Apocalypse en vue - France Catholique
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L'amour du travail bien fait avec saint Joseph artisan
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Apocalypse en vue

Traduit par Bernadette Cosyn

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Dans les années 90, mon fils de 12 ans et moi-même priions le chapelet tous les soirs durant l’interminable chômage de son père. C’était durant les années qui ont précédé le changement de millénaire, quand le bogue de l’an 2000 et ses conséquences apocalyptiques hantaient les esprits. Les semaines s’allongeaient en mois et aucun emploi n’était en vue. Un soir, mon fils me dit : « Je crois savoir pourquoi Dieu n’a pas trouvé un travail pour Papa. Peut-être que la fin du monde est sur le point de se produire et qu’il n’a donc pas besoin d’emploi. » J’ai souri et j’ai dit à mon fils : « Bravo garçon ! regardons le bon côté des choses ! »

N’étant pas optimiste de nature, je doute que nous puissions compter sur l’imminence de la fin du monde pour remédier aux temps de plus en plus sombres dans lesquels nous entrons suite à la légalisation du mariage homosexuel imposée à tous les états par la Cour Suprême. Émotionnellement, cela semble bien être la fin du monde – du moins du monde tel que nous le connaissons. L’Amérique et ses alliés « éclairés » s’enfoncent de plus en plus dans un monde de confusion sexuelle et d’enfants privés de parents.

Ceux qui s’opposent à ce nouvel ordre ont des chances d’expérimenter le pénible procédé d’être décrit par l’idéologie régnante comme s’accrochant de plus en plus aux limites légales des actions et expressions permises. Honnêtement, une part de moi préférerait encore une sortie rapide via la guillotine — ou l’irruption dans nos affaires d’une légion d’anges sonnant les trompettes du Jugement Dernier. Si j’étais Dieu, c’est le moment que je choisirais pour revenir dans la Création.

Mais bien sûr, je ne suis pas Dieu, et mes propres réactions ont plus à voir avec la peur et les faiblesses morales et émotionnelles humaines qu’avec un savoir prophétique. En réalité (toujours parce que je suis pessimiste) il est peu probable que nous voyions sous peu une confrontation finale sur la plaine d’Armageddon — bien que nous ignorions le jour et l’heure.

Tout au long de l’histoire, beaucoup de gens vivant des événements terribles ou des catastrophes naturelles comme la Peste Noire en ont conclu qu’ils vivaient les derniers temps. Dans la sphère morale, une corruption extraordinaire et répandue a atteint fréquemment un niveau tel que cela semblait suffisant pour appeler le feu du ciel, si pas même la fin de l’humanité. Considérez les habitudes suicidaires et extravagantes de la fin de l’Empire Romain, l’holocauste nazi, nos amoncellements colossaux d’embryons et de fœtus avortés, les crimes totalitaires de l’Union Soviétique, de la Chine Communiste, du Cambodge de Pol Pot, de l’actuelle Corée du Nord, pour ne citer que quelques exemples.

Quoique l’histoire du mal en l’homme doive nous inciter à la circonspection en ce qui concerne les scénarios apocalyptiques, cela ne veut pas dire que la réaction face à l’arrêt Obergefell des catholiques américains vraiment croyants n’est qu’égocentrisme de pays industrialisé. Après tout, les vainqueurs de la bataille pour corrompre l’idée et la définition du mariage sont maintenant libres de tourner leur hostilité contre les bienfaits quotidiens, le bien-fondé et la fertilité sans faille du vrai mariage que sont le soin des enfants et le sanctuaire de la famille.

Il y a quelque chose de diaboliquement nouveau dans la destruction réussie d’une institution organique si fondamentale et inventive pour des raisons si stériles, égoïstes et perverses. Il y a eu des exemples isolés au cours de l’histoire, particulièrement dans les échelons supérieurs des sociétés les plus corrompues. S’approprier par la loi l’institution qui a été le fondement de toute société humaine, non pas au nom de l’obstination d’un tyran ou au nom de la contrariété éprouvée par un puissant à vivre la normalité ensoleillée du mariage et de la vie de famille, mais aux noms usurpés de l’Amour, de l’Équité et de l’Égalité, c’est quelque chose de nouveau sous le soleil.

Je ressens la nécessité de souligner l’étrangeté de ce qui s’est passé, parce que, comme toute affaire « réglée », le mariage homo se transforme déjà dans l’esprit de beaucoup en quelque chose de normal. Ce dont nous avons besoin, c’est de la contemplation répétée des sources du vrai mariage et de la famille – pas seulement telle que présentées dans la théologie mais aussi dans l’art, le roman, le cinéma et les écrits du passé. Comparer de telles sociétés à celle à laquelle nous sommes confrontés maintenant peu contribuer à nourrir peu à peu une opposition à l’ordre nouveau de plus en plus coûteuse.

Parmi les personnages du Monde de Narnia, de C.S. Lewis, j’éprouve une affection particulière pour Puddleglum, l’allié morose mais fidèle du prince Rilian dans Le Fauteuil d’Argent. Bien que sans cesse à prévoir mort et catastrophes, il les affronte à chaque fois pour défendre ce qui est juste.

A ce point de notre histoire, nous pourrions prendre une page de la réaction de Puddleglum quand la Sorcière essaie de les persuader, ses compagnons et lui, alors qu’ils sont prisonniers du sombre monde souterrain de la Sorcière, que leurs souvenirs de la vie normale sous le soleil ne sont que des fantasmes. Puddleglum tient bon contre le courant de douter de ce qui est bon, normal et sain. Il rejette la tentation diabolique de se contenter de la grande illusion : « Supposons que cette fosse sombre de royaume qui est vôtre soit le seul monde existant. M’est avis que c’est un bien triste monde. » De même, le paradis terrestre du mariage homo ne semble capable de produire que les fleurs les plus nauséabondes et les sociétés les plus maladives.

Ainsi, la grande tentation en cours – à laquelle beaucoup ont succombé, tant hors que dans les Églises chrétiennes – sera de raboter les angles de cette compréhension alternative du mariage afin qu’elle devienne finalement supportable et acceptable comme compromis social. Ce serait une énorme erreur. Plutôt offenser les standards fait maison de notre société misérablement entêtée qu’offenser Dieu, l’auteur de la vie, le Sauveur de l’humanité, le fondateur du sacrement de mariage. Qu’il ait ou non programmé de revenir maintenant, au milieu de notre misère actuelle, nous savons qu’il reviendra un jour « juger les vivants et les morts ».


Ellen Wilson Fielding est rédactrice en chef de la revue Human Life Review. Elle vit dans le Maryland.

illustration : « le terrible jour de son courroux » par John Martin, vers 1853

source : http://www.thecatholicthing.org/2015/07/02/apocalypse-now-2/