt, un wilsonien ardent, a banni le terme « progressiste » et s’est qualifié lui-même de « libéral » quand il s’est présenté à la présidence en 1932.

Franklin D. Roosevelt a fui le mouvement progressiste parce qu’il connaissait « les champions intellectuels de l’État-providence qui proposaient de l’utiliser non pas pour aider ceux qu’ils dépeignaient comme héréditairement inférieurs, mais pour les exclure.»

Aujourd’hui, cependant, les nouveaux « progressistes » à la Maison Blanche et en campagne présidentielle font la promotion d’un agenda similaire à celui de leurs ancêtres, qui comprend la conformité idéologique, la suppression de la liberté d’expression et de la liberté religieuse, l’avortement illimité, et l’euthanasie.

Et s’ils gagnent en novembre, ils vont exercer un contrôle encore plus étroit sur les tribunaux fédéraux, qui imposeront l’ordre du jour progressiste par ordonnance judiciaire.

Source : https://www.thecatholicthing.org/2016/04/02/progressivisms-dark-side/

Photo : Woodrow Wilson.