L'espace sans Dieu - France Catholique
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L’espace sans Dieu

L’espace sans Dieu

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L’œuvre de C.S. Lewis mise à part, pourquoi la sience-fiction voit-elle si rarement de la religion dans le futur ?

C’est vrai quelques écrivains ont trouvé charmant d’envoyer des touristes du futur au milieu du sermon sur la montagne, comme dans Up the Line, de Robert Silverberg, où un personnage dit : « La foule est de plus en plus dense chaque fois que je viens ». Mais je n’ai en mémoire aucun film ou roman où, dans 1000 ans alors que les cow-boys de l’espace parcourent la galaxie en fusée – ou à notre époque dans un univers parallèle – il y aurait un mot de vénération prononcé à propos du Père, du Fils et du Saint-Esprit.

On semble insinuer que, alors que nous « progressons » dans le temps, nous larguons les antiques notions judéo-chrétiennes, que les rencontres avec des mondes extra-terrestres sont ipso facto la preuve que nos cosmologies sont des vestiges culturels de peuples menés par l’anxiété, terrifiés à l’idée d’être seuls. Alors que dans un univers convenablement peuplé – rempli de créatures sans Bible, avec des gens à qui l’Evangile n’a jamais été annoncé, avec des lieux où le Sauveur n’est jamais venu – toutes les idées de clocher se dissolvent dans un trou noir de relativisme.

Je me rappelle un épisode de Strar Trek dans lequel Kirk et son équipage étaient sur une lointaine planète où les gens parlaient avec révérence du Soleil – ou du moins c’est ce que croyait l’équipage de l’Entreprise, jusqu’à ce qu’il prenne conscience que le mot était Fils (NDT : en anglais, sun, le soleil, et son, le fils ont des prononciations très proches). On en est loin.

Maintenant, l’écriture et le cinéma mettent les arts à l’épreuve, et les auteurs de science-fiction et les scénaristes ont assez à faire pour créer d’autres mondes – parfois avec de nouveaux langages, toujours avec de nouvelles technologies – pour ne pas avoir à se préoccuper du fait que la religion a été, est actuellement, et sera sûrement toujours au coeur de la civilisation, même desséchée par le scientisme.

Lewis et J.R.R. Tolkien ont introduit le christianisme dans leurs livres, quoique sous forme allégorique ; ignorer complètement la religion n’a pas de sens.

Il y a, bien sûr, la série de Philip Pullman « His Dark Materials » (A la croisée des mondes, en version française), qui est à la fois athéiste dans l’ensemble et explicitement anti-catholique, mais qui au moins reconnaît l’existence de la religion. Et, avant que je ne l’oublie, il y a le livre explicitement catholique – bien qu’hétérodoxe – du tourmenté Walter Miller : Un cantique pour Leibowitz. Mais il y a peu d’autres livres/films de science fiction qui supposent la pérennité du christianisme.

Il y a souvent des êtres divins avec leur propre culte, presque toujours malveillant. Mais le Verbe de Dieu éternel ? Les lecteurs peuvent citer toute exception littéraire ou cinématographique. (Par pitié, pas la « force » de Star Wars.)

En ces jours-ci, beaucoup de romanciers et de cinéastes de science-fiction se préoccupent aussi de puiser des aspects dans ce qu’il est convenu d’appeler la guerre culturelle. Quelles qu’en soient les raisons, ils ont vu l’avenir et il est athée. C’est la loi de la contre-utopie.

D’un autre côté… il y a dans presque tous les films de fantasy (qu’ils prennent place dans l’espace ou la Comté) une aspiration à la téléologie. Comme l’a dit Saint Paul : « En effet, depuis que Dieu a créé le monde, ses qualités invisibles, c’est-à-dire sa puissance éternelle et sa nature divine se voient fort bien quand on considère ses oeuvres. Les humains sont donc inexcusables. » (Rom. 1:20)

Vous pouvez voir cela (l’ordonnancement en vue d’un terme approprié) dans le film opéra dans l’espace inspiré d’une bande dessinée Guardians of the Galaxy (Gardiens de la galaxie), qui d’ailleurs est aussi drôle qu’un film puisse l’être. Bien sûr, vous devez avoir envie de vous amuser pour l’apprécier pleinement.

Maintenant, un avertissement comme ils disent : vous avez déjà vu ce film avant – bien souvent. Les écrivains James Gunn et Nicle Perlman ont investi bien peu de précieuse imagination pour élaborer l’intrigue : à la base, c’est Star Wars ou Les sept samouraïs ou une douzaine d’autres films plus ou moins performants et créatifs dans la catégorie « sauvons le monde » (ou le village).

Ce qui rend Guardians si divertissant, c’est sa paix, son humour et ses performances.

Un petit aperçu : un garçon nommé Peter Quill est projeté depuis la Terre dans une galaxie lointaine et il grandit pour devenir brocanteur intergalactique. Tout va bien pour lui jusqu’à ce qu’il mette la main sur un morceau du Big Bang ou quelque chose d’approchant – comme dans le MacGuffin d’Hitchcock : la chose que tout le monde veut.

L’acteur Chris Pratt est charmant dans le rôle de Quill. Il accepte un groupe d’extra-terrestres inadaptés : un raton-laveur ( voix de Bradley Cooper), un arbre animé (voix de Vin Diesel) un guerrier tatoué (interprété par Dave Bautista) et une belle fille verte jouée par Zoe Saldana, autrefois bleue dans Avatar, qui est parfaite.

Et alors qu’au début chacun cherche la célébrité, la fortune ou la vengeance pour raisons personnelles, ils joignent finalement leurs forces dans une bataille pour sauver la galaxie des griffes d’un vaurien destructeur de mondes appelé Ronan (le délicat Lee Pace, ici totalement perdu dans un costume du genre Darth Vader).

Nos gardiens jadis égocentriques risquent en toute conscience le sacrifice ultime dans l’espoir de sauver des milliards de créatures qu’ils ne connaîtront jamais et qui elles-mêmes ne les connaîtront pas. Que les scénaristes ou le directeur (le susnommé M. Gunn) le reconnaissent ou non, le sacrifice de soi, ce courage, cet amour surgissent rarement dans le vide – je parle du vide moral, pas de celui de l’espace.

Mais est-ce que ça tuerait Hollywood (incluant les auteurs, les artistes et les encreurs de BD) d’avoir rien qu’un seul personnage qui s’agenouillerait devant un crucifix et ferait le signe de croix ? Croient-ils réellement que Jésus sera oublié dans le futur ou sera ignoré dans un univers parallèle ? Croient-ils que Dieu n’est pas Unique ? Qui a fait Quill et Ronan, Gepetto le menuisier, le docteur Folamour ?

La meilleure littérature s’est toujours emparé des questions fondamentales, et c’est une manifestation d’imagination de troisième ordre que ça soit si rarement le cas dans la science-fiction.

Et, s’il vous plaît, que nul ne voie la moindre corrélation avec l’enfant de 2001, l’Odyssée de l’espace de Kubrick. On risque de voir beaucoup moins cette élucubration de la nouvelle époque que ce que l’œil aurait pu saisir.

NB : Comme d’habitude, Hollywood n’a pas foi en la Foi, mais a le culte de la violence : Gardiens de la galaxie en regorge. Cependant, ce n’est pas le déluge d’hémoglobine. Pour plus de 13 ans.


Brad Minor est rédacteur en chet de The Catholic Thing, membre de l’institut Foi et Raison et membre du conseil de l’Aide à l’Eglise en détresse aux USA.

illustration : Zoe verte et bleue

source : http://www.thecatholicthing.org/columns/2014/godless-space.html