La justice et les passions - France Catholique
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Van Eyxk, l'art de la dévotion
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La justice et les passions

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Il n’est nul besoin de vouloir prouver l’importance du pouvoir judiciaire. La démonstration, ou plutôt la monstration, est patente tous les jours dans l’information. Ce pouvoir de juger, dont je rappelais hier que Montesquieu le considérait comme terrible, est au centre de notre vie sociale. Et, de nos jours, il est de plus en plus associé à la vie politique. C’est à juste titre que beaucoup remarquent que les deux calendriers, judiciaires et politiques, se chevauchent de plus en plus. Comment pourrait-on, dès lors, chasser le soupçon que le juge est lui-même un agent politique ? Les camps qui s’affrontent comptent sur la justice pour affaiblir l’adversaire et plus encore l’éliminer. Il suffit de lire les éditoriaux en ce moment. Certains s’apparentent à des pelotons d’exécution autorisés à faire feu sur le champ, pour que le verdict programmé soit mis en œuvre.

Bien sûr, il ne faut pas confondre l’instrumentalisation de l’institution avec son exercice très codifié, son appareil conçu pour la sérénité, l’équilibre de l’accusation et de la défense dans le respect des procédures. Mais c’est encore Montesquieu qui notait : « La justice élève sa voix ; mais elle peine à se faire entendre dans le tumulte des passions. » Et il arrive au tumulte d’envahir les prétoires. Les magistrats sont parfois suspects de passions et il leur arrive de donner des arguments aux suspicieux. Voire le trop célèbre mur des cons. C’est qu’il ne faut pas idéaliser ou se retrancher dans des formules toutes faites, comme « je fais confiance à la justice de mon pays ». Chaque affaire est l’occasion pour elle, la justice, de faire ses preuves et de confirmer en acte sa légitimité.

On apprenait hier que le parquet général faisait appel de l’acquittement de Nicolas Bonnemaison. Il y a quelques jours seulement le verdict d’acquittement de ce dernier était bruyamment applaudi, contre toute décence. Voilà bien une preuve que la justice est capable de faire entendre sa voix à l’encontre du tumulte des passions.

Chronique lue sur Radio Notre-Dame le 3 juillet 2014.