Le choix de l’âme - France Catholique
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L'amour du travail bien fait avec saint Joseph artisan
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Le choix de l’âme

Traduit par Christophe

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« Je ne sais pas, dit-il, si j’ai la moindre objection précise à votre excellent plan de gouvernement. Ma seule objection est toute personnelle. C’est que, s’il m’était demandé si j’en ferais partie, je demanderais d’abord, si cela n’était pas permis, comme une alternative, d’être un crapaud dans un fossé. C’est tout. On ne discute pas le choix de l’âme. »

G.K. Chesterton ne pensait pas à la campagne présidentielle de 1904, lorsqu’il écrivait ci-dessus dans le roman The Napoleon of Notting Hill. Mais certaines choses ne changent jamais dans la politique démocratique.

Pourtant l’aristocrate nicaraguayen qui pousse ce cri du cœur est aussi en partie dans une ignoble retraite hors de l’arène dont il faut reconnaître qu’elle ne permet que des actes ignobles. Une telle dérobade doit alors être soigneusement ajustée, car la passivité peut rendre possible certaines énormités.

A l’autre extrême se trouve une attitude activiste que j’avoue moi-même ressentir – certains jours – parfaitement exprimée par la brillante Mollie Hemingway, qui fit remarquer, examinant notre paysage politique, dont elle espérait que tous ceux qui s’y impliquaient « meurent d’une manière horrible dans un feu.» (calmez vous ce n’est qu’une plaisanterie.)

Mais détruire l’endroit par le feu, ce que les protestataires réclamaient (avec un signe -interdit aux mineurs- pour « l’endroit ») après les acquittements de Fergusson, n’est pas une chose qu’un Chrétien (ou quiconque) ne devrait penser que ça puisse aider à résoudre les problèmes. Cela fait partie de ce retrait total de la politesse – ce mince vernis qui recouvre le chaos – qui sépare la civilisation de la barbarie. La politesse peut être un masque pour la lâcheté ou pour la faiblesse, c’est une certitude. Mais sans courtoisie, une réelle courtoisie, nous sommes au fond de la nuit, la guerre sans limites de tous contre tous.

Cela me met encore en colère.

Des démocrates mettent en avant une femme, une menteuse en série, une féministe auto-proclamée qui a cassé de nombreuses collègues à des fins politiques, une chasseresse idéologique d’ambulances qui suivra les votes n’importe ou, qui a compromis des secrets d’état et amassé une fortune en servant au sein du cabinet, pour partie par le biais de transactions secrètes avec des donataires provenant de nations étrangères.

Que ce soit clair. Je ne suis pas en train d’essayer de persuader quiconque en utilisant ces arguments. Je suis déconcerté que les gens ne le voient pas d’eux-mêmes. Et je me suis vraiment résigné à la réalité actuelle : les arguments et les faits ne font qu’alimenter encore les passions destructives. Lorsque moi-même ou quelqu’un avance ses arguments, l’ad-hominem commence – vous savez, attaquer l’orateur personnellement, c’est la première chose dont on vous a dit que ce n’est pas une manière correcte d’argumenter dans les équipes de débats à l’école secondaire.

Et parmi ces énigmes : pourquoi les critiques de Donald Trump sont-ils accusés d’être des néo-conservateurs, des outils des média libéraux ou de l’establishment républicain ? Pour ne prendre que moi-même en tant que mouton noir, je me suis attaqué aux médias libéraux, par écrit ou sur les ondes, ce depuis des décennies à Washington (vous pouvez vérifier), et il ne m’est jamais venu à l’esprit d’adhérer au parti républicain.

Je me suis toujours considéré en tant que paléo-conservateur (mes amis savent que c’est parfois avec exaspération). Paléo rime parfois avec néo, mais pour en désigner globalement la différence : les paléos sont sont moins motivés par l’économie, la sécurité nationale et « la liberté », que par la famille, l’église, la communauté, la culture, localement – les choses pour lesquelles économie et politique existent quoi. Bien qu’originaire du Connecticut (comme dans Yankee), ma sympathie se dirige spontanément (pas sur tous les points évidemment) vers des groupes tels que les Southern agrarians. Il arrive parfois que les Néos et les Paléos aient des points communs, parfois non.

La colère de la classe ouvrière n’est pas non plus une abstraction à mon point de vue. J’ai grandi dans un ghetto ouvrier d’obédience catholique. La famille, l’église, la communauté, la région y avaient une réelle signification. Les membres de ma famille de ma génération en sont globalement d’accord. Leurs enfants eux ne le sont en général pas. Ils ne se marient pas, ont eux même peu ou pas d’enfants, se fourvoient dans les drogues, montrent peu d’attachement à le foi et à la communauté.

Mes deux parents avaient une demi douzaine de frères et sœurs. En grandissant, cela ne m’est jamais venu à l’esprit que les deux côtés de la famille pourraient disparaître en une génération. Encore que le nom Royal, dans son incarnation actuelle, aurait disparu dans quelques années si mon fils Jean-Paul et son épouse n’avaient pas eu Jean-Robert Royal.

Notre catastrophe sociale a de nombreuses causes : l’échec des parents, des églises et des écoles, des changements dans le travail ouvrier, la désastreuse décomposition de la famille dans la suite de la révolution sexuelle et, ce qui n’est pas la moindre, l’irresponsabilité de Washington. Il y a des tas de fautes à constater et plein de travail à faire pour rétablir des pans complets de la société américaine.

Je me rends au bureau de vote local en novembre. J’habite en Virginie, un État-charnière important ou de grands enjeux politiques se déroulent : sénateur, mairie, État et questions locales.

Je ne vais pas me laisser aller à des jugements catégoriques : cela consisterait à céder aux passions du moment que je trouve mortellement dangereuses. Mais si les choses se poursuivent telles qu’elles sont – et il est toujours possible que le Très Haut nous épargne ce qu’ils ne feront pas- Je pense que la meilleure chose à faire serait de ne pas voter aux présidentielles. Ou alors de m’inscrire pour un candidat sensé et pas seulement investi dans le faire.
Ce ne sera pas un vote gaspillé. Gaspiller un vote c’est penser que choisir l’un ou l’autre des favoris actuels est une chose responsable à faire.

J’entends constamment que ceux qui choisissent de ne pas voter n’ont aucun droit de se plaindre. Ou – dans la jargon des années 60 – ne pas décider est une décision. Mais « rien de tout cela » n’est une décision. Je ne choisis pas de mourir comme un crapaud dans un fossé, ou de détruire par le feu. Donc à moins que quelque chose – cela nécessiterait probablement une intervention divine – ne me convainque d’agir autrement, il est probable que je laisse le reste aux mains de la Providence.

2016 : Tweedle-Dee and Tweedle-Dum (cf. Alice au pays des merveilles).

https://www.thecatholicthing.org/2016/03/07/the-choice-of-the-soul/