Fillon le tenace - France Catholique

Fillon le tenace

Fillon le tenace

Grâce à la mobilisation du « peuple de droite » François Fillon a sauvé sa candidature, au grand dam des hiérarques de son camp. Peut-il maintenant aller jusqu'au 2e tour ?
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Au matin du 1er mars, le milieu médiatique se perdait en rumeurs et supputations. François Fillon, qui devait venir au Salon de l’Agriculture, reportait sa visite et annonçait une conférence de presse. Le candidat allait-il annoncer le retrait de sa candidature ? Non pas. Il s’agissait d’annoncer une convocation le 15 mars par les juges d’instruction en vue d’une mise en examen, dans le cadre des affaires dites des « emplois fictifs » et de confirmer que le cap était fermement maintenu : « Je ne céderai pas. Je ne me rendrai pas. Je ne me retirerai pas. J’irai jusqu’au bout parce qu’au-delà de ma personne, c’est la démocratie qui est défiée. »

Puis le candidat s’en fut visiter le Salon de l’Agriculture avec quelques heures de retard.

Pourtant, le 26 janvier sur TF1, François Fillon avait déclaré qu’« une seule chose » pourrait l’empêcher d’être can­didat : « C’est si mon honneur était atteint, si j’étais mis en examen. » La raison invoquée pour ce retournement ? L’acharnement des juges qui « assassinent » le candidat Fillon et du même coup la démocratie. La contre-attaque du vainqueur de la primaire de droite est virulente mais dans son propre camp et dans son proche entourage certains se disent choqués. Le premier, Bruno Le Maire annonce que, par « respect pour la parole donnée », il démissionne de ses fonctions à l’état-major du candidat. C’est le coup d’envoi d’une série de démissions qui s’accumulent toute la fin de semaine. Sébastien Le­cornu, directeur-adjoint de la campagne du candidat, mais aussi le directeur de campagne, Patrick Stefanini et le porte-parole de François Fillon, Thierry Solère, l’organisateur de la primaire…

Au choc provoqué par l’annonce de la mise en examen, s’ajoute la désapprobation de la manifestation décidée par François Fillon pour le dimanche 5 mars sur la place du Trocadéro. Certains y voient une inacceptable manifestation contre l’autorité judiciaire, d’autres une démonstration inopportune alors que le pays est en état d’urgence… Emportés par leur lyrisme, d’aucuns iront jusqu’à évoquer le 6 février 34… A la télévision, quelques maires annoncent qu’ils envoient au Conseil constitutionnel leur signature pour Alain Juppé… et la presse fait état de plus de deux cents cadres des Républicains et des centristes de l’UDI qui se sont retirés de la campagne.

Rien n’y fait. Le 5 mars, sous une pluie battante et par un vent parfois glacial, les militants et sympathisants venus de toute la France convergent place du Trocadéro et s’assemblent, calmement, sous un pâle soleil, devant l’estrade dressée devant le parvis des Droits de l’homme. Ils sont entre 45 000, selon la police, et 200 000 selon les organisateurs. Quoi qu’il en soit, c’est un exploit pour un événement organisé en seu­lement 3 jours, et le signe que le « peuple de droite » ne s’en laisse pas compter par le monde politico-médiatique.
Après avoir reconnu, ses erreurs et sa « part de responsabilité » dans « l’épreuve », François Fillon réaffirme, sous les acclamations bon enfant et devant les drapeaux tricolores agités, que la campagne continue. Il répétera, le soir même sur France 2, que « personne ne peut aujourd’hui [l’] empêcher d’être candidat ». C’est un avis lancé à Alain Juppé, qui a rencontré Nicolas Sar­kozy, qui est « le plan B » espéré par tout l’establishment de la droite et du centre, mais qui va annoncer finalement, lors d’une conférence de presse à Bordeaux le 6 mars au matin, qu’il ne se présentera pas car il est à ses yeux « trop tard ».

Le soir même, les cadres de LR étaient convoqués pour étudier les conséquences de ce feuilleton. La chance d’une victoire de la droite leur semblait s’éloigner… Une vaste recomposition s’annonce à droite comme à gauche et cette campagne présidentielle est devenue un objet non identifié qui lamine toutes les prétendues expertises politiques.